mercredi 2 novembre 2011

Histoire du Coin et du Peux à Saint-André-Goule-d’Oie sous l'Ancien Régime

Petite Maine à la Rabatelière
En quittant le bourg de Chavagnes-en-Paillers, le voyageur qui se dirigerait vers le sud-est en direction de Saint-André-Goule-d’Oie, emprunterait une voie qui existe depuis des siècles : le Grand Chemin de Saint-Georges à Saint-André. Quelques haies subsistent désormais le long de la route, surtout à droite, bordant la rivière de la Petite Maine. Celle-ci prend sa source aux Essarts et se dirige vers le nord, dans la région de Vertou. Juste après le lieu de la Proutière, dans le bas d’une descente, la route passe sur un pont au-dessus de la rivière. Au-delà c’est le territoire de Saint-André. À tout juste 250 mètres sur la gauche, la Petite Maine recueille les eaux du Vendrenneau, ruisseau prenant sa source à Vendrennes. Ces deux petites rivières délimitent les communes de Saint-André et de Chavagnes en se rejoignant, formant un recoin de territoire. Jusqu’au 18e siècle, l’endroit s’est appelé le Coin Foucaud, du nom probablement du fondateur du terroir. Le nom de Coin indique qu’il domine un confluent de deux vallées étroites selon Amblard de Guerry (1).

Puis la route, empierrée depuis les années 1890 seulement, monte droit sur un plateau avec ses vastes champs tout dénudés comme dans la plaine de Poitiers. Sur la gauche, une ligne tortueuse de vieux arbres signale les méandres du Vendrenneau. Juste avant une première maison à façade blanche, sur le côté droit de la route, une pancarte indique le nom du village proche situé au sommet du plateau : le Coin. À gauche on ne voit maintenant que le sommet des arbres de la petite rivière, avec leurs nombreuses boules de gui, laissant deviner le coteau qui y descend. Et au-delà des arbres, on remarque les maisons de la Burnière et de la Cornuère, sur l’autre versant.

En observant une ancienne carte d’état-major, l’historien Paul Boisson a découvert un ancien chemin qui reliait à peu près en ligne droite le Coin aux Essarts. Il a aujourd’hui disparu (2).

Calvaire du Coin
Enfin on entre dans le village du Coin, avec son calvaire de briques rouges à droite et ses maisons de chaque côté de la route, nombreuses, avec leurs grandes planches de jardins.

Ce calvaire n’a qu’un siècle d’existence, la croix a été bénite en 1902 par l’abbé Verdon, curé de Saint-André. L’abbé Rorthais, chanoine et curé de Chavagnes, prononça une allocution. Elle avait été édifiée par la famille Aimé Guérin.

La croix fut renversée par une tempête au cours de l’hiver 1920/1921. La nouvelle croix en ciment armé, ouvragée par un des gendres de la famille, Louis Chacun, entrepreneur à Chavagnes, fut bénite le dimanche 26 juin 1921 en présence de plusieurs centaines de personnes (3).

La tradition et les temps anciens ont laissé des traces dans ce village, à côté des maisons neuves. Mais qui pourrait deviner qu’un château dominait cet espace il y a huit cent ans ?

Le château du seigneur du Coin


Il était situé auprès de la route de Chavagnes à Saint-André. De chaque côté se tenaient en 1550 les maisons de Guillaume Borgleteau et des Chauvert (4). Ces noms passent difficilement à la connaissance de la postérité, à cause des registres paroissiaux conservés qui commencent plus tard dans la région. On s’est posé la question de savoir s’il faisait face au logis de la Brunière, comme on écrivait jadis, qui était bâti de l’autre côté du ruisseau, entre ce dernier et les métairies, en haut du coteau (5). Le document le plus ancien qui évoque son existence date de 1405, et encore pour indiquer qu’il est en ruine. Plus explicite, un autre document de 1687 indique : « … ensemble sur les masureaux du Coin Foucaud où jadis était situé le château de messieurs vos prédécesseurs … » (6). Les masureaux ou petites maisons basses, se trouvaient à l’emplacement du village actuel. Les pierres du château ont dû être réutilisées, mais il n’est pas aisé de les repérer après tant de siècles.

L’accès aux archives de la seigneurie de Languiller (Chauché) dans le chartrier de la Rabatelière, éclaire d’un jour nouveau la seigneurie du Coin, jusqu’ici approchée par bribes. Il nous conduit à reprendre entièrement l’article publié en novembre 2011 : Le Coin un fief seigneurial à Saint-André-Goule-d’Oie. Et l’accès aux notes personnelles d’Amblard de Guerry ajoute un complément de grande importance sur la période la plus ancienne connue de la seigneurie du Coin.

Quand donc ce château du Coin a-t-il été détruit ? Sa fin par une destruction volontaire parait probable, comme la période, la guerre de Cent Ans, terminée au milieu du 15e siècle.

On est intrigué d’abord de constater qu’en pleine guerre de Cent Ans, quand en 1360 le Poitou fut annexé à la couronne d’Angleterre au traité de Brétigny, la paroisse de Saint-André-Goule-d’Oie est devenue anglaise, tandis que la châtellenie de Montaigu, et le prieuré de Chavagnes-en-Paillers qui en dépendait, restaient français (7). Le château du Coin est devenu pour quelques années un poste frontière entre les mains des Anglais, situation peu enviable pour la sécurité des habitants aux alentours on s’en doute. Située dans la mouvance de la châtellenie des Essarts, la seigneurie du Coin Foucaud a dû suivre le sort de son suzerain, pour un temps soumis au roi d’Angleterre officiellement. En réalité celui-ci resta politiquement fidèle au roi de France.

Cette guerre fit des ravages dans la région. En 1372, les Anglais occupaient Mortagne et l’Herbergement-Ydreau (Sainte-Florence-de-l’Oie). Cette année-là ils firent, sans succès, le siège de l’abbaye de la Grainetière, qualifiée de place forte et défendue par un vaillant capitaine pour le compte du roi de France, nommé Martinière (8). On sait aussi que Du Guesclin a chassé ensuite les Anglais, et s’est emparé de tout le Poitou au nom du roi de France en 1372. À cette occasion il a participé à la prise du château fort de Benaston (situé à Chavagnes-en-Paillers, à 3,5 kms du Coin), où on dit qu’il aurait eu une jambe cassée par une poutre enflammée qui traversait un fossé (9). Comment ne pas penser à la guerre de Cent ans pour évoquer la fin du château du Coin, peut-être un château fort lui aussi ? On sait les ravages causés alors par les « grandes compagnies » de mercenaires. Mais ce n’est là qu’hypothèse, faute de document trouvé remontant aussi loin.

Loyset Liédet : Exécution d’Olivier IV de Clisson
D’autant qu’au 15e siècle la région connut aussi les ravages consécutifs aux guerres privées entre seigneurs. Olivier IV de Clisson fut décapité pour félonie par le roi de France, et ses terres de Belleville, Montaigu et de Palluau confisquées puis restituées à la fin du 15e siècle à ses enfants. Un peu plus tard, sa petite-fille Marguerite, mariée à Jean de Blois, comte de Penthièvre, ralluma la guerre contre les Montfort pour la possession du duché de Bretagne. Le château des Essarts, qu'elle possédait, devint prison pour le duc Jean. En rétorsion les terres des Essarts et de Palluau furent occupées par des troupes bretonnes, ravageant les alentours et confisquées temporairement au profit d’un frère du duc Jean de Bretagne, Richard d’Etampes (10). Il fallut attendre le milieu du 15e siècle pour voir la restitution des Essarts aux Vivonne, et le calme revenir dans la région.

De plus, la guerre n’est venue qu’empirer les désastres épidémiques et climatiques. La peste, d’origine asiatique, est revenue en force pendant l’hiver 1347/1348 en Provence puis dans tout le royaume, et décima villes et campagnes. Elle s’installa en Europe, se déployant en grandes vagues pendant un siècle (11). En outre, le climat avait changé depuis le début des années 1300, marqué par des hivers plus froids, ce qu’on a appelé le Petit Âge Glaciaire, avec des épisodes de printemps-été pluvieux. Le gel et la pluie ont détruit des récoltes et engendré des famines, parfois mortelles comme en 1315, et toujours propices aux maladies. On n’a pas de description de ces phénomènes pour le Poitou, où la culture de l’avoine et du sarrazin, plus résistants au froid humide, a dû favoriser une adaptation. Mais pas plus qu’ailleurs les troupeaux, de moutons notamment, ont difficilement résisté aux rigueurs climatiques du temps. Les années 1340 virent le retour du couple maudit du gel et des pluies (12). La peste, d’origine accidentelle et s’étendant sur toute l’Europe, le Moyen Orient et le Caucase, est le facteur principal de la dépopulation. Les campagnes militaires procédèrent par vagues comme la peste, touchant inégalement des provinces. Les bandes armées pillaient partout où elles passaient, quels que soient leurs commanditaires. Leurs dégâts aggravèrent les désastres pandémiques et climatiques, des familles disparaissant et des tenures tombant en déshérence. La famine et la peste touchaient les pauvres, mais la guerre a frappé toutes les strates de la population. Au total tout le royaume fut touché, perdant le tiers de sa population environ en moyenne. La situation se prolongeant, on verra à Saint-André-Goule-d’Oie des villages disparaître, et probablement aussi à cette période le château du Coin tomber en ruine. 

En 1372 le fief du Coin appartenait à Jean de Sainte-Flaive. En 1405 son fils, aussi appelé Jean de Sainte-Flaive, en fit l’aveu, et héritera de la seigneurie de Languiller de son oncle en 1414. Dans son aveu aux Essarts pour le Coin vers 1405, il indique que le seigneur du Coin au début des années 1300 s’appelait Jean Allaire, et que son père Jean de Sainte-Flaive avait acensé à ferme perpétuelle le tènement de la Milonnière en 1372 (13). Concernant les seigneurs du Coin, ce sont les rares informations grapillées par Amblard de Guerry dans la documentation accessible, et on ne sait pas comment Jean de Sainte-Flaive père est venu à la possession du fief du Coin. Amblard de Guery donne une autre information d’importance : le fief de Saint-André (le bourg) appartenait à un nommé Droulin, seigneur de la Drollinière (devenue Linières), mais en 1343, Jean de Thouars y percevait des redevances sur une moitié du fief, relevant pour elles du baron de Montaigu à cause d’une obligation de ligence qu’il avait à l’Herbergement. Or vers 1405 le Coin, tenu de Languiller, est suzerain de la totalité du fief de Saint-André, et le seigneur de la Drollinière est pour ce fief son vassal aussi pour la totalité du fief. Pourquoi et dans quelles circonstances, la mouvance du baron de Montaigu a quitté le territoire de la paroisse de Saint-André ? Là encore le contexte de la guerre de Cent Ans s’impose, même si on n’a pas d’éléments pour répondre à la question. De plus le roi de France avait confisqué en 1343 la baronnie de Montaigu pour cause de félonie de son possesseur, Olivier IV de Clisson. Et aussitôt il reçut l’aveu mentionné ci-dessus pour le bourg de Saint-André. Il rendit les biens confisqués en 1362 au fils, Olivier V de Clisson. C’est donc probablement autour de 1350 que le roi céda au baron des Essarts la mouvance de Montaigu sur la moitié du bourg de Saint-André, dont celui-ci, en récompensa le seigneur du Coin, probablement Jean Allaire. Savary III de Vivonne (ca1300-1367), le baron des Essarts d’alors, fut qualifié par le roi en 1360 « d’aimé et féal », à cause de son dévouement à la cause française. Et le bourg de Saint-André n’est pas le seul fief concerné par cette poussée de la mouvance suzeraine des Essarts vers le nord, on observe la même chose à Chauché. Qu’après cette expansion des domaines du Coin vers 1350, on trouve en 1372 leur possession dans les mains de la famille de Sainte-Flaive, seigneurs de Languiller, et en 1405 le château du Coin en ruine, les malheurs de l’époque que nous avons brièvement décrits fournissent maintes circonstances pour ne pas s’en étonner.

L’historien Guy de Raignac a fait un travail considérable d’étude de nombreuses demeures nobles en Vendée. Il a trouvé ainsi des familles dont les archives ont disparu, mais dont les membres sont cités dans les archives de familles alliées ou en relations. Il constate lui aussi le phénomène, comme on le voit dans cet avant-propos qui débute ses travaux sur « Quelques familles anciennes du Bas-Poitou depuis longtemps éteintes, 1e série », écrites il y a une cinquantaine d’années. Il écrit : « La guerre de Cent ans provoque de grands bouleversements dans le système féodal de notre pays. Les grandes batailles comme Poitiers et Crécy furent très meurtrières pour les familles de l’ancienne chevalerie. De plus à cette époque les grands féodaux avaient à leur charge leur équipement et celui de leurs troupes. Une longue guerre les obligeait donc à de très importantes dépenses, et dans le même temps le pillage et l’incendie des récoltes diminuaient leurs ressources. Il fallait donc emprunter puis vendre des terres. Mais ceux qui les achetaient, devaient, comme possesseur de biens nobles, fournir le service militaire. Ce sera l’origine d’une nouvelle noblesse qui va peu à peu s’intégrer et remplacer l’ancienne. Puis au cours des siècles une partie de cette nouvelle noblesse va disparaître à son tour. » (14).

Le Coin Foucaud qu’on découvre dans l’aveu de 1405 et surtout dans un autre de 1550, dépassait en importance beaucoup de petites seigneuries des environs, alors qu’elle ne devait qu’une foi et hommage plain (simple) au baron des Essarts. Sa mouvance féodale s’étendait sur environ 70 % du territoire de la paroisse de Saint-André-Goule-d’Oie, comprenant aussi des fiefs à Chauché, les Essarts, Boulogne et Chavagnes-en-Paillers. Le seigneur du Coin était suzerain du fief noble du Coudray à Saint-André, ainsi que du fief de Saint-André constitué par le bourg de la paroisse où se trouvait le prieuré. Il était suzerain aussi d’autres droits de fiefs (à la Brossière, Boninière, etc.), vraisemblablement rachetés par lui, possédés tantôt par des nobles, tantôt par des roturiers, parfois petits, comme lui-même avait été racheté par Languiller.

Les documents consultés dans les archives de Languiller, sont essentiellement des déclarations roturières commençant avec le 17e siècle. Ils marquent ainsi le début d’un récit historique basé sur des preuves, alors que les composantes vivantes de la seigneurie ont disparu avec ses seigneurs, ses officiers, son château, etc. Les documents découverts nous permettent néanmoins de proposer une histoire de ses fiefs, centrée sur la propriété féodale, à commencer par le cœur de la seigneurie à l’origine : les villages du Coin et du Peux.

Les anciens villages du Coin et du Peux


Au départ il existait sur ce plateau du « bocage vendéen » trois villages et tènements, formant un seul espace. Il était délimité par les rivières de la Petite Maine et du Vendrenneau, et par les terres de la Racinauzière, de la Mancellière, de la Maigrière et de la Roche Mauvin, ces dernières toutes situées à Saint-André-Goule-d’Oie.

Rappelons qu’on appelait tènement un terroir d’étendue variable tenu d’un seigneur, souvent composé de différentes tenures ou parcelles foncières, et précisément délimité. À un tènement était souvent associé un village avec ses habitations, quaireux (cours), ruages (chemins d’accès), jardins, bâtiments d’exploitations agricoles. Le seigneur, propriétaire du tènement, l’avait concédé à des travailleurs pour le mettre en valeur, moyennant des redevances : cens, dîmes, rentes, terrages, etc. Ces exploitants ont pu transmettre leurs concessions par héritage et les vendre, moyennant d’autres redevances dues au seigneur : les "lods et ventes". Ainsi est née la propriété féodale de nombreux particuliers associée aux droits seigneuriaux, ceux-ci désignés comme nous venons de le faire dans la région. Cette propriété féodale n’avait pas le même caractère exclusif au profit du propriétaire que chez les Romains. Dans la plupart des cas, elle se trouvait partagée entre le seigneur (qui avait la propriété éminente) et les teneurs (qui avaient la propriété utile). Ces derniers acquirent la pleine propriété de leurs domaines, au sens proche de la Rome antique, avec la Révolution française. Il n’existait pas de titres de propriété comme aujourd’hui, et ce qui en tenait lieu étaient des actes notariés appelés aveux et dénombrements pour les fiefs nobles (ou minus en Bretagne), et déclarations roturières ou censives pour les biens non nobles.

Ruines du vieux château de Palluau
Les terroirs fonciers de nature noble s’appelaient des fiefs. Leur nature noble se rapporte au régime des droits à payer (symbolique pour son possesseur), et surtout à la relation au seigneur supérieur, le suzerain, par foi et hommage. Il est possible que le territoire du Coin Foucaud ait été un tènement à l’origine, repris puis concédé en fief ensuite. En 1405 le seigneur du Coin possède en ce village : « mon herbergement, lequel est acensé 5 sols par chacun an ». Il n’y restait plus que des petits bâtiments en ruines appelés masuraux. À côté il afferme une prairie aux habitants du village pour 25 sols par an « tant qu’il me plaira » (15).

Le premier aveu détaillé et connu concernant les propriétaires aux villages du Coin et du Peux, date du 7 novembre 1607 (16). Il a été fait par René Linger, écuyer seigneur de Mermande (Saint-Christophe-du-Ligneron) et de la Mancellière (Saint-André-Goule-d’Oie). Il habitait Mermande, lieu proche de Palluau, et déclara les biens tenus par lui au Coin. Sa famille était implantée au manoir de la Mancellière proche, depuis au moins la fin du 15e siècle. 

On apprend qu’en 1607, mais la situation décrite doit remonter plus loin dans le temps, il existait trois tènements, se joignant les uns les autres, avec chacun leur village différent : Coin Foucaud, Puy Foucaud et Puy Asselin. Les noms de Foucaud et d’Asselin désignaient généralement ceux du fondateur du tènement ou d'un propriétaire qui a suivi. Ces noms ont disparu à la fin du 18e siècle. Le village du Puy Asselin n’existe plus, semble-t-il depuis la fin du Moyen Âge, et ses maisons étaient probablement groupées vers l’actuelle Maison Neuve du Peux. Le village du Puy Foucaud se trouvait au lieu actuel du Peux. Le nom de Puy s’est transformé en Peux au cours du 18e siècle. On sait que le mot « puy » remonte au latin « podium », transcrit lui-même du grec avec le sens de base, point d’appui, piédestal, et par extension éminence, terrasse, tertre. En certaines régions le Moyen Âge l’a élevé à la dignité de montagne. Nous devons ces informations à l’abbé Paul Boisson, érudit natif de la Rabatelière. Au Peux, il désignait le tertre ou plateau au sommet du coteau qui descend vers le ruisseau du Vendrenneau.

La famille Lingier possède les droits seigneuriaux sur les deux villages 


Les droits sur les tènements du Coin Foucaud, Puy Foucaud et Puy Asselin (terrages, rente, dîmes) avaient été achetés à Jules de Belleville, ainsi qu’un droit de métairie par le seigneur de la Mancellière. René Lingier n’était pas seigneur du Coin. La seigneurie du Coin appartenait au seigneur de Languiller en 1607 et celui-ci en rendait l’aveu et dénombrement au seigneur des Essarts à cette date. René Lingier rendait, lui, une déclaration noble à Marie du Fou, dame de Languiller, pour les droits seigneuriaux de la seigneurie du Coin acquis par sa famille. C’était une déclaration pour des biens nobles tenus sans foi et hommage du déclarant, qui n’était ni un aveu (pour des biens nobles tenus à foi et hommage par le déclarant), ni une simple déclaration roturière (pour des biens non nobles). Dans cette déclaration noble, le déclarant avouait tenir son bien noble sous l’hommage que rend son seigneur dominant au suzerain du fief. Dans ce cas on disait aussi en Poitou que le bien était tenu en gariment (garantie).

Il y avait plusieurs sortes de tenures en gariment (17). Celle qui concerne le Coin Foucaud consistait à ce que le seigneur de Languiller, ayant aliéné une partie de son fief, y retenait le droit de fief ou mouvance. Au moyen de quoi il devenait le chemier (chef) du fief, étant chargé de porter la foi et hommage de tout le fief au suzerain des Essarts, auquel il garantissait les autres possesseurs du fief, comme René Lingier, appelé, lui, parageur par les juristes de l’époque. Le droit de fief ou mouvance pouvait être distinct des redevances seigneuriales et féodales. C’était le titre, unique et non divisible, de l’ensemble du fief, sauf à créer des arrières-fiefs inféodés, ce qui ne s’est pas fait pour le Coin Foucaud.

Nous avons ainsi en 1550 deux aveux de Languiller aux Essarts, le premier dénombre tous ses fiefs, dont Languiller, Coin Foucaud et autres, et le deuxième dénombre les domaines et les droits se rapportant uniquement à la seigneurie du Coin Foucaud. En retenant pour lui le droit de fief, ou la supériorité de la seigneurie directe, ou mouvance, le seigneur de Languiller percevait ainsi la redevance de lods et vente au moment des ventes de domaines, mais aussi en Poitou le droit de juridiction basse et le droit de tenir des assises suivant les règles de la coutume.

Jules Lenepveu : Jeanne au siège d’Orléans 
(Panthéon de Paris)
Le seigneur du Coin Foucaud n’était pas le seul à avoir disparu dans les guerres du Moyen Âge, et sa seigneurie lui survivait comme patrimoine de droits seigneuriaux, devenu la propriété du seigneur de Languiller, puis revendu au détail à des nobles et à des bourgeois. En avril 2014 nous avons publié un article sur ce site, évoquant ce phénomène : La seigneurie des Bouchauds aux Essarts. Les droits seigneuriaux perduraient au titre du droit de propriété, et allaient acquérir, avec l’évolution des esprits au 18e siècle, un caractère d’obsolescence au regard d’une conception moderne du droit de propriété et de l’organisation de la société. Quant à la chevalerie, à l’origine des concessions de fief, elle s’était « embourgeoisée » tout en gardant toujours un lien avec ce droit de la propriété. 

Le seigneur de Belleville, de Languiller et du Coin avait donc vendu aux ancêtres de René Lingier, le droit de prélever les redevances seigneuriales existant sur les trois tènements du Coin Foucaud, Puy Foucaud et Puy Asselin. Cette vente est révélatrice du besoin dans lequel se trouvait le vendeur, et des opportunités offertes aux acheteurs. Nous savons que d’autres portions de la seigneurie du Coin Foucaud furent vendues de la même manière à d’autres acquéreurs, aboutissant à un véritable dépeçage. Les droits seigneuriaux du Coin étaient devenus une marchandise. Mais le « droit de fief », ou « mouvance », ou « seigneurie directe » de la seigneurie continuait à former un ensemble indivisible, dont le baron des Essarts suzerain, continuait de recevoir la foi et hommage et l’aveu.

Ce démembrement du fief du Coin Foucaud obéissait à des règles particulières, appelées « jeu de fief » dans la coutume de Paris, ou « dépié » dans quelques rares coutumes comme celles du Maine et de l’Anjou. Dans le Poitou, les articles 130 et 131 de la coutume définissaient les conditions d’un droit particulier sur ce sujet, appelé « l’empirement de fief » (18). Sauf que ces articles ont été écrits dans la version de la coutume officialisée en 1514, et que nous ne sommes pas sûr qu’ils aient été appliqués avec rigueur lors des ventes pour les tènements en question. Ailleurs à Saint-André des ventes identiques d’autres droits de la seigneurie du Coin ont été effectuées, à la même période vers 1550 par le seigneur de Belleville et de Languiller, à divers acheteurs.

Les redevances seigneuriales et féodales


Quels étaient les droits possédés et déclarés en 1607 par René Lingier ?
Le plus important était le droit de terrage. Les propriétaires, ou leurs fermiers s’ils en avaient, donnaient 16,66 % des récoltes des terres labourables, soit « à la sixte partie des fruits y croissant par labeur », selon la formule consacrée. Les « fruits y croissant par labeur » signifiaient les récoltes ou produits des cultures. L’existence de ce droit trouve son origine dans les baux de concession de la terre au moment de la création des tènements, dits baux à champart ou à terrage. S’ajoutaient la dîme des pourceaux et de la laine, et des dîmes mixtes sur le Coin Foucaud et le Puy Foucaud, par exemple sur le lin. Le seigneur prenait les deux tiers des dîmes et le tiers restant avait été cédé au prieur de Saint-André. Les dîmes mixtes étaient celles qui provenaient en partie de la nature et en partie du travail des hommes. La valeur de ces dîmes, indépendantes de la dîme ecclésiastique, était fixée par la coutume du pays. Le paiement annuel, de 1/12e ailleurs à Saint-André-Goule-d’Oie, se calculait sur la moyenne arithmétique des produits des trois dernières années (19).
Et puis chaque tènement était redevable chaque année :


     
        





          Pièce de 30 deniers                    pièces d'un sol

-    Pour le Coin Foucaud : 6 livres en argent, 3 chapons et 36 ras d’avoine. En 1651 ces 36 ras d’avoine deviennent 35.
-        Pour le Puy Foucaud : 30 sols d’argent (1,5 livre), un demi-chapon et 21 ras d'avoine.
-        Pour le Puy Asselin : 12 sols d’argent, 1,5 chapon, 2 poules, 6 boisseaux de seigle de mesture (mélange de grains) et 12 ras d’avoine.

Ces montants sont plus faibles que ceux mentionnés en 1550 dans un aveu du Coin. En 1607, les bians (corvées) ont disparu. Ils consistaient à fournir au Coin, au moment des « fumailles » (épandage des engrais), pendant trois jours et aux frais (bouviers et bœufs) des teneurs, « cinq charrettes de bians chacune de six bœufs ». Le mot bian voulait dire corvée et c’était un maximum. En 1529 et 1541, le tribunal seigneurial de Languiller poursuivait 7 teneurs du Coin pour payer « 20 sols de bians annuels dus au terme de Saint-Michel » (20). À ces dates les corvées avaient donc été converties en argent. Et la redevance n’existait plus en 1550.

Le phénomène est général dans notre petite région, et il semble bien, sauf exceptions, que les corvées aient physiquement disparu à la fin du Moyen Âge. Les métayers assuraient eux-mêmes les charrois et fauchages, en quoi consistaient souvent les bians que nous avons rencontrés dans les archives de la Rabatelière, dont le nombre par année était encadré par la coutume du Poitou. Et ce sont eux qui continueront, mais sur un fondement contractuel et plus ou moins encadrés par la coutume, à assurer la part de service personnel aux propriétaires, pour certains charrois et travaux de maison (ex. lessive de Pâques). Les formules immuables employées dans les baux fleuraient bon l’odeur archaïque du Moyen Âge, où les métayers répondaient aux « semonces » du propriétaire à volonté, le mot signifiait « ordre ». D’ailleurs, toujours sur le fondement du droit contractuel, ces corvées survivront à la Révolution française jusqu’à l’aube du 20e siècle, n’ayant pas de caractère seigneurial.

L’estage, ou obligation de garde temporaire d’un lieu (château, mare etc.), avait lui aussi disparu. En 1529, cette obligation avait été transformée en une redevance de 13 sols par an (20). La redevance n’existait plus en 1550

Il faut mettre à part les corvées pour l’entretien des chemins, relancées sous l’égide de l’administration royale au 18e siècle. Elles ressuscitèrent après la Révolution pour l’empierrement de ces chemins, leur entretien et leur transformation en route. On réclamait alors trois journées par an aux contribuables, ou leur équivalence en argent fixée par le préfet pour ceux qui ne voulaient pas manier la pioche et la pelle, conformément au nouveau principe d’égalité des citoyens devant les « contributions » (impôts). En 1870 la « prestation en nature » (corvée) existait encore, et le législateur, qui voulait la supprimer et ne garder qu’un impôt payé en argent, mû par un esprit de modernité, se heurta aux populations rurales, pauvres en monnaie mais riches de leurs bras si l’on peut dire.

À ces droits perçus au titre de la seigneurie du Coin Foucaud il faut en ajouter deux autres concernant les villages du Coin Foucaud et du Puy Foucaud : l’avenage et le métivage. L’avenage, appelé aussi « ratier » localement, était une redevance en avoine due à cause des droits d’usage et pacage (21) accordés aux habitants de la châtellenie des Essarts. Donné au seigneur des Bouchauds à l’origine, celui-ci aurait cédé une partie de ce droit d’avenage au 13e siècle à Drouelin, seigneur de Linières. Puis dans un partage d’héritage en 1342, ce dernier l’avait transmis au seigneur de la Boutarlière appartenant alors à la même famille Drouelin (22). Dans un aveu de 1517 au seigneur des Essarts et de Palluau, René Drouelin déclare une redevance de 5 trouleaux d’avoine prélevée sur les habitants du Coin Foucaud et 2 trouleaux sur ceux du Puy Foucaud. Ces trouleaux d’avoine devaient être apportés « le jour de St Michel Archange en la ville des Essarts en la cohue (halle) du dit lieu ». La redevance était « partagée par moitié et par indivis avec le seigneur des Bouchauds » (23).

Le seigneur de la Boutarlière prélevait aussi pour lui-même le droit de métivage (moisson ou battage des blés) sur le seigle et l’avoine dans 68 villages des paroisses de Saint-André-Goule-d’Oie, Chauché, Boulogne et les Essarts. Au Coin Foucaud il prenait 3 boisseaux par an, et au Puy Foucaud deux boisseaux.

Dans un autre aveu de 1607, René Lingier déclare une métairie au tènement du Coin Foucaud, possédé à 8/10 avec un autre propriétaire non cité. La métairie lui rapporte cinq à six septiers (80 à 96 boisseaux) de blé (céréales) et elle est exploitée par les David à cette époque. Les bâtiments de cette métairie, situés dans le village, le long du chemin de Chavagnes à Saint-André, comprenaient en 1687 une maison basse avec ses appentis, granges, greniers et toits, le tout couvert de tuiles et de bourrées (chaume), cour, jardins, d’une superficie totale de 1800 m2.

Tous ces droits ainsi déclarés avaient été achetés et tenus ensuite du seigneur du Coin Foucaud et de Languiller sous un hommage perpétuel en gariment, moyennant un devoir de 12 deniers. Et à chaque changement de propriétaire du fief vassal, par dot ou héritage, le nouveau possesseur payait un rachat de 20 sols en argent. Ces deux redevances relevaient du symbole pour leur valeur, mais possédaient une force juridique très importante pour marquer le lien de vassalité de la terre et le droit de fief. Le seigneur du Coin en titre était donc le seigneur de Languiller recevant le rachat de 20 sols. En contrepartie René Lingier retirait des terres du Coin et du Peux un profit important, principalement à cause des terrages et des rentes en céréales perçus sur les teneurs sur place. L’hommage perpétuel durait, sauf exceptions, tant que le lignage du vassal durait. La formule garantissait ainsi une certaine stabilité à la situation, propre à sécuriser l’achat des droits seigneuriaux.

Pierre Laheu achète les droits seigneuriaux sur le Coin et le Peux en 1617


Pierre Laheu, sieur de la Vrignais (Chauché) acquit le 11 avril 1617 les droits seigneuriaux sur les tènements et villages du Coin Foucaud, Puy Foucaud et Puy Asselin (24).

Rabatelière : maison de justice 
et blason des Bruneau
Le 1e mai 1595, Pierre Laheu, marchand, demeure en l’hôtel noble de la Mancellière, comme on le relève dans un achat de bois futaie à Gralas (25). En 1597 Pierre Laheu, probablement le même, est fermier des seigneuries de la Rabatelière et des Robretières à Chavagne (26).  En 1599 il est fondé de pouvoir de Renée de la Mothe, veuve de Charles Bruneau Ier du nom, seigneur de la Rabatelière. En 1606 il fait la foi et hommage à la Roche Boursault et Vergne Ortie (Chauché) pour raison de domaines à la Landouinière (Chauché), et pour le compte de Renée de la Motte, dame de la Rabatelière (27). Ainsi la famille Laheu apparaît liée dans la première moitié du 17e siècle avec les seigneurs de la Rabatelière. C’est d’ailleurs dans la chapelle de la Rabatelière que Pierre Laheu se marie en deuxième noces le 9 juin 1609 avec Pierrette Crespeau, originaire de Chambreteau (registre paroissial de Chauché, vue 1). Sa première femme s’appelait Marie Alluchon, avec qui il avait eu six enfants (28). Le dernier, baptisé à Chauché le 26 décembre 1602, Renée, eut pour marraine Renée de la Mothe. À cette occasion on lit sur le registre paroissial (vue 30), que le curé le qualifie d’honorable homme. À cette époque l’expression s’applique en principe à des bourgeois dans la région, alors qu’autrefois le titre était en usage pour un écuyer, réservant aux chevaliers celui de « noble et puissant ». Ces règles paraissent avoir connu l’inflation comme les pièces de monnaie.

Visiblement nous avons affaire avec lui à une fortune importante, achetant la métairie de la Grande Roussière (Saint-Fulgent) en 1616 et surtout la seigneurie de la Brunière, devenue Burnière (Chavagnes), fief à part entière dépendant de la baronnie de Montaigu. Il en prit le nom en 1621 (29), et on verra son fils porter le titre d’écuyer dans d’autres documents. Mais les curés de Chavagnes continueront néanmoins de qualifier ses descendants de noble homme. La Burnière avait longtemps appartenu aux seigneurs de Thorigné à Chavagnes, depuis Jehan Thorigné qui rendait aveu en 1403 jusqu’à Gilette Thorigné qui rendait aveu en 1552.

Pierre Laheu eut comme enfants Pierre, avocat en l’élection des Sables, Louis, prêtre, et Alexandre, qui fut le chef de famille au décès de son père. Sa fille, Jaquette, se maria avec Auguste Blouin, sieur de la Girardière, lieutenant d’une compagnie au régiment de M. du Chatelier Barlot. En 1652 elle vendait pour 1780 livres à son frère Alexandre le 1/5e des domaines appartenant à leur frère Louis, prêtre décédé à Chavagnes en 1627. Pierre Laheu eut aussi Jeanne et Renée (inhumée à Saint-André-Goule-d’Oie le 10 août 1645, vue 5). Son fils Louis, dit « sieur des Petites Mancellières », vendit deux ans avant de mourir, le 26 mai 1625, une rente foncière et féodale de 47 boisseaux de seigle à la mesure des Essarts, à Alexandre Thoumazeau. La rente était due sur les tènements de la Bordinière et Plessis-le-Tiers (alors tous deux situés à Saint-André), à cause de la seigneurie de la Mancellière (30).

Du côté du suzerain, la seigneurie de Languiller, celles des Bouchauds et du Coin Foucaud, sont affermées ensemble en 1622 par Marie Hurault, veuve de Philippe Eschallard. Le fermier est Michel Daviceau, sieur du Chiron (31). À ce titre le fermier prélevait presque toutes les redevances féodales dues à cette époque sur le territoire de Saint-André-Goule-d’Oie. Marie Hurault était la fille de Rachel de Cochefilet, qui se remaria avec le duc de Sully, lui-même veuf et ministre célèbre d’Henri IV (32). Le fils de Marie Hurault, Maximilien Eschallard, afferma sa métairie de Belleville, en 1631, aux Moreau de Saint-André-Goule-d’Oie. En 1650 il vendit la seigneurie de Languiller et ses fiefs associés, dont le Coin Foucaud, à Pierre Le Geay, chevalier seigneur de la Getière (Saint-Georges-de-Montaigu). Celui-ci était aussi prévôt du Poitou, office au contour difficile à cerner pour cette époque dans le domaine de la police.

Alexandre Ier Laheu succède à son père après 1622


En 1622 Pierre Laheu était décédé (33). Son fils, Alexandre Laheu, se maria vers 1625 avec Marie Viaudet. Elle était la fille d’un auditeur à la chambre des comptes de Bretagne à Nantes. Ils eurent au moins sept enfants, dont les trois premiers sont nés au Coin et baptisés dans l’église de Saint-André-Goule-d’Oie :

-        Françoise née le 28-9-1628 (vue 83) à St André Goule d’Oie, dont la marraine fut une sœur de son père, Jeanne Laheu,
-        Renée née le 7-12-1729 (vue 86) à St André Goule d’Oie,
-        Alexandre né le 26-12-1630 (vue 90) à St André Goule d’Oie,
-        Charles né le 15-3-1638 (vue 4), baptisé à la Rabatelière,
-        Bruno né le 7-10-1641 (vue 14), baptisé à la Rabatelière,
-        François né le 29-12-1642 (vue 17), baptisé à la Rabatelière.
-        Pierre né le 20-3-1645 (vue 21), baptisé à la Rabatelière.
Ces baptêmes à la Rabatelière se sont faits dans l’église toute neuve de la nouvelle paroisse de la Rabatelière, comme un signe d’amitié envers le seigneur du lieu.

Pieter Meulener : Bataille de Nordlingen 
Qualifié d’écuyer, Alexandre Laheu fut gendarme dans la compagnie du duc d’Enghien (Louis II de Bourbon-Condé dit le Grand Condé). C’était un corps d’élite attaché à la personne du prince, sans rapport avec le métier de gendarme d’aujourd’hui. Il avait suivi François Bruneau de la Rabatelière sur les champs de bataille. Ce dernier était le fils aîné de Charles II Bruneau, le fondateur de la paroisse de la Rabatelière, qui avait été fait baron par Louis XIII en 1632. François Bruneau avait reçu à Phillipsburg en 1644 la lieutenance d'une compagnie de gens d'armes par brevet du duc d'Enghien. Alexandre Laheu fut plus chanceux que son compatriote et chef. En effet, le 3 août 1645 François Bruneau tomba, avec 4000 autres soldats de Condé, à Nordlingen (aussi appelée bataille d'Alerheim), frappé de cinq blessures, en combattant à la tête de sa compagnie. Son cœur, enfermé dans une boîte de plomb apporté à la Rabatelière, fut déposé dans la toute nouvelle église paroissiale construite par son père.

Vers 1629, Alexandre Laheu cessa d’habiter au Coin et d’être paroissien à la Rabatelière au bénéfice de la Brunière sur la paroisse de Chavagnes-en-Paillers. Dans un aveu de 1651 il se qualifie d’écuyer, sieur du Coin (34). Dans un aveu de 1651 il se qualifie d’écuyer, sieur du Coin.

Sa relation vassalique au seigneur du Coin en titre qu’était Pierre Le Geay, aussi seigneur de Languiller, dégénéra en conflit judiciaire. La situation difficile à comprendre de cette relation que nous avons décrite plus haut, où on distinguait le droit de fief retenu et indivisible, des redevances seigneuriales, était propice à alimenter des querelles. Il fallait se sentir à l’aise dans les subtilités du droit féodal de la propriété pour l’admettre. Le sieur de la Burnière et du Coin n’était-il qu’un teneur parmi d’autres au Coin, ou n’était-il pas le seigneur des lieux en raison des droits seigneuriaux qu’il percevait ? Pierre Le Geay et Alexandre Laheu s’opposaient sur cette question. Le 21 juin 1651, passant dessus la tête du seigneur de Languiller, Alexandre Laheu fit sa déclaration noble au baron des Essarts directement. Pierre le Geay saisi le tribunal de Fontenay-le-Comte. Le 2 décembre 1654 celui-ci déclara que le contrat d’acquisition en 1617 des droits seigneuriaux fourni par Alexandre Laheu n’était pas suffisant pour justifier ses prétentions.
Mais Alexandre Laheu mourut avant 1664, alors que le conflit durait toujours.

Alexandre II Laheu succède à son père en 1664 et perd les procès contre Languiller 


Le Coin anciennement Coin Foucaud
Le 10 juin 1664, c’est son fils Alexandre Laheu 2e du nom, qui fit sa déclaration à Pierre Le Geay, « comme chemier et principal héritier de défunt Alexandre Laheu vivant sieur du Coin mon père ». On sait que ce mot de chemier qualifiait le seigneur de Languiller, pour l’ensemble du fief du Coin Foucaud, à l’égard du suzerain des Essarts. Mais nous sommes ici en présence d’un autre type de tenue en gariment, dit gariment légal, où l’aîné dans une succession faisait sa déclaration au nom des cohéritiers (35). Dans les familles nobles il était qualifié de « principal héritier », puisqu’il avait droit aux deux tiers de la succession.

En 1666 Pierre Le Geay vendit sa seigneurie de Languiller et ses fiefs associés à René Langlois, seigneur de la Verrie et gendre du seigneur de Linières. Cette vente fut annulée en 1670, et c’est Philippe Chitton qui racheta Languiller et le Coin Foucaud en 1671 et 1674 aux héritiers de la veuve de Pierre Le Geay (36). Pugnace, le nouveau seigneur de Languiller poursuivi le combat contre les prétentions d’Alexandre Laheu fils et le fit plier.

Un mémoire en faveur de Philippe Chitton vers 1685 contre Alexandre Laheu plaida la position du premier dans le procès entre eux qui s’était accéléré depuis 1683 (37). Par sentence du 10 août 1686, le tribunal de Fontenay somma les teneurs du Coin Foucaud, dont messire Alexandre Laheu sieur de la Burnière, de fournir une déclaration roturière à Philippe Chitton,  seigneur de Languiller (38). La première déclaration roturière du sieur de la Burnière connue est datée du 31 décembre 1687. Désormais celui-ci fera deux déclarations, une dite noble au titre de ses droits seigneuriaux, biens nobles tenus sous gariment, et l’autre dite roturière en tant que co-teneur des tènements du Coin Foucaud, Puy Foucaud et Puy Asselin pour ses biens non nobles tenus roturièrement, c'est-à-dire sa métairie.

Alexandre Laheu fils s’était marié avec Louise de Maucourt (contrat de mariage chez le notaire Jean Fèvre à Fontenay le 28 juillet 1664, vue 226). Jacques Thomazeau, cousin, est témoin au contrat.

Il a été maintenu noble par sentence du 24 mars 1670 (39), ce qui n’empêcha pas le curé de Chavagnes de continuer à l’appeler « noble homme », alors que les autres seigneurs de Chavagnes, de souches plus anciennes, étaient « messires » et « chevaliers » sur le registre paroissial. Celui-ci conservait l’ancienne distinction parmi les nobles. Alexandre II Laheu eut pour enfants :
-        Jean Baptiste né en 1670, qui succéda à son père comme sieur du Coin.
-        Anne, mariée le 21-4-1704 à Saint-André-Goule-d’Oie avec Pierre Devasles, sieur de Chaillot, bourgeois de la paroisse de Nesmy.
-        Alexandre, sieur du Coin après son frère Jean Baptiste, né le 20-4-1677 à Chavagnes-en-Paillers.
-        Louise née le 31-10-1678 (vue 32) à Chavagnes-en-Paillers.
-        Marie née le 4-3-1680 (vue 50) à Chavagnes-en-Paillers.
-        Louise née à la Burnière le 17-12-1681 et enterrée le lendemain (vue 75).
-        Elizabeth née le 7-9-1682 à Chavagnes-en-Paillers (vue 86). Elle eut pour parrain Pierre Moreau, sieur du Coudray et sénéchal de Bazoges, et épousa Alexandre Gourraud, sieur de la Bonnelière (Chavagnes).
-        Michelle née en 1684 à Chavagnes-en-Paillers, épousa en 1718 Jean Hullin (Romagne, diocèse de La Rochelle).
-        Louise née le 25-3-1691 à Chavagnes-en-Paillers.
Alexandre Laheu fut aussi père, hors mariage, de :
-        François, né d’Andrée Bouffard, baptisé le 11-12-1661 à Saint-André-Goule-d’Oie (vue 173).
-        Marie, née d’Anne Arnaud, baptisée le 23-6-1667 aux Brouzils (40).

Ces deux dernières naissances nous invitent à penser que le cheval de cet ancien militaire devait bien connaître tous les chemins de la région.

La déclaration roturière en 1687 d’Alexandre Laheu nous permet, par la description détaillée de chaque parcelle tenue par lui, de mieux faire connaissance avec les villages du Coin et du Peux.

La métairie du Coin, la borderie et les moulins du Peux


Depuis l’achat de domaines et de droits au début du siècle au Coin, les Laheu avaient poursuivi l’achat d’autres terres, formant une borderie au Puy Foucaud, de 84 boisselées de terre et 8 journaux de pré en 1687 (14 ha). Leur métairie du Coin, à la même date, comprenait 170 boisselées de terre et 23 journaux de pré (32 ha). Les métairies ont commencé d’être constituées à Saint-André-Goule-d’Oie probablement vers la fin du Moyen Âge. Cet exemple tardif au Peux, en plein 17e siècle, nous montre leur mode de créations par achats de petites parcelles voisines. Il s’agit d’un transfert de richesse des petits propriétaires, obligés de se séparer de leurs maigres biens, vers un seigneur ou un bourgeois ayant la capacité d’investir. On ne sait pas comment s’est constituée la métairie du Coin, mais entourant le château féodal, il est probable qu’elle ait été créée et concédée d’un seul tenant à un métayer au Moyen Âge. Son existence est attestée dans la documentation consultée en 1729, affermée par Alexandre Laheu pour 430 £ par an (41).

Les Laheu avaient aussi construit à partir du milieu du 17e siècle deux moulins, l’un à vent et l’autre à eau, y joignant 15 boisselées de terres, pré et jardins à l’usage des fariniers, plus une maison avec appentis au village du Peux. Le seigneur bas-justicier « avait droit d’avoir moulin » selon la coutume du Poitou. Et ils avaient instauré un droit de vérolie auquel étaient assujettis les meuniers (42). L’instauration de ce droit avait pour fondement la justice seigneuriale, ici de basse justice, normalement. Or celle-ci appartenait au seigneur possédant la « directe seigneurie », suivant la coutume du Poitou, c'est-à-dire le seigneur de Languiller. Ce dernier dénia à Alexandre Laheu le droit de l’instaurer, indiquant dans un mémoire en 1685 que « aucun des tenanciers ne l’ont exécuté » (43).

Moulin en ruine au Coin
Le moulin à vent, dit moulin du Peux, était situé à la jonction du chemin de Chavagnes à Saint-André et de celui venant de la Racinauzière, sur une enclôture de 2 boisselées. Il était proche du chemin qui allait de Saint-Fulgent aux Brouzils, l’actuelle D 17, et plus au nord.

Il n’est pas à confondre avec le moulin du Coin, dont la ruine est toujours visible à la sortie du même village vers la Racinauzière. Nous ne connaissons pas les anciens propriétaires de ce dernier pour l’instant, et on hésite à le confondre avec le moulin de la Mancellière à cause de son emplacement. Il figure pourtant sur la carte Cassini, mais il n’a pas laissé de trace dans la documentation conservée. Le moulin figurant sur la carte Cassini est probablement celui de la Mancellière. Celui du Coin n’a pas laissé de trace dans la documentation conservée, même dans le cadastre de 1838, ce qui induirait qu’il a été construit après.

Le moulin à eau est appelé le déversoir du moulin du Peux par le cadastre de 1838, et situé en amont du moulin Boudaud et en aval de la planche (pont) de la Roche Mauvin, sur le ruisseau du Vendrenneau. On l’appelait « moulin à Maindron » ou « du Peux », suivant un témoignage de Joseph Boisson recueilli par l’abbé Boisson vers 1970 (44). Cela veut dire qu’il fonctionnait probablement au 19e siècle. Plus précisément il remplaça probablement sur le même ruisseau le « moulin à Boudaud » ou « du Coin », qui se trouvait sur le chemin conduisant directement du Coin à la Burnière. Le cadastre de 1838 indique toujours sur son emplacement « le déversoir du moulin Boudaud », mais on n’est pas sûr que le moulin existât encore à cette époque. Le lieu est celui appelé actuellement « le seuil de la Burnière ». Les Royrand possédaient une rente de 45 F sur le moulin à vent du Peux, qui fit partie de l’héritage de Pélagie Royrand, épouse de Charles François de Guerry de Beauregard. André Maindron leur racheta la rente en 1803 moyennant le versement de la somme de 650 F (45). En 1782, les enfants Maindron vendront leur part à leur frère André Maindron, dans les deux « moulins à eau et à vent appelés les moulins de la Burnière situés au tènement du Peux à Saint-André ». La vente comprend leur part aussi dans le paiement de la rente foncière due aux Royrand, se montant alors à 45 livres et un gâteau. La rente avait été créée au profit d’Alexandre Laheu le 24 novembre 1723, payée par l’aïeul André Maindron. On voit que son montant n’avait pas bougé en 1803, le notaire se contentant de remplacer l’ancienne unité de compte, la livre, par la nouvelle, le franc (46). Le gâteau de farine (dit « des rois » aux moulins des Chappeleau aux Robretières de Chavagnes) était associé à certaines rentes sur les moulins, suivant un usage aussi rencontré à la Bourolière, où dans un acte de 1784 il est estimé valoir 3 livres, ce qui signifie une taille importante du gâteau (47).

Nous savons par ailleurs que la seigneurie du Coin Foucaud possédait un droit seigneurial direct (payé au seigneur de Languiller) sur le moulin à eau de Thorigné et sa chaussée, installé sur la Petite Maine : six sols de cens par an dus par le meunier.

Les habitants, les chemins et les champs communaux au 17e siècle


Au 17e siècle les textes évoquent le chemin allant du Coin à la Burnière et le chemin qui conduisait du Peux à la Cornuère, traversant tous les deux le ruisseau du Vendrenneau. Mais pour passer ce dernier, on ne sait pas s’il existait un pont ou un simple gué. Le cadastre de 1838 indique l’existence d’une planche, autrement dit d’un pont en bois.

Non loin, la Petite Maine se traversait par le chemin du Coin au moulin de Thorigné, ainsi désigné sans mentionner le village du même nom (à Chavagnes), situé à une centaine de mètres du moulin sur ce chemin. Il était rejoint par le chemin du Peux à la Racinauzière, passant par la Mancellière.

On trouve mention du chemin de la Mancellière à la Roche Mauvin, de celui du Peux aux Essarts. D’autres sentiers ou petits chemins conduisaient à des terres : du Coin au pré de la Mancellière, du Coin au pré commun du Coin, du Coin et du Peux à la fontaine de chacun des deux villages.

À cette époque les landes étaient nombreuses entre la Petite Maine et le Vendrenneau sur ce plateau entre les deux rivières : landes communes aux deux villages du Puy Foucaud et du Puy Asselin, landes communes au Coin Foucaud et au Puy Foucaud, landes de la Mongie appartenant aux teneurs de la Maigrière, mais situées sur le tènement du Coin Foucaud.

D’autres parcelles foncières étaient communes aussi. Ainsi les teneurs du Coin Foucaud possédaient en commun les terres des Minées. Les teneurs du Puy Foucaud possédaient en commun un pré, un verger, la terre des Tierceré et le champ des Challotais. 

Les confrontations des parcelles appartenant à Alexandre Laheu indiquaient dans les quatre directions les limites naturelles (chemins et rivières) et les propriétaires voisins. Ainsi apparaissent en 1687 le nom de trois familles propriétaires à la fois au Coin et au Peux : Bonnin (Denis), David (Mathurin et Pierre) et Marchand (Jean, Pierre, René et Jacques).

Au village du Coin nous avons en plus : Boudaud, Collardeau, Deniau (Pierre et Alexandre) et Navarre.

Au village du Peux on rencontre les noms de : Amiaud Charles, Bossis, Chauvet Nicolas, Cauneau, Cossard Jean, Moreau Antoine, Moulineau André, Piveteau Louis et Trotin Charles.

Au moulin à eau on trouve un Drapeau et au moulin à vent Louis Piveteau.

Le Coin
En mars 1681 on voit le curé de Chavagnes baptiser Jean Piveteau du village du « Peu » paroisse de Saint-André-Goule-d’Oie, écrit-il, à cause du péril et de l’éloignement de la paroisse (vue 67 sur le registre). Il y eut d’autres baptêmes pour des habitants du Coin et de la Racinauzière à Chavagnes à cette époque, à cause de l’éloignement du bourg de Saint-André.

Un autre intérêt de la déclaration roturière d’Alexandre Laheu en 1687, même individuelle, est d’indiquer les devoirs collectifs dus par l’ensemble des co-teneurs au seigneur du Coin, seigneur de Languiller. Les masureaux du Coin Foucaud étaient acensés (loués à cens) à cinq sols par an aux teneurs du Coin Foucaud comme en 1405 (voir ci-dessus). A. Laheu en possède une grande partie déclare-t-il, ajoutant : « desquels je suis contribuable avec les teneurs du Coin ». S’ajoutaient pour l’ensemble des trois tènements un cens et une rente, payés chaque année par tous les teneurs : cinq sols en argent, un boisseau de seigle, deux boisseaux d’avoine et un chevreau.

Et le surplus des droits féodaux appartient à A. Laheu. Nous les connaissons pour les avoir déjà évoqués : droit de terrages au 1/6e, dîmes, menus suffrages, droit de vérolie. Mais le seigneur a modifié les redevances de chaque tènement. Il a supprimé les devoirs payés en argent, ainsi que les menus suffrages de chapons et poules. Et il a remplacé l’avoine et le seigle de mesture dus sur les trois tènements par le seigle et le froment, signe évident d’une orientation vers des céréales plus nobles. Au total les 68 boisseaux d’avoine et les 6 boisseaux de seigle de mesture sont remplacés par 74 boisseaux de seigle et 10 boisseaux de froment.

Dans une parcelle du Coin Foucaud, dite le Champ des Fossés, A. Laheu a donné à Joachim Drapeau deux boisselées de terre à planter en vigne, à côté de la vigne du nommé Bonnin. En 1838, la vigne du Coin occupe une surface de 22 ares et celle du Peux de 1 ha et 80 ares.

Alexandre Laheu, 2e du nom, mourut le 1e mars 1694 à Chavagnes (vue 4). Sa veuve, Louise de Maucourt fit une nouvelle déclaration roturière à Philippe Chitton le 7 mai 1696. Son texte reprend celui de 1687 que nous venons de présenter.  

Jean Baptiste Laheu succède à son père en 1694


Jean Baptiste Laheu devint chef de famille et sieur de la Brunière. Il se maria à Chavagnes le 8 février 1712 avec Perrine de Chevigné, fille d’Henri de Chevigné, seigneur de la Surie (vue 112). Elle mourut en 1717, âgée de 35 ans. Leur fille, Jeanne Madeleine, fut baptisée à Chavagnes le 22 décembre 1714 (vue 132). Celle-ci fut veuve d’Estienne Bouron, notaire et greffier de Montaigu, demeurant au bourg de Saint-Georges-de-Montaigu en 1767. Jean Baptiste Laheu, mort au Coin, fut inhumé le 6 juin 1737 à Chavagnes (vue 57).

En 1701, le seigneur de Languiller, Charles Auguste Chitton, reçut une nouvelle déclaration roturière de vingt-sept teneurs des trois villages du Coin et du Peux, hors le sieur de la Burnière (48). Ils totalisaient une surface de terres possédées de 400 boisselées, représentant une moyenne de 15 boisselées par propriétaire. Mais la liste n’est pas complète.

C’est dire l’importance du morcellement de la propriété à cette époque et aussi l’importance des surfaces non cultivées. La boisselée valait alors 12 ares 16 centiares à Saint-André. D’ailleurs on voit des propriétaires de toutes petites parcelles, résultat des héritages successifs poussant au morcellement. Et certains propriétaires sont en même temps maçons. On retrouve beaucoup de noms déjà cités plus haut pour l’année 1687.

Alexandre III Laheu succède à son frère en 1737


Maison Neuve du Peux, anciennement Puy Asselin
À la mort de son frère, Alexandre Laheu 3e du nom devint sieur de la Burnière et rendit ses déclarations au seigneur de Languiller le 19 mars 1740. Celui-ci s’appelait alors Charles Louis Chitton, fils de Charles Auguste et petit-fils de Philippe Chitton qui avait acheté la seigneurie. Celle-ci fut vendue cinq ans plus tard, en 1745, à René de Montaudouin, alors seigneur de la Rabatelière.

Dans cette déclaration de 1740 (49) le montant des rentes perçues par le sieur de la Burnière a baissé. On a toujours 10 boisseaux de froment, mais le nombre de boisseaux de seigle est passé de 74 à 43. On ne sait pas pourquoi, probablement un transfert vers un autre bénéficiaire.  

Alexandre Laheu, épousa Marie Frappier, née vers 1675 et décédée à Chavagnes-en-Paillers le 16 septembre 1755 (vue 122).

La métairie du Coin a été arrentée à Alexandre Laheu par Charles Bousseau, sieur des Filées, notaire royal demeurant dans le bourg de Chavagnes-en-Paillers le 12 mars 1746. Alexandre Laheu dû mourir peu après, car on voit que le 1e septembre 1749 le présidial de Poitiers condamna Charles Bousseau à déguerpir de la métairie au profit de Louise Laheu et Guillaume Sébastien Alexandre Assailly, écuyer seigneur de la Salmondière (Arthenay dans les Deux-Sèvres) et de sa femme Louise Lepage. On présume ceux-ci héritiers d’Alexandre Laheu. Ces informations sont tirées du contrat de déguerpissement de ces derniers avec Charles Bousseau du 27 décembre 1749. L’abandon se fera « à la manière accoutumée », écrit le notaire de Montaigu, qui ajoute « pour être vendue [la métairie] sans retardement par autorité de justice à la diligence du seigneur de la Salmondière et son épouse et de ladite demoiselle Laheu » (50).

Charles Louis Royrand nouveau possesseur des droits seigneuriaux vers 1750


L’historien Amblard de Guerry de Beauregard, indique dans un article de la Revue du Bas-Poitou en 1961 (51), que Charles Louis de Royrand « avait hérité d’un parent vers 1750 de la terre de la Brunière, à cheval sur Saint-André et Chavagnes de chaque côté du Vendrenneau : le logis des Laheu avec sa métairie, la métairie du Coin et la borderie du Peux ». Néanmoins son information ne précise pas comment la métairie du Coin est passé des héritiers Laheu en 1749 à Louis de Royrand ensuite. La date approximative de 1750 indiquée plus haut est confirmée par une note du curé de Saint-André sur son registre paroissial allant de 1743 à 1769. À la vue 169/275 sur le site internet des Archives de Vendée, on lit : « extrait du registre du vingtième de 1758 article 187 : Alexandre Laheu pour la métairie du Coin Foucaud, la borderie du Peux et ses dépendances soixante-six livres, cy : 30 30 6 ». On sait que le vingtième était un impôt royal, mais on se demande bien pourquoi le curé s’en préoccupe. La métairie du Coin Foucaud appartenait à Charles Louis Royrand en 1759. Il y installa à partir de 1760 la veuve Boisson, Marie Paquereau, qui venait de la métairie voisine de la Mancellière. À cette date la souche de bétail fut estimée à 1 000 livres (52). Dans une déclaration roturière faite à M. de Royrand en 1777, on lit au début : « Sachent tous que de vous messire Charles Louis Royrand chevalier de l’ordre royal et militaire de Saint-Louis chevalier seigneur de la Roussière, l’Aunay, la Brunière et autres lieux … » (53). Avec le temps qui passe, les changements d’hommes et la situation compliquée de la seigneurie du Coin Foucaud, celle-ci semble avoir disparu des papiers notariaux à Saint-Fulgent. Quelle importance, la Révolution française est proche, qui va supprimer les liens vassaliques.

Le Peux anciennement Puy Foucaud
La déclaration roturière de 1777 nous donne quelques informations intéressantes. Elle a été faite par Renée Canteteau, veuve de Pierre Briand au village du Peux, pour des biens venant de la mère de son mari, Jeanne Chauvet. En tout on trouve 30 parcelles décrites par le notaire de cette personne pour une surface de 16 boisselées environ (2 hectares), mais comportant 10 parcelles de planches de jardin et vergers et 8 parcelles de prairies naturelles.

Elle habite avec ses enfants dans trois maisons du village, proches les unes des autres : une avec une seule chambre basse et son plancher au-dessus, et deux autres maisons composées d’une chambre basse seulement, dont l’une se joint avec un toit à animaux. Elle possède en outre un deuxième toit à animaux et un masureau, c'est-à-dire une toute petite maison. Les droits seigneuriaux qu’elle déclare sont ceux de tous les « teneurs du Coin, du Peux Foucaud et Peux Asselin », dus uniquement au seigneur de la Burnière : 5 livres en argent, 25 boisseaux de seigle et 35 boisseaux d’avoine. On le voit, les quotités dues ont varié dans le temps. Mais cette variation étonne, indiquant par ailleurs des quantités différentes d’une autre déclaration faite par un autre teneur, André Herbreteau (54). La confusion des seigneuries du Coin et de la Burnière y est peut-être pour quelque chose en additionnant ou non les deux fiefs. D’ailleurs, deux ans après, dans un procès-verbal de partage de la succession du seigneur de la Rabatelière en 1779, on relève que les redevances dues à cette dernière sur les trois tènements étaient au total de 19,5 boisseaux de seigle, 16 boisseaux d’avoine et 2 livres 17 sols en argent y compris la valeur d’un chevreau et 1 jalon de miel (55). Les 16 boisseaux d’avoine avaient été récemment acquis par droit de retrait féodal par Mme Montaudouin de la Clartière. Renée Canteteau déclare aussi les dîmes dans les conditions déjà décrites, et des droits de terrage dus « à la sixte partie des fruits y croissant par labeur », mais avec une liste de treize tenures franches des droits de terrages. Ceux-ci ont probablement été rachetés. On voit apparaître une liste d’une dizaine de rentes secondes foncières dues à des particuliers chaque année, souvent faibles, et provenant probablement de ventes opérées par le seigneur de la Burnière ou de dons qu’il a faits. Citons pour l’anecdote : 

- plus 11 boisseaux seigle appelés « rente des Chauvets », que plusieurs des teneurs des tènements ci-dessus partagent entre eux, devers laquelle j’en prends.
- plus aux héritiers et représentant du sieur Merland de Champeaux aussi 5 boisseaux seigle par an aussi ci-devant acquise des Chaillou et du sieur de la Lande Gateau.
- plus à la fabrique de Chavagnes 1 boisseau seigle.
- plus au sieur curé des Essarts aussi 1 boisseau seigle.
- plus au seigneur de la Rabatelière 13,5 boisseaux d’avoine et un jalon de miel par an. 
Dans la déclaration de la même année d’André Herbreteau évoquée ci-dessus, ce dernier déclare les mêmes rentes et d’autre en plus :
-          4 boisseaux seigle, 2 boisseaux ½ d’avoine à la seigneurie des Essarts
-          5 boisseaux seigle aux héritiers de Pierre David, acquis ci-devant des Chaillou
-          4 boisseaux seigle aux héritiers Alexandre Moreau du Rochais
-          5 boisseaux seigle et 12 deniers en argent au seigneur de Landouinière
Les trois tènements totalisaient 103 hectares.

Au moment du partage des biensn considérés comme indivis par les autorités, entre Thomas René Montaudouin, propriétaire de la Rabatelière, et sa sœur Thérèse Montaudouin, en 1797, le premier ayant ses biens confisqués par la République pour cause d’émigration, les rentes du Peux échurent à la nation. À cette date le jalon de miel fut estimé en valeur à 2 livres 10 sous (56). Dans les comptes du régisseur de la Rabatelière du 3 mars 1757 on voit qu’un jalon de miel valait en pois 10 livres, soit environ 5 kg, et qu’une livre de miel était estimée 4 sols, ce qui faisait au total une valeur de 2 livres (57). On a la même valeur en 1788 (58). Et c’était de l’argent que les teneurs du Puy Asselin donnaient au château et non pas du miel. Rappelons que ces rentes et devoirs sont exprimés pour le total dû par tous les teneurs des trois villages. La part de Renée Canteteau devait être mince dans cet ensemble, mais néanmoins trop importante au regard de ses ressources qu’on devine bien minces.

Faisons connaissance maintenant avec ce nouveau seigneur de la Burnière. Né vers 1721 sans doute à Sainte-Pexine, Charles Louis de Royrand servit au régiment de Navarre et quitta l’armée pour se marier à l’âge de 44 ans avec Thérèse Charlotte du Chaffault (fille du célèbre marin) en 1765 à Montaigu, où naquirent leurs enfants : Pélagie et Charles César. À la naissance de ce dernier il devint veuf et se retira d’abord à la Petite Roussière de Saint-Fulgent, logis incommode à tourelle. Il s’installa ensuite à la Burnière, et à proximité de la nouvelle route royale de Nantes à la Rochelle, il acheta un terrain et commença la construction d’un château, où il s’installa en 1785, l’année de sa mort, le 20 juillet.

Son fils était alors déjà marin et sa fille en pension dans un couvent. Son frère, Charles Aimé, fut nommé leur tuteur. En décembre 1785, venant lui aussi de la Roussière, il s’installa à la Burnière, et continua les travaux de construction du château (59). C’est là que vinrent le trouver en mars 1793 les bandes de paysans des environs qui s’étaient révolté contre la conscription militaire. Parmi elles, celle de Christophe Cougnon de Saint-André-Goule-d’Oie, avait même attaqué et mis en fuite à Saint-Fulgent une colonne de 200 gardes nationaux. On connaît la suite : Charles Aimé de Royrand accepta de suivre les paysans. Les autres chefs de bandes, parfois anciens officiers comme lui, le firent général de l’armée du Centre de la Vendée. Il mourut à la fin de l’année dans la Virée de Galerne (Voir sa biographie dans le dictionnaire des Vendéens sur le site internet des Archives de Vendée).

Son neveu, Charles César de Royrand, s’engagea au côté des royalistes et ses biens de la Burnière et du Coin furent confisqués en conséquence. Il fut fusillé en 1795 après l’expédition de Quiberon.

Ventes des biens nationaux


Le Coin
Sa métairie du Coin fut vendue le 25 germinal an 6 (14-4-1798) à Jean et Pierre Bordron pour la somme de 132 100 F (60). Jean Bordron était le fils du premier maire de la commune de Saint-André-Goule-d’Oie, lui-même agent communal depuis quelques mois et appartenant au camp des républicains. On le surnommait « la couette », sans qu’on soit sûr d’en connaître la raison. Pierre Bordron était un de ses oncles habitant Sainte-Florence. À cette occasion l’acte de vente décrit la consistance du bien, et on apprend que le village du Coin n’a pas été épargné par les opérations d’extermination : « la métairie du Coin Foucaud, la maison du colon incendiée, les autres bâtiments et servitudes en ruine, jardins et ouches, et 286 boisselées tant en prés, pâtis, bois, taillis, terres labourables, sous diverses dénominations et divers tènements, tel que le tout se poursuit et comporte, qu’en jouissent les fermiers actuels, et que les confrontations sont plus amplement détaillées au procès-verbal et inventaire daté du 12 ventôse an 6. » On sait que le château de la Burnière fut aussi incendié.

Le même jour, le même Jean Bordron acheta seul la borderie du Peux pour un montant de 34 100 F (61). Sa consistance est ainsi décrite : « la borderie du Peux consistant en bâtiments et servitudes nécessaires à l’exploitation, partie incendiée et partie subsistante, jardin et 101 boisselées tant en prés, pâtis qu’en terres labourables sous diverses dénominations et divers tènements, tel que le tout se poursuit et comporte, qu’en jouissent les fermiers actuels, et que les confrontations sont plus amplement détaillées au procès-verbal et inventaire daté du 12 ventôse an 6. » 

Dans les deux cas les estimations et inventaires ont été effectués par le citoyen Merlet, commissaire du directoire exécutif près l’administration municipale du canton de Saint-Fulgent. C’est dans cette administration que siégeait l’agent communal de Saint-André, comme on sait.

Le même Bordron remporta l’adjudication du bail à ferme d’une borderie à la Porcelière, devenue bien national, l’année d’après pour 100 F par an.

Il est à noter qu’on a aussi pillé et incendié la maison de Louis Bretaud, vivant avec son fils dans le village du Peux. Lors du mariage de ce dernier en 1796 avec sa voisine Perrine Borleteau, il ne restait plus au père comme effets personnels, qu’une mauvaise couette et trois gros draps (62). Quelle serait l’étendue des ravages si les documents conservés n’étaient pas aussi rares ? Ce détail d’une ligne dans un acte notarié est terrible : comment rendre compte de l’épouvante vécut à la vue des flammes allumées par les soldats ennemis embrasant sa propre maison pendant la guerre de Vendée ?

À cette date les cens, les droits de terrages, les dîmes, et les droits de rachat avaient été abolis, les rentes seigneuriales aussi, non sans difficultés parfois. À leur place avaient été institués des droits de succession et des contributions : contribution foncière sur le bâti et le non bâti, contribution personnelle et mobilière, patente. Quelques mois plus tard on inventa la contribution sur les portes et fenêtres.




Déclaration des droits de l'homme :

Art. 17. La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité.



La propriété, érigée en droit de l’homme, allait bénéficier d’une conception nouvelle, définie dans l’article 544 du code civil des Français, publié pour la première fois en 1804 : « la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements ». Elle est toujours la même, plus de deux siècles après, et portant toujours le même numéro.

Les tènements de l’Ancien Régime ont disparu avec les droits seigneuriaux auxquels ils servaient de cadre. Quand on regarde le cadastre napoléonien de 1838 (Section H du Peux), les plans découpent l’espace en sections nouvelles regroupant les parcelles cadastrales crées. La section du Coin no H 2 et la section no H 3 du Peux recouvrent à eux deux les anciens tènements du Coin Foucaud, du Puy Foucaud et du Puy Asselin. Peut-être faut-il y ajouter une partie de la section de la Mancellière no H 4.

Les droits seigneuriaux supprimés par la Révolution ne comprenaient pas les rentes foncières et perpétuelles dues à un autre titre que seigneurial, pour payer un achat, un bail, ou rembourser un prêt par exemple, même faits depuis très longtemps. Tant qu’elles n’étaient pas rachetées, elles étaient dues. Elles étaient néanmoins rachetables de droit à l’initiative des débiteurs depuis le nouveau code civil. C’était le cas d’une rente de 10 boisseaux de seigle qu’un de Vaugiraud avait vendue à Clément Grolleau, meunier à la Clavelière et fils du meunier de la Boutinière. Les titres de propriété et l’acte de vente de la rente avaient été incendiés « par les effets de la guerre civile du département », écrit le notaire dans un nouveau titre de reconnaissance de la rente en date du 26 mai 1798 (63). Les 24 propriétaires du tènement du Peux sont cités dans cette reconnaissance, dont 8 habitent le Peux. 

En 1838 les propriétaires du bâti dans le village du Coin sont : Allain Jean, Bertrand Jean, Bordron Louis (habitant des Essarts, propriétaire de la métairie autrefois des Laheu), Chaupin Jacques, David Jean et Pierre, Gréau Jean, héritiers Herbreteau (demeurant à Thorigny de Chavagnes), Laporte Rosalie (Chavagnes), Marchand Alexandre, Sionneau Pierre, Alexandre et David.

En 1775, André Gréau avait loué sa borderie du Coin à un nommé Puaud, venant des Landes-Genusson, dans un bail de 9 ans pour le prix de 120 livres par an. Lui-même avait préféré prendre à bail une grande métairie à Saint-Martin-des-Noyers (64).

Les propriétaires du Peux en 1838 sont : Amiaud Charles, Bordron Louis (Essarts, propriétaire de la borderie autrefois des Laheu), Bretaud Jean, Boisson Pierre (Chavagnes),  Cauneau Jean (Girardière de la Rabatelière), Chauvet Augustin et Jean, David Jean et Étienne, Fonteneau Jean, Guichard Pierre, Laporte Pierre (Chavagnes), Maindron Pierre, Moreau Pierre, Piveteau Pierre et Jacques (Chavagnes), Porteau Pierre, Pluchon Jean.

Pierre Maindron est alors propriétaire du moulin à eau du Peux avec Jacques Robin.


(1) Note d’Amblard de Guerry pour une présentation générale sur Saint-André-Goule-d’Oie, Archives d’Amblard de Guerry : S-A 1.
(2) Saint-André-Goule-d’Oie lieux-dits et autres, Archives du diocèse de Luçon, fonds de l’abbé boisson : 7 Z 76-1. 
(3) Bulletin paroissial de Chavagnes-en-Paillers, septembre 1921, vue 51 sur le document numérisé aux Archives départementales de la Vendée.
(4) Aveu du Coin Foucaud et du Vignault du 2-7-1605 par Languiller aux Essarts, reproduisant un aveu de 1550 – deuxième copie, Archives de Vendée, chartrier de la Rabatelière : 150 J/G 61.
(5) Notes no 9 et 15 sur le Coin à Saint-André-Goule-d’Oie, Archives d’Amblard de Guerry : S-A 1. Et note no 1 sur le fief du Coin et ses redevances à Saint-André-Goule-d’Oie aux 15e et 16e siècles : S-A 4.
(6) Chartrier de la Rabatelière : 150 J/ G 62, seigneurie du Coin Foucaud, déclaration roturière d’Alexandre Laheu pour le tènement du Coin du 31-12-1687.
(7) A. de Guerry, Chavagnes communauté vendéenne Privat (1988), page 71
(8) Archives de Vendée, revue de la société d’Émulation de la Vendée, article L. de La Boutetière (1874), page 133 (vue 112).
(9) Louis Brochet, la Vendée à travers les âges (1902) : histoiredevendee.com
(10) Archives de Vendée, revue de la société d’Émulation de la Vendée, Gourraud, Chavagnes-en-Paillers 1876, vue 93.
(11) Histoire de la France rurale tome II, Hugues Neveux, Déclin et reprise fluctuation biséculaire 1350-1560, Seuil, 1975, page 42.
(12) E. Le Roy Ladurie, Histoire humaine et comparée du climat, Fayard, 2004, tome I, page 31 et s.
(13) Note no 39 sur le Coin à Saint-André-Goule-d’Oie, Archives d’Amblard de Guerry : S-A 1. Et Idem (1).
(14) G. de Raigniac, Quelques familles anciennes du Bas-Poitou depuis longtemps éteintes, 1e série : 8 J 1, famille Bonnevin, page 1.
(15) Idem (5).
(16) seigneurie de Languiller, aveu du 7-11-1607 pour la Mancellière et le Plessis-le-Tiers au seigneur des Bouchauds et pour le Coin et le Peux au seigneur du Coin Foucaud, chartrier de la Rabatelière : 150 J/G 38. 
(17) Joseph-Nicolas Guyot, Répertoire universel et raisonné de jurisprudence civile, criminelle, canonique et bénéficiale, Paris : Visse (1784-1785) tome 8, page 135, vue 68 sur le site internet des Archives de la Vendée dans : imprimés isolés numérisés.
(18) Joseph-Nicolas Guyot, Répertoire universel et raisonné de jurisprudence civile, criminelle, canonique etc.  Paris : Visse (1784-1785) tome 6, page 684, vue 361 (id).
(19) Louis Marquet, Principes généraux de la coutume de Poitou, Poitiers (1764), page 139.
(20) Assise de Languiller en 1529, Archives de Vendée, chartrier de la Rabatelière, : 150 J/M 22, page 176. Et Assise de Languiller en 1541, ibidem : 150 J/M 22, page 713.
(21) Archives de Vendée, Annuaire de la Société d’Émulation de la Vendée, A. Bitton, Naissance des fiefs, juridictions Bas-Poitevines et liste des droits de fief en Poitou (1889), page 109 et s. vue 70 sur le site internet (documents numérisés, revues).
(22) Archives de Vendée, Xavier Aimé, La Boutarlière ou le passé retrouvé : BIB MEM 455.
(23) 150 J/G 39, copie de l’aveu du 26-1-1517 du seigneur de la Boutarlière aux Essarts.  
(24) 150 J/G 62, procès Chitton/Laheu, jugement de second défaut du 2-12-1654 contre Laheu, refusant son titre de propriété de 1617.
(25) No no 22 sur la Mancellière à Saint-André-Goule-d'Oie, Archives d'Amblard de Guerry : S-A 2.
(26) 150 J/F L supp la Robretière, acquêt du 6-11-1597 de la Funerie (un quart) par Renée de la Mothe.
(27) 150 J/C 2, foi et hommage du 20-4-1606 de Pierre Laleu pour Renée de la Motte, à la Roche-Boursault et Vergne Ortie, pour raison de la Landouinière.
(28) Archives de Vendée, notes Généalogiques de J. Maillaud, tome 18 pages 266 à 273.
(29) Idem (2)
(30) Déclaration roturière du 20-3-1746 de la rente en seigle due sur la Bordinière et Plessis-le-Tiers, Archives de Vendée, chartrier de la Rabatelière : 150 J/G 38.
(31) Archives de Vendée, notaire de Fontenay-le-Comte Jehan Robert (3 E 37/301), ferme du 4-7-1622.
(32) De La Chesnaye-Desbois, Dictionnaire de la noblesse, Paris (1773), Tome 6, 2e édition, page 73.
(33) No no 23 sur le Coin à Saint-André-Goule-d'Oie, Archives d'Amblard de Guerry : S-A 1. 
(35) Joseph-Nicolas Guyot, Répertoire universel et raisonné de jurisprudence civile, criminelle, canonique et bénéficiale  Paris : Visse (1784-1785) tome 3, vue 173 (id).
(36) Archives de Vendée, Chartrier de la Rabatelière : 150 J/G 49, mémoire du 20-1-1683 de P. Chitton au parlement de Paris, page 5.
(38) 150 J/G 44, procès Chitton/Laheu, sentence du 10-8-1686 signifiée aux teneurs par Boudaud.
(39) Colbert de Croissy et Barentin, État du Poitou sous Louis XIV, page 401.
(40) Archives de Vendée, notes généalogiques de Jean Maillaud (1979) : BIB MEM 530-1.
(41) Idem (34).
(42) 150 J/G 62, déclaration noble d’Alexandre Laheu pour le tènement du Coin du 28-2-1684.
(43) Idem (37).
(44) Archives historiques du diocèse de Luçon, fonds de l’abbé boisson : 7 Z 73-9 logis et moulins de Saint-André-Goule-d’Oie.
(45) Amortissement du 17 ventôse an 11, d’une rente sur le moulin de la Burnière, Archives de la Vendée, notaires de Chavagnes-en-Paillers, Bouron : 3 E 31/20.
(46) Vente du 28-7-1782 de 1/6 des moulins à eau et à vent de la Burnière de Pierre Maindron à André Maindron (meunier au Peux et frère), situés au Peu Asselin, notaires de Saint-Fulgent, Bellet 3 E 30/127. Et vente du 8-1-1786 d’une portion des moulins à eau et à vent appelés les moulins de la Brunière situés au Peux par Pierre Rautureau et Marie Maindron à André Maindron farinier, notaires de Saint-Fulgent, Frappier : 3 E 30/11.
(47) Ferme du 9-12-1784, du Grand moulin de la Bourolière, notaires de Saint-Fulgent, Bellet : 3 E 30/128.
(48) 150 J/G 44, déclaration roturière de 27 teneurs du Coin et Peux au sgr de Languiller du 1-3-1701.
(49) 150 J/G 44, déclaration roturière du 19-3-1740 d’A. Laheu sr du Coin, au sgr de Languiller, pour divers domaines et droits au Coin et au Peux à cause du fief du Coin.
(50) Idem (34). Et déguerpissement de C. Bousseau au profit de G. Assailly du 27-12-1749, Archives de Vendée, notaires de Montaigu, étude B, Philippe Goupilleau : 3 E/27 235-1, vues 92 et s.
(51) A. de Guerry, MM. De Royrand, Archives de Vendée, Revue du Bas-Poitou (1961-2) vue 24/57.
(52) Notes no 34 sur le Coin à Saint-André-Goule-d’Oie, Archives d’Amblard de Guerry : S-A 1.
(53) 150 J/G 38, déclaration roturière de Renée Canteteau à Royrand pour biens aux tènements du Coin et du Peux du 28-7-1777.
(54) Notes no 36 sur le Coin à Saint-André-Goule-d’Oie, Archives d’Amblard de Guerry : S-A 1.
(55) Partage du 18-10-1779 de la succession de René de Montaudouin seigneur de la Rabatelière, pages 34 et 43, Archives de Vendée, chartrier de la Rabatelière : 150 J/C 68. 
(56) Archives de la Vendée, domaines nationaux : 1 Q 342, no 117, partage Montaudouin et République du 3 pluviôse an 5 (22-1-1797).
(57) Livre des comptes de la Rabatelière (1755-1767) et titres de propriété, Archives de Vendée, chartrier de la Rabatelière : 150 J/K 6, page 31.
(58) Livre des recettes et dépenses 1787-1789, Archives de Vendée, chartrier de la Rabatelière : 150 J/I 55, page 15.
(59) Idem (48).
(60) Archives de Vendée, vente de biens nationaux : 1 Q 258 no 852, vente de la métairie du Coin à Saint-André-Goule-d’Oie.
(61) Archives de Vendée, vente de biens nationaux : 1 Q 258 no 853, vente de la borderie du Peux à Saint-André-Goule-d’Oie.
(62) Archives historiques du diocèse de Luçon, Saint-André-Goule-d’Oie sous l’Ancien Régime : AAP, contrat de mariage du 17 juin 1796 de Jean Bretaud avec Perrine Borleteau.
(63) Archives de Vendée, notaires de Chavagnes, Bouron : 3 E 31/18, reconnaissance du 26-5-1798 d’une rente à Clément Grolleau par les teneurs du Peux.
(64) ferme de la borderie du Coin de Gréau à Puaud du 11-10-1775, notaire de Saint-Fulgent, Frappier : 3 E 30/8.

Emmanuel François, tous droits réservés
Novembre 2011, complété en février 2023

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Isaure Chassériau

Charlotte Berthe Isaure Chassériau est la fille, née en 1820, d’Adolphe Chassériau et d’Emma Pineu Duval. Les métayers de Linières ne l’ont pas vraiment connue. Elle est morte, à l’âge de 34 ans, avant sa mère et c’est son fils, Marcel de Brayer qui a hérité directement de sa grand-mère du domaine de Linières. À priori, sa postérité se résume essentiellement à son portrait peint par son oncle Amaury-Duval, qui valut à l’artiste une médaille de première classe au salon de 1839. Il est exposé maintenant au musée des Beaux-arts de Rennes. À sa mort, elle laissa un fils unique, Marcel de Brayer, qui fut maire de Saint-André-Goule-d’Oie, reconstruisit un nouveau château à Linières et publia un livre de poésies, tout à fait intéressant, quelques jours avant sa mort, à l’âge de 33 ans.

Une petite enfance au milieu des difficultés


Jean Auguste Barre : Guyet-Desfontaines 
(musée de la monnaie)
Isaure Chassériau a fait partie d’une famille très riche de talents, de sentiments et d’argent, constituée par sa mère, le deuxième mari de celle-ci, Marcellin Guyet-Desfontaines, son oncle Amaury-Duval, et son fils Marcel. Avec eux, l’histoire des propriétaires de Linières de 1830 à 1885 est totalement parisienne au début, pour devenir de plus en plus vendéenne à la fin de la période, avec les parisiens de Vendée que furent Marcel de Brayer et Amaury-Duval. Dans cette brillante famille, quelle fut la place d’Isaure Chassériau ?

Sa mère était la fille d’Amaury Pineu Duval, breton d’origine, qui débuta comme avocat à Rennes, commença une carrière de diplomate avant la Révolution, puis bifurqua vers le ministère de l’Instruction publique pour devenir ensuite directeur des Beaux-arts au ministère de l’Intérieur. Sympathisant de la Révolution, fidèle de Napoléon, il fut mis en retraite par la Restauration monarchique. Hommes de lettres, il fut secrétaire de l’académie des Inscriptions et belles lettres et rédigea de nombreux articles, notamment à la Décade Philosophique. Son frère, Alexandre Duval, fut un dramaturge à la mode, ce qui lui valut d’être élu à l’Académie Française. Un autre frère travailla comme lui dans l’administration des Beaux-arts et publia un livre d’Histoire. Amaury Duval se maria avec Jacqueline Rose Tardy, originaire de l’Allier. Elle fréquenta le salon littéraire de son amie Sophie Gay (1). Élève du peintre Girodet, elle s’adonna à la peinture, puis l’abandonna pour élever ses deux enfants. Emma naquit en 1799 et Amaury en 1808. Jacqueline Duval est morte le 29 octobre 1823, à l’âge de 49 ans.

Emma Duval épousa à l’âge de 18 ans Adolphe Chassériau. Il venait de démissionner de l’armée et se lançait dans l’édition. Il n’a pas connu sa mère, tuée dans les combats de la Révolution à Lyon, ni son père, exilé en Angleterre à cause de ses opinions royalistes. Trois ans après leur mariage, Emma mit au monde leur fille Isaure. Les affaires d’édition du mari tournèrent à la faillite et il se trouva avec des dettes impossibles à rembourser. Pour se refaire, il quitta sa femme et sa fille et partit en Amérique du sud. C’est alors qu’en 1824, quelques mois après le décès de sa mère, Emma, dépourvue de ressources, retourna avec sa fille habiter chez son père, au 15 quai Conti, un logement de fonction de l’Académie.

Isaure fut donc abandonnée par son père à l’âge de quatre ans. Certes, on a dû lui présenter sa fuite en Amérique de manière intelligente, quand on connaît sa mère. Mais en ce domaine, qui peut savoir ce qu’elle a ressenti et les explications qu’elle s’est données ? De toute façon, cette absence n’a pu que la marquer, sans doute profondément.

Chez son grand-père elle fit la connaissance de son oncle Amaury, âgé alors de seize ans. L’affection qui l’a lia avec lui a dû compter dans la formation de sa personnalité. Sa mère débordait d’amour, mais son caractère entier n’a pas dû être toujours facile pour elle. Le jeune homme, la grande sœur et la petite fille ont noué des liens que la mort seule brisera, nous le verrons plus loin.

Jean Auguste Barre : A. Dumas 
(musée de la monnaie)
Pour vivre, Emma Chassériau donna des leçons de chant et des cours de piano, et vendit des sacs de fantaisie qu’elle confectionnait elle-même. Malgré cette peine, toujours pleine d’énergie, elle était prête à courir au théâtre le soir, pour peu qu’un ami lui envoie des billets. Sinon elle passait la soirée à la maison où des amis venaient la voir. Emma Chassériau organisa des réunions chez son père, aidée par les Nodier (2), et où elle fit ses « mardis ». L’on y chantait et dansait et l’on recevait des artistes amis : Delphine Gay, la fille de Sophie, future Mme de Girardin (3), Alexandre Dumas (4), Delacroix (5), Ziégler (6), Brizeux (7), les Jal (8), etc.

Comme pour sa mère, les Guyet de Vendée firent partie de La nouvelle famille d'Isaure, celle de son beau-père Guyet-Desfontaines. Ainsi on la voit assister à Saint-Fulgent au mariage, en compagnie de sa mère Emma Guyet, le 14 octobre 1833 (vue no 240), de Narcisse Hyacinthe Legras de Grandcourt avec Agathe Élise Émilie Martineau. Et elle a signé au-dessous de la signature de sa mère. 

Mais le destin de sa mère prit un tour inattendu après la mort de son mari en Amérique en 1828. Veuve, les prétendants ne manquèrent pas. L’heureux élu fut le jeune Marcellin Guyet-Desfontaines, fils unique de Joseph Guyet et de Félicité du Vigier, héritier de Linières et autres biens, un amour et une fortune.

Une enfance choyée


Isaure avait onze ans quand elle vint vivre chez son beau-père. La veille du remariage de sa mère, un conseil de famille nomma le nouveau mari comme son cotuteur. Il était alors notaire d'une étude parisienne importante. Bientôt la petite famille déménagea dans le magnifique hôtel particulier du 36 rue d’Anjou St Honoré, avec ses salons dorés. Sa mère réussit à faire revenir son frère habiter chez elle, lui donnant une chambre et lui offrant un espace pour servir d’atelier. Fait nouveau : le jeune homme, la grande sœur et la petite fille ont agrandi leur cercle à Marcellin. Ce dernier ira se faire élire député aux Herbiers en Vendée, vivant de ses rentes, après avoir vendu son étude de notaire. C’est lui le « Vendéen », qui se rend de temps en temps au pays de ses parents. Pour lui Linières c’est sa mère, et Saint-Fulgent c’est son père. Pour s’y rendre dans les années 1830/1840, il faut de quatre à cinq jours avec le service des diligences. Les autres membres de la famille restent des parisiens à part entière.

Isaure fut choyée par son beau-père, mais, au-delà des apparences matérielles, nous ne savons pas comment. On devine néanmoins dans les correspondances, un vrai attachement du beau-père envers sa fille adoptive. D’autant qu’il ne put pas avoir d’enfant lui-même.

Si avant l’ouverture de la cotutelle de M. Guyet-Desfontaines, Melle Chassériau n’avait aucune fortune personnelle, il en fut de même après, n’ayant reçu ni donation, ni d’autres successions. La même année 1831 du remariage de sa mère, son beau-père notaire se préoccupa de l’héritage du grand-père d’Isaure, Jean Mathurin Chassériau (1755-1731). Mais Mme Emma Duval, par délibération du conseil de famille de sa fille, renonça pour cette dernière, purement et simplement à cette succession. L’inventaire des biens avait constaté un actif très faible et un passif considérable.

Nous savons qu’Isaure a appris le dessin avec Oscar Gué (9), un peintre qui fréquentait le salon de sa mère, et alors que son oncle est en Italie. Elle indique dans une lettre à Amaury-Duval qu’elle est une « latiniste fort distinguée » et « joue même des contredanses à quatre et deux mains ». Plus loin elle lui décrit une réception chez le roi : « Tu ne peux pas te faire à l’idée de ce qu’est un bal d’enfants chez le roi, je me suis amusée tant qu’au moment de souper je n’avais plus faim du tout…Maman était éblouissante de beauté, elle était couverte de diamants…la reine était en train de saluer de vieilles dames lorsqu’elle s’est retournée et m’a parlé en me demandant si j’avais dansé. » (10)
Dix-huit ans, c’est l’âge où elle perdit son grand-père, Amaury Duval, en 1838. Sa fille l’avait accueilli chez elle dans les dernières années de sa vie, et son nouveau gendre l’avait financièrement aidé.

Son portait à 18 ans


Dix-huit ans, c’est aussi l’âge de son portait par son oncle, accessible très facilement sur internet. L’artiste aime et admire son modèle, c’est la relation de la petite fille et du jeune frère d’Emma Guyet, l’oncle et la nièce. Dans un décor simple, et avec un bijou discret autour du cou, il choisit d’attirer le regard du spectateur sur la tête d’Isaure, car il la voit belle, avec son visage légèrement ovale, ses yeux expressifs, ses lèvres charmantes (le mot revient souvent sous la plume du peintre).

Amaury-Duval : Isaure Chassériau
(musée des Beaux-arts de Rennes)
Il la veut coquette dans cette robe magnifique, avec les bouquets accrochés aux cheveux et devant la poitrine. Elle a les cheveux noirs qui suggèrent les origines créoles de la famille de son père. Ses traits font penser à ceux de sa mère Emma et de son grand-père Amaury Duval, manquant de finesse. Passons sur la mode dépassée de la coiffure, sur les épaules tombantes et la pose embarrassée avec les mains sur le devant. Nous la voyons triste et compassée. Et n’en déplaise à son oncle, elle fait plutôt penser à la femme de chambre qui aurait mis la robe de bal de sa maîtresse pour se déguiser.

« Aimable et bonne » a dit d’elle une parente (11), mais peu douée pour le bonheur. La même parente qui écrivait à Emma Guyet en parlant d’Isaure : « Elle m’était toujours apparue affectueuse, mais triste et réservée. Elle semblait traverser ce monde sans y prendre racine. Elle avait sa patrie autre part. » Ce portrait et les rares écrits recueillis nous confirment que le caractère d’Isaure la portait à la solitude. Il l’exposait aux affections, mais aussi aux aspérités de son entourage avec une vive sensibilité, la rendant fragile. Elle semble porter en elle comme une attache invisible, qui l’empêcherait de prendre son envol et la garderait prisonnière dans quelque repli secret de son âme.

Mariage raté


Vingt et un ans, c’est aussi l’âge de se marier. Ses parents la dotèrent richement et elle convola avec un vicomte, comme on le faisait sous l’Ancien Régime ! L’union du titre et de l’argent, un terrain de rencontre entre les nobles et les bourgeois depuis longtemps. Sauf qu’ici on était entre parvenus.

Nous connaissons en effet l’origine de la fortune des Guyet pendant la Révolution. Le mari d’Isaure était le vicomte Alfred Oscar Hermann Brayer, le deuxième fils du second mariage du général Brayer, anobli par Napoléon. Pour faire plus « noble », on disait d’ailleurs : « de » Brayer et nous respecterons la volonté de la famille, malgré que, normalement, la particule ne soit pas ici justifiée. Disons tout de suite que l’information trouvée sur internet, que son mari était le général Amilcar de Brayer est fausse ; c’est son frère Alfred qu’elle épousa.

Général Michel de Brayer
Le père, Michel de Brayer, avait soutenu Napoléon y compris pendant les Cent jours du retour de l’Empereur en 1815. Après cela il s’était exilé en Amérique du Sud pour échapper à une condamnation à mort par le gouvernement du roi Louis XVIII. Il fut gracié ensuite et réhabilité par le nouveau régime de la Monarchie de Juillet à partir de 1830. Il fut nommé, en effet, pair de France et gouverneur de la région militaire de Strasbourg. Les orléanistes voulaient rallier à leur cause les anciens partisans de Napoléon, souvent pourchassés par les Bourbons et comme eux, se voulant les héritiers de la Révolution.

La mère d’Alfred, Marie Philippine de Sale, était baronne de Freyberg-Hopfereau. Née en Bavière, elle s’y était mariée avec le général Michel de Brayer en 1801. Le couple eut quatre enfants : Lucien, qui s’établira en Amérique du sud, Mathilde, qui deviendra la comtesse Marchand, Alfred né à Cologne en 1807 et Amilcar, le général, qui sera fait comte par Napoléon III.

Jeune, Alfred fut fort dissipé, contractant des dettes, dit-on, qui le contraignirent bientôt à s’éloigner de la capitale. Il se fit remarquer néanmoins dans les rangs de la garde nationale, où il fit carrière. Grâce à son père, il obtint un poste dans l’administration des Finances. Nous le trouvons percepteur à Parthenay (Deux-Sèvres) en 1841, au moment de son mariage avec Isaure Chassériau à Louveciennes (10).

La fortune d’Isaure consistait uniquement en des droits dans la succession d’une demoiselle Bertin (une tante de son père), et dans la valeur de la société commerciale qui avait existé entre son père et M. Devisme en Colombie. De sorte que M. et Mme Guyet-Desfontaines ne détenaient aucune somme envers la demoiselle Chassériau au moment de l’arrêté du compte de tutelle le 27 juillet 1841, à la veille de son mariage (12). Celle-ci adopta ce compte le 11 août 1841 par acte notarié, l’approuvant purement et simplement sans aucune réserve. En conséquence elle se désista de l’hypothèque légale prise à son profit contre M. Guyet-Desfontaines, et consentit à la radiation de la garantie qui avait été prise sur le château de Linières et ses deux métairies contiguës (13).

Le contrat de mariage, en date du 14 août 1841, a été signé suivant l’usage avec la mention de la présence des parents et amis du nouveau couple. Du côté du marié, on note sa sœur et son beau-frère Marchand, « ce dernier l’un des exécuteurs testamentaires de l’empereur Napoléon » est-il noté au lieu de dire qu’il était son dernier valet de chambre, les deux assertions étant vraies. Il y avait aussi leur fille, Marie Malvina, et le frère, militaire de carrière, le baron Amilcar de Brayer. Du côté de la mariée on fut plus nombreux. Il y avait d’abord, en dehors des parents, l’oncle maternel, Amaury-Duval. Puis Mme Alexandre Duval, tante maternelle, et des cousins : Charles Guyet, et Eugène Guyet, M. Clément, M. et Mme Victor Regnault, leur fille Melle Adèle Regnault, Mme Jenny Malvina Mazois, et enfin Mme Constance Grandcourt, une cousine éloignée par alliance dont les frères s’étaient installés à Saint-Fulgent. Et puis il y avait les amis proches : Mme Aspasie Le Porcher, épouse de M. Jal, et M. Antoine Anatole Jal leur fils ; M. et Mme Lafitte, M. Charles Séchan, M. Jules Dieterle, M. Barre père, graveur de la monnaie, M. et Mme Auguste Barre, M. Albert Barre, M. Asseline, secrétaire des commandements de la duchesse d’Orléans, M. Jadin, M. Delsarte et M. Repiquet.

Le 5 septembre suivant, les époux, accompagnés de leur notaire, se rendirent au château des Tuileries, pavillon de Marsan, où résidaient le duc et la duchesse d’Orléans. Ceux-ci ont « daigné apposer leur signature au présent acte, comme témoignage de l’agrément qu’ils ont donné au mariage de M. Alfred, Gaspard Herman vicomte de Brayer, avec Melle Charlotte Berthe Isaure Chassériau » (14). La formule imitait un usage d’Ancien Régime, réservé alors aux grands de la cour et aux pages au service du roi.

Mme Guyet-Desfontaines a constitué une dot à sa fille, et M. Guyet-Desfontaines s’est porté caution solidaire. Derrière cette présentation juridique officielle, c’est le beau-père qui a tout payé. L’apport du futur époux a consisté en son trousseau (bijoux, chevaux, voiture, armes, bibliothèques, tableaux, et argent comptant), d’une valeur de 12 000 F, provenant de ses économies et de la succession de ses père et mère. L’apport de la future épouse a d’abord consisté en son argent comptant, et objets personnels provenant de cadeaux de famille et de ses économies, pour une valeur de 3 500 F (effets mobiliers, bijoux, objets d’arts, livres français et étrangers et instruments de musique). Ensuite sa mère lui a constitué en dot un trousseau de 10 000 F de valeur, et un capital de 150 000 F. Il est prévu que M. de Brayer pourra employer cette dernière somme librement jusqu’à concurrence de 50 000 F, et notamment à former le cautionnement auquel il est assujetti en sa qualité de comptable du trésor public. Le solde, soit 100 000 F régi au régime dotal, devra être employé soit en acquisition d’immeubles, soit en achat de rentes sur le gouvernement français à inscrire au nom de la future épouse, ou d’actions de la Banque de France, le tout au choix des futurs époux. Les versements ont été effectués en six fois : deux en 1841 pour 60 000 F, trois en 1842 pour 40 000 F, et le dernier en mars 1844 pour 50 000 F.

À cette occasion les actes notariés qui en font état permettent de relever que les jeunes époux de Brayer ont quitté Parthenay pour s’installer au printemps 1842 aux Andelys (Eure). L’année d’après, les jeunes de Brayer viendront habiter Paris, où Alfred a été muté. Ils y habitaient au 33 rue de la Madeleine.

En 1842, naît à Louveciennes Marcel de Brayer le fils d’Isaure. Il a deux ans et demi quand sa grand-mère Emma rend visite à sa fille Isaure aux Andelys. Alfred de Brayer est alors receveur particulier des finances, c'est-à-dire effectuant les opérations de trésorerie dans un arrondissement pour le compte du trésorier-payeur général du département.

Emma écrit à son frère, alors en voyage en Italie : « Cependant malgré la neige, j’ai été aux Andelys. Il y avait 6 semaines que je n’avais vu mon enfant. J’ai trouvé Alfred assez changé et souffrant. Il avait de plus un clou au genou qui lui donnait de la fièvre. Mais à mon départ il était mieux. Isaure va bien, elle a repris. Quelle charmante femme ! Elle vit seule, ou à peu près, travaille, s’occupe toujours, et l’ennui ne la gagne pas. Son fils est là près d’elle à jouer, on ne peut avoir un plus doux intérieur. Marcel (qui s’appelle Farcel) est délicieux. Il parle depuis le matin jusqu’au soir, et très bien. Il ne grasseyera pas ! Ce sera un phénomène dans la famille ! Il a un camarade de cinq ans, une vraie victime. Je le couvre de baisers, de tendresse, mais le malheureux a la figure balafrée des égratignements de M. Farcel. Qui aime bien châtie bien, tel est l’axiome de tête. Il traite sa mère assez légèrement, mais l’adore. Quant à nous, nous en sommes fous. » Si dans cette lettre on voit le petit enfant faire la joie de sa grand-mère, on voit aussi Isaure à l’aise dans son intérieur, quoiqu’un peu seule.

Les emplois de la dot d’Isaure dans les premières années du mariage ne paraissent pas avoir soulevé de problèmes. Les époux ont fait le choix de placement en rentes sur la dette publique de l’État français à raison d’un intérêt de 5 %. Ainsi un capital de 100 000 F rapportait 4 000 F net de revenus par an (15). À la même époque une domestique gagnait environ 200 F par an, logée et nourrie (16).

Louise Swanton Belloc
Cependant le mariage ne fut pas heureux, Alfred étant indélicat pour son épouse. Ainsi, les habits de la riche demoiselle de vingt et un ans et ceux du beau vicomte de trente-quatre ans, au moment de leur mariage, ne cacheront pas longtemps, l’un à l’autre, leurs âmes si peu en correspondance. « Libre de choisir entre beaucoup de prétendants qu’attiraient une grosse dot », la jeune fille épousa pourtant « un beau vicomte à tête vide, à cœur nul, qui l’a humiliée et délaissée. » Ainsi s’exprime la cousine de son père, Louise Swanton Belloc dans son histoire de la famille Chassériau (17).
Dans ses lettres à son frère, Emma fait de courtes allusions sur son gendre :

« Cependant malgré la neige, j’ai été aux Andelys. Il y avait 6 semaines que je n’avais vu mon enfant. J’ai trouvé Alfred assez changé et souffrant… »
« Isaure te dit mille choses affectueuses. Marcel t’embrasse, c’est un amour décidément, Marcellin te serre la main, et mon gendre…un insuffisant… »

Nous n’en savons pas plus de sa part, mais on sent que ça ne va pas.  Au point qu’à la requête de Mme de Brayer, la première chambre du tribunal civil de la Seine prononça le 24 décembre 1851 un jugement de séparation de corps et de biens entre elle et son mari. Une commission judiciaire en date du 30 décembre 1851 constata ensuite l’ouverture de la liquidation des reprises de Mme de Brayer contre son mari. Le 15 janvier 1852, Mme de Brayer renonça devant le même tribunal, à la société d’acquêts constituée par son contrat de mariage. 

Alfred est alors sans emploi et couvert de dettes. Rappelons qu’à l’époque le divorce n’existait pas, mais la séparation de corps et de biens des époux pouvait être prononcée par un tribunal, aux tords de l’un des époux. Cela veut dire qu’Isaure était revenue vivre un peu avant chez ses parents avec son fils, ce dernier étant âgé alors de neuf ans. Triste de nature, elle n’a pas été heureuse dans le mariage, au point d’y mettre fin à une époque où la procédure était rare.

La carrière de fonctionnaire des impôts d’Alfred de Brayer n’a pas laissé de trace, à la différence de sa position au sein de la garde nationale parisienne. Il s’était comporté avec audace lors de l’émeute républicaine des 5 et 6 juin 1832, faisant suite à la sépulture du général Lamarque, qui avait dégénéré en émeute. Son père, général en poste à Strasbourg, le félicite : « J’apprends avec bien du plaisir que pendant les journées du 5 et 6 courant, tu as été chargé d’une mission importante, et que tu as été assez heureux de réussir. Non sans quelque danger puisque tu as perdu plusieurs de braves…reçois mes félicitations à cette occasion et n’oublie jamais qu’avec passion, l’audace est tout dans une entreprise de ce genre. Les rouges de Strasbourg ont aussi voulu se distinguer mais je suis intervenu… » En 1846 Alfred de Brayer est nommé capitaine et en 1849 il est chef d’escadron dans la garde nationale. À ce titre il est fait chevalier de la légion d’honneur le 6 juillet 1849. 

Une mort prématurée 


La santé d’Isaure était fragile. Un ami de la famille écrit en août 1853 : « Faites-moi l’amitié de m’écrire deux lignes pour me donner des nouvelles de la santé de Mme de Brayer ». À l’époque le secours de la médecine était bien faible et elle mourut rapidement. On devine le deuil pour Emma, Marcellin, Amaury, et le petit garçon, Marcel, premier drame dans le noyau familial. Isaure est morte au mois de mai 1854. La cousine de son père, Louise Swanton Belloc, écrit quelques mois après à Emma Guyet des phrases touchantes et intelligentes :

« Non certes, chère amie, je ne vous ai pas accusée d’inaptitude ou de négligence. Votre silence m’affligeait comme preuve de la douleur qui vous absorbait, et à laquelle je n’osais m’imposer, malgré mon désir d’aller savoir de vos nouvelles. Hélas !
Chère amie, qui peut avancer dans la vie, sans avoir de ces déchirements qui laissent d’incurables plaies ? Le cher et doux ange, que vous pleurez, a aujourd’hui la meilleure part. Elle habite un monde meilleur et plus beau, et Dieu, en la reprenant si jeune, lui a sans doute épargné d’autres rudes épreuves. Elle était trop pure et trop bonne pour n’avoir pas à souffrir beaucoup ici-bas. Dites-vous, chère amie, qu’en la retirant dans son sein, Dieu a plus fait pour elle que tout ce qu’eut pu et voulu faire votre sollicitation maternelle.
Je sens bien tout ce que cette absence laisse de vide dans votre pauvre cœur désolé, et combien la …et difficile sous l’atteinte de pareils coups. Mais elle a dû compter sur vous, sur votre courage pour la remplacer auprès de son fils, de ce cher petit Marcel, qui s’annonçait si aimable et si intelligent. Cet enfant, c’est encore elle, et si, comme je le crois fermement, nos chers absents pénètrent dans nos plus secrètes pensées, et peuvent encore, quoique invisibles, assister aux actes de notre vie, combien ne vous sait-elle pas gré de tout ce que vous faites pour cet enfant ! Que cette conviction vous soutienne, chère amie, et vous donne de force. Je voudrais que votre douce et chère fille fût présente et vivante dans vos souvenirs et dans ceux de tous vos amis, comme un bon ange gardien qui tempère et adoucit l’amertume de nos esprits. Pour moi, je ne me la rappelle pas, sans un profond attendrissement. Elle m’était toujours apparue affectueuse, mais triste et réservée. Elle semblait traverser ce monde sans y prendre racine. Elle avait sa patrie autre part…
Voilà la vie, telle que la révolution, les soucis, les chagrins, nous l’ont faite. Encore faut-il porter vaillamment son fardeau jusqu’au bout.
Le jour où vous voudrez me voir, envoyez-moi un mot, et j’irai vous trouver, à Marly ou ici. Mais ne le faites que lorsque vous attendrez de ma visite un peu d’obligeance. Vous savez si je serais heureuse de pouvoir vous faire un peu de bien. Mais hélas ! Il ne suffit pas de vouloir.
Adieu, chère amie, croyez comme toujours à ma vieille et sincère affection.
Louise Sw Belloc » (18)

La succession d’Isaure


Signe révélateur, Isaure Chassériau avait rédigé un testament le 15 février 1852. Elle lègue « à ma bonne mère pour le cas où elle me survivrait tout ce dont la loi me permet de disposer en sa faveur » (19). Au moment de son décès à Paris le 14 mai 1854, elle demeurait à Paris rue Duphot, no 25.

Pour s’occuper de la succession de sa fille et de la tutelle de son petit-fils Marcel de Brayer, Mme Guyet-Desfontaines fit une procuration à son mari le 26 mai 1854 (20). Ceux-ci demeuraient alors à Paris rue Duphot no 25, ainsi qu’à Marly le Roi. M. Guyet-Desfontaines fut élu comme subrogé tuteur du mineur de Brayer, suivant la délibération du conseil de famille tenu sous la présidence du juge de paix du 1e arrondissement de Paris, le 27 mai 1854.

Il fut présent à ce titre et à celui de mandataire de sa femme, légataire universelle de Mme de Brayer, à l’inventaire après le décès de celle-ci, le 29 mai 1854. Y assistait aussi Alfred de Brayer, comme tuteur naturel et légal de son fils mineur (21).

Maison de campagne à Marly-le-Roi
des Guyet-Desfontaines
L’inventaire fut commencé dans une dépendance de l’appartement occupé par M. et Mme Guyet-Desfontaines située au 1e étage au-dessus de l’entresol de la maison louée rue Duphot. Elle avait fait son domicile et habitait chez sa mère, à Paris et à Marly, depuis la séparation prononcée entre elle et son mari. Les meubles étaient la propriété de M. et Mme Guyet-Desfontaines. L’ensemble des autres objets mobiliers trouvés dans l’appartement de ses parents se monta à 2 326 F, dont 1 264 F de bijoux (on note une montre en or numérotée de la maison Oudais à Paris). Le 6 juin 1854, l’inventaire se poursuivit en la maison de campagne de M. et Mme Guyet-Desfontaines située à Marly le Roi. Mme de Brayer y occupait un pavillon dans le parc, comprenant un petit salon, une chambre à coucher avec une pièce à la sortie, une salle à manger, un cabinet de toilette et une chambre de domestique. Sauf exception, le mobilier lui appartenait. S’y trouvaient beaucoup de linge, habits, effets personnels, vaisselle, argenterie, bibliothèque. Le tout se montant à une valeur estimée à 1 935 F. Enfin on inventoria des objets à Paris entreposés dans un local rue du Faubourg Poissonnière no 11 occupé par M. et Mme Guyet-Desfontaines : quelques meubles et de la vaisselle fine pour un montant de 185 F. L’estimation des objets mobiliers s’élevaient donc à un total de 4 446 F.

À l’examen des papiers appartenant à la défunte, on constata qu’une somme de 15 268 F n’avait pas été employée conformément aux prescriptions du contrat de mariage. À laquelle il fallait ajouter une somme de 36 032 F, également non employée suivant le régime de la dot, et provenant d’un remboursement de caution de comptable de M. de Brayer, et qui avait servi à acquitter des engagements personnels de ce dernier.

Après le jugement de séparation de corps et de biens du 24 décembre 1851, Mme de Brayer réclamait un montant de 113 000 F à son mari, que celui-ci avait reconnu dans un procès-verbal du 10 février 1852. En plus M. de Brayer était débiteur auprès de 3 créanciers d’une somme totale de 52 000 F. Mme de Brayer avait accepté qu’une partie des sommes à elle dues restent placées au profit de son mari, pour permettre à ce dernier de désintéresser ses autres débiteurs. Au jour de l’inventaire en 1854, seuls 8 000 F sur les 52 000 F avaient été remboursés.

Néanmoins Mme de Brayer était rentrée en possession d’une somme de 48 700 F qu’elle avait placé en rente sur l’État et qui lui rapportait 2 000 F par an, pour laquelle elle avait payé le prix de 45 949,35 F. À cette occasion elle s’était adressée à un cousin agent de change, Eugène Guyet.

On relève dans le passif de la succession de Mme de Brayer une somme importante de 4 212,50 F pour frais de dernière maladie, payés par M. Guyet-Desfontaines à divers médecins et pharmaciens, à Paris, Saint-Germain et Dieppe.

Comme légataire universelle, sa mère recueilli sa succession, c’est-à-dire ses créances sur son mari. Elle recueilli aussi son fils. Entre le père du petit Marcel de Brayer et ses grands-parents, les problèmes financiers étaient donc importants.

Pour terminer, nous citerons cette phrase de son fils relevée dans son journal de voyage en Italie un an avant sa propre mort, en 1873. Il s’apprête à voyager seul en Italie et cherche dans cette solitude un renouveau personnel. « Si l’épreuve réussit, je suis sauvé, car j’aurais trouvé le vrai remède à cet ennui terrible qui m’enveloppe sans cesse dans un manteau de glace. » La tristesse en héritage.


(1) Sophie Gay (1776-1852), tint un salon littéraire, publia deux romans. Marraine d’Emma Duval.
(2) Jean-Charles-Emmanuel Nodier (1780-1844) est un écrivain et romancier à qui on attribue une grande importance dans la naissance du mouvement romantique en littérature.
(3) Émile de Girardin (1806-1881) est un journaliste et créateur de journaux influents.
(4) Alexandre Dumas père (1802-1870) fut un écrivain à succès de pièces de théâtre et de romans.
(5) Ferdinand-Victor-Eugène Delacroix (1798-1863) est un peintre majeur du romantisme.
(6) Jules-Claude Ziegler (1804-1856) peintre, céramiste et photographe. Élève d’Ingres lui aussi.
(7) Julien Auguste Brizeux (1803-1858) fut un poète breton à succès, défenseur de la langue bretonne.
(8) Auguste Jal (1795-1873) historiographe de la Marine et écrivain. Témoin à l’acte de naissance de Marcel de Brayer, et à la déclaration du décès de M. Guyet-Desfontaines à l’état-civil.
(9) Oscar Gué (1809-1877) peintre célèbre et ami du peintre Dauzats, autre habitué des Guyet.
(10) V. Noël Bouton Rollet, Amaury-Duval (1808-1885). L’homme et l’œuvre (2005-2006), thèse de doctorat en Sorbonne Paris IV, page 24.
(11) Louise Swanton Belloc, une cousine née Chassériau.
(12) Compte de tutelle et cotutelle du 27 juillet 1841 rendu par Mme Antigone Emma Pineu Duval et M. Guyet-Desfontaines, Archives nationales, notaires de Paris : MC/ET/XIV/791.
(13) Acte du 11 août 1741 d’approbation et d’arrêté de compte de tutelle d’Isaure Chassériau, Archives nationales, notaires de Paris : MC/ET/XIV/791.
(14) Signatures le 5-9-1841 du contrat de mariage par le duc et la duchesse d’Orléans, Archives nationales, notaires de Paris : MC/ET/XIV/791. Ferdinand Philippe d'Orléans (1810-1842) était le fils aîné du roi Louis-Philippe 1er, porté au pouvoir par Révolution de 1830.
(15) Déclarations d’emploi par M. et Mme de Brayer du 5-1-1841 de 10 000 F en rente de 428 F, et de 20 000 F en rente de 843 F, Archives nationales, notaires de Paris : MC/ET/XIV/791.
(16) Inventaire du 25 avril 1857 après le décès de Laure Longuemare, veuve Charles Louis Guyet, Archives nationales, études notariales de Paris : MC/ET/XIV/850.
(17) Note de Nathalie Chassériau, 2009.
(18)  Lettre de L. Belloc à Emma Guyet du 20-10-1854, Société Éduenne d’Autun, fonds Amaury Duval : K8 324.
(19) Testament du 15 février 1852 d’Isaure de Brayer, Archives nationales, notaires de Paris : MC/ET/XIV 839.
(20) Procuration du 26 mai 1854 de Mme Guyet-Desfontaines à son mari, Archives nationales, notaires de Paris : MC/ET/XIV 839.
(21) Inventaire du 29 mai 1854 après le décès de Mme de Brayer, Archives nationales, notaires de Paris : MC/ET/XIV 839.

Emmanuel François, tous droits réservés
Novembre 2011, complété en septembre 2017

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