mardi 1 décembre 2015

Les seigneurs de Saint-Fulgent contre les seigneurs de Languiller (1650-1719)

Les nouveaux seigneurs de Languiller au milieu du 17e siècle

Maximilien Eschallard vendit la baronnie de Belleville en 1647 pour 63 500 livres à Julien Aymon, seigneur des Forges-Petitières (Venanseau) et châtelain de Beaulieu (Beaulieu-sous-la-Roche) (1). Puis il vendit Languiller en 1650 à Pierre Le Geay, seigneur de la Getière (Saint-Georges-de-Montaigu). Ce dernier s’était marié la même année avec Elizabeth Davy. Il était aussi grand prévôt général du Poitou, office s’occupant de police à cette époque.

Pour chasser les pillards et les gens de guerre, des offices de prévôts provinciaux sont créés au début du 16e siècle par le roi. Ils font concurrence aux sénéchaux en place, rendant la justice à l'encontre des criminels pourchassés. Henri II les supprima pour cette raison, laissant subsister des prévôts généraux, attachés aux maréchaux et aux gouverneurs des provinces. Mais ses réformes furent appliquées différemment selon les provinces (2). Le Poitou eut son prévôt général, assisté d'archers, ses hommes de mains (3).

la Getière
Le château de Pierre Le Geay, situé au sud du bourg de Saint-Georges-de-Montaigu, est devenu à notre époque un restaurant, donc ouvert au public. On peut y découvrir avec intérêt les restes de la demeure seigneuriale des Le Geay. Un texte accroché aux murs du restaurant raconte l’histoire du grand-père, Pierre Le Geay, qui se rendit célèbre avec la capture du brigand Guillery en 1608. C’est pour cet exploit qu’Henri IV l’aurait anobli par lettre patente en juin 1609, signée à Fontainebleau (4). Il s’était marié avec Gabrielle Charretier. Son fils fut André Le Geay, seigneur de la Getière, la Cantardière (Moutiers-les-Mauxfaits) et l’Etablière (5).

Son petit-fils Pierre Le Geay reçut une déclaration roturière en 1653 de 12 propriétaires au tènement de la Boutinière. Elle énumère les domaines tenus et les droits perçus par le seigneur de Languiller, que nous connaissons, sans rappeler le droit de terrage dû au seigneur de Saint-Fulgent et à celui des Essarts. Et une main à ajouter au dos du document de sept pages, probablement Pierre Le Geay ou son fermier : « blâmable n’ayant pas déclaré (que) les terres étant sujettes à terrage. Savoir qui a amorti la terragerie ». Cette remarque en forme de question révèle l’ignorance de son auteur. Le terrage n’avait pas été amorti mais vendu, et la déclaration n’était donc pas blâmable.

De toute façon, Pierre Le Geay revendit Languiller en 1666 à René Langlois, seigneur de la Verrie, qui avait épousé Catherine Le Gras, fille du seigneur de Linières. Mais la vente fut annulée en 1670. C’est alors que les héritiers de Pierre Le Geay vendirent à nouveau Languiller, et ses fiefs annexes à Philippe Chitton en deux étapes en 1671 et 1674 (Voir notre article publié en juin 2015 : La saisie féodale de la Mancellière à St André Goule d’Oie). Le nouveau propriétaire est connu pour être un « accrocheur », et grâce à lui la querelle entre les seigneurs de Languiller et de Saint-Fulgent pouvait resurgir, au sujet des tènements de Saint-André-Goule-d’Oie.

Les nouveaux seigneurs de Saint -Fulgent au 17e siècle


Mais qu’était devenu le seigneur de Saint-Fulgent, Jacques Bertrand, que nous avons laissé en 1618 ? Il s’était marié le 14 septembre 1613 avec Jeanne Durcot. Elle était la fille du très engagé dans les rangs protestant du seigneur de la Grève (Saint-Martin-des-Noyers), Pierre Durcot. Jacques Bertrand et Jeanne Durcot étaient de fervents protestants. Ainsi Jeanne Durcot légua-t-elle à l’église réformée de Saint-Fulgent 50 livres de rente perpétuelle et une somme de 300 livres au ministre du lieu (nom donné chez les protestants à la personne chargée de conduire le culte). On sait qu’un temple existait, qui fut démoli plus tard. Comme du reste, le château de Jacques Bertrand à Saint-Fulgentqui fut remplacé par un nouveau château avant la Révolution à l’initiative d’Agnan Fortin .

Bourg de Saint-Denis-la-Chevasse
Jacques Bertrand est mort à Saint-Denis-la-Chevasse le 8 septembre 1626 dans la religion protestante. En tant que seigneur du lieu il avait droit d’être enterré dans l’église paroissiale, mais un édit royal avait interdit l’inhumation des protestants dans une église catholique. Ils devaient l’être dans un cimetière protestant, ou à défaut dans un cimetière catholique. Le curé du lieu refusa l’inhumation dans son église, et devant l’insistance de la veuve, fit appel à l’évêque. Celui-ci se déplaça à Saint-Denis-la-Chevasse où il reçut des menaces d’une troupe de soldats conduits par des gentilshommes protestants. L’inhumation eut lieu quand même le 15 octobre 1626, avec un renfort de protestants en armes commandés par Durcot de la Roussière, baron de la Grève, beau-frère du défunt. Le curé et les habitants catholiques portèrent plainte, et le parlement de Paris décida de l’exhumation du corps, une église ne pouvant être « polluée par la sépulture de ceux de la religion prétendument réformée », en contravention avec un édit du roi. Le corps fut porté au cimetière voisin catholique, parce qu’il n’y avait pas de cimetière protestant. Il ne faudrait pas voir dans l’insistance du baron de la Grève à défendre l’inhumation dans l’église de Jacques Bertrand qu’un attachement à un privilège de noble. L’époque, catholiques et protestants confondus, attachait beaucoup d’importance à être enterré auprès de ses ancêtres (6). La violence de l’épisode ne se comprend pas entièrement sans cela.  

Leur fils René Bertrand se maria en 1640 avec Suzanne Boussiron, et décéda peu après, laissant un fils unique René IIe du nom. Or la succession de Jacques Moreau, un bourgeois demeurant dans le bourg de Saint-André-Goule-d’Oie, devait de l’argent au seigneur de Saint-Fulgent. Pierre Moreau, frère du précédent et prieur-curé de Saint-André, fut nommé tuteur et curateur aux personnes et aux biens des enfants de Jacques Moreau. Et à ce titre il passa un acte avec le tuteur et curateur du fils de défunt René Bertrand seigneur de Saint-Fulgent le 12 septembre 1650 : Abraham Tinguy, chevalier seigneur de Nesmy (7). Plus tard ce dernier fut remplacé par un parent de l’orphelin pour rendre l’aveu de Saint-Fulgent, Paul Bertrand, seigneur de la Merandière. René Bertrand et Abraham de Tinguy étaient cousins. La mère d’Abraham de Tinguy (Anne Bertrand) était sœur du père (Jacques Bertrand) de René Ier Bertrand.

Abraham Tinguy est mort en 1681. Il avait épousé en 1646 Suzanne Bodin et se remaria avec Marie Bejarry. Son frère Florimond, seigneur de Vanzay épousa Élisabeth Boucquet, laquelle se remaria avec Antoine de Ranques, seigneur de la Clavelière. Le fils de Florimond Tinguy, Abraham Théophile, acheta la Sauvagère en 1680. Et deux des fils d’Abraham Théophile furent l’auteur, l’un de la branche du Pouët (Charles Auguste), l’autre des branches de la Sauvagère et de la Giroulière (Jean Abraham, mari de Perrine Bruneau). Ce dernier, qui a longtemps vécu au Coudray et à la Chevaleraye, était donc le petit-neveu d’Abraham Tinguy cité ici.

Suzanne Boussiron vécut à Bray en 1647 (Saint-Macaire-du-Bois dans le Maine-et-Loire). On sait peu de choses sur elle et son mari, en partie à cause de leur religion. Ils sont presque absents du registre paroissial catholique de Saint-Fulgent ou d’ailleurs au 17e siècle. On sait que les protestants avaient leurs propres registres, mais qui n’eurent pas force légale et peu sont parvenus à la postérité. Et quand les persécutions contre les protestants reprirent au 17e siècle, ils durent faire des actes notariés à la place. On en voit ainsi quelques-uns à Vendrennes, pour enregistrer les décès, préalable à l’ouverture des successions.

L’activité des protestants à Saint-Fulgent fut dénoncée par le chanoine Ruchaud et député du clergé du diocèse de Luçon à l’assemblée générale du clergé de France dans son cahier des remontrances en date du 2 octobre 1660. On y lit notamment : « Au bourg de Saint-Fulgent il y un temple bâti depuis peu où le prêche se fait et se continue nonobstant les défenses du présidial de Poitiers, où tous les ministres sont reçus et il n’y a point de particulier, et les religionnaires ont des écoles publiques sans permission du roi et au préjudice des oppositions des gens du roi de Poitiers. » (8).

Suzanne Boussiron, dame de Saint-Fulgent, fut marraine au baptême de la fille de Jacques Thoumazeau, procureur fiscal de ce lieu, le 24 avril 1665. Elle était la fille de Jacques Boussiron et de Marie Bouhier, son père appartenant à une famille de protestants du Poitou. Il était lui-même le fils de René Boussiron, seigneur de Grand-Ry (Mouchamps), de Bray et de Pellouaille, et avait été élevé à la cour de Ferrare où on vit Calvin et Marot, et où son père avait été échanson (chez Renée de France, fille de Louis XII et d’Anne de Bretagne, épouse depuis 1528 d'Hercule d'Este, dont la dame d’honneur fut un temps Mme de Soubise néde Saubonne dame du Fresne). René Boussiron prit part, dans les rangs huguenots, aux guerres de religion, suivant notamment Philippe Eschallard dans sa campagne de 1580 (9), et dont la veuve acheta plus tard la seigneurie de Languiller. Revenue au Parc à Mouchamps vers 1536/1537, Mme de Soubise fit de Mouchamps un foyer de propagande protestante. Son fils, Jean l’Archevêque, et sa petite-fille, Catherine de Parthenay, continuèrent de soutenir la Réforme.

En 1654 les Assises de Languiller poursuivaient la dame de Saint-Fulgent pour faire sa déclaration des biens qu’elles possédaient dans la mouvance de la cour. Défendue par le sénéchal de Saint-Fulgent, Me Gilles Couppé sieur de la Rigournière, elle obtint un délai pour se présenter aux assises prochaines (10). 

Une autre façon d’être connu est de faire parler de soi, ce qui est d’autant plus facile que l’on est élevé dans l’échelle sociale. C’est comme cela qu’on trouve quelques informations sur les Bertrand de Saint-Fulgent, particulièrement René Bertrand 2e du nom.

Colbert de Croissy
Colbert de Croissy, frère du célèbre ministre, fut envoyé dans le Poitou comme intendant et commissaire du roi chargé d’inspecter les finances et la justice de la province, aussi d’inspecter l’organisation du clergé et de vérifier les titres de noblesse, puisque ceux-ci donnaient droit à l’exonération d’un impôt comme la taille. Dans son état sur les gentilshommes de la sénéchaussée de Fontenay, il écrivit un article spécial intitulé : « René Bertrand, seigneur de Saint-Fulgent et son descendant Gazeau » (11). S’agissant d’un protestant qu’il fallait pourchasser, certains historiens ont émis à juste titre des interrogations, voire des doutes, sur la véracité de ses informations, mais avec prudence, compte tenu de l’autorité du personnage et de ses moyens d’investigations.

Comme l’historien Dugast-Matifeux en 1858, nous citerons le même passage du rapport au roi écrit en 1664 : « Le sieur Bertrand de Saint-Fulgent, âgé de vingt-cinq ans ou environ, professe la religion prétendue réformée en apparence, mais, en effet, il ne connaît ni Dieu ni religion. Quand il est hors du vin, il paraît aucunement raisonnable ; mais il est presque toujours ivre et dans le vin. Il est capable de toutes sortes de violences, de cruautés et de vexations. Il en a tant commis et commet encore tous les jours dans sa terre de Saint-Fulgent et aux environs, que, à bon droit peut-on l'appeler le tyran et le fléau de ce pays-là. Il est toujours accompagné de bohémiens, à qui il donne retraite chez lui pour partager leur butin. Il a encore avec lui plusieurs sergents-faussaires, qui font tous les jours mille méchancetés et friponneries aux pauvres paysans, supposant de fausses dettes, de faux exploits et de fausses sentences, en vertu desquelles ils enlèvent de la maison de celui qu'ils veulent dépouiller tout ce qui leur plaît, sans que celui qui souffre puisse ou ose se plaindre. Enfin, c'est un homme contre lequel la province s'écrie si généralement et si unanimement, que nous nous sentons obligés, après avoir tiré un mémoire que nous avons de ses principaux crimes, de dire qu'il est de la bonté et de la justice que le roi doit à ses peuples, de les délivrer de ce fléau. La susdite terre de Saint-Fulgent est environ à trois lieues de Mauléon. Il ne jouit présentement que d'environ trois mille livres de rente, sa mère jouissant du surplus des biens de la maison. Il est parent du sieur marquis du Bordage. » Si l’auteur dit vrai, on plaint les habitants de la Boutinière, la Chevaleraye et la Javelière ! Quoiqu’il n’habitât pas ordinairement à Saint-Fulgent, heureusement.

Revenons aux faits le concernant paraissant incontestables. Orphelin de père, sa mère était aussi une calviniste convaincue, et son curateur pour le représenter légalement fut son oncle Paul Bertrand seigneur de la Merandière. C’est lui qui rendit la foi et hommage lige de la seigneurie de Saint-Fulgent à son suzerain de Montaigu pour le compte de son pupille.

Bataille de Mogersdorf (banlieue de Vienne) 
en 1664
René Bertrand fut envoyé en 1664 dans une expédition militaire en Hongrie pour combattre les turcs menaçant Vienne. Il rentra en janvier 1665 en France dans une armée victorieuse. Il y avait été envoyé après une condamnation pour des faits que nous ne connaissons pas, ayant été capturé par Colbert de Croissy dans son château de l’Airaudière au Poiroux. « C'était une belle occasion de se débarrasser d'un vaurien, au profit de la chrétienté menacée par les Musulmans », écrit l’intendant de Louis XIV. 

Il fut maintenu noble, avec les autres membres de sa famille, par sentence de l'intendant Barentin, le 24 septembre 1667. Le texte imprimé lui attribue le titre de baron, dont lui-même ne se réclame pas dans les papiers notariaux de Saint-Fulgent. En 1667, il épousa Marie Loiseau, dame du Grand-Coin dans le comté nantais, à Blain. Après son décès il se remaria avant 1680 avec Jeanne Renée Savary. Au total il eut 8 enfants. Dans une supplique de 1681 ou 1684, il raconte qu’il s’était converti au catholicisme deux ans auparavant avec quatre de ses enfants : Marie, Benjamin, Charles et René. Or, ayant quitté sa terre de Chastenay pour se rendre en Anjou au mois d’avril précédent, y laissant ses enfants pour s’occuper des récoltes, des parents ou des non convertis ont profité de son absence pour emmener en Angleterre (refuge important des protestants) ses quatre enfants nommés. Il a été mis au courant par une lettre reçue de sa fille Marie au mois de novembre suivant. La cour de Poitiers lui accorda un monitoire (injonction de témoigner avec peine ecclésiastique) en décembre 1681 (12). Ses autres enfants restés en France étaient : Madeleine Victoire, Julie, Jeanne-Renée, dame du Chastenay et Marie-Bénigne, dame de Grand-Ry.

Comme on vient de le voir il se converti au catholicisme quelques années avant de mourir, et avant la révocation en 1685 de l’édit de tolérance envers les protestants, dit édit de Nantes. Il mourut « sur la paroisse de Mouchamps, le 17 mars 1688, à peine âgé de cinquante ans, et cela aux bras d'un révérend père jésuite, nommé Desnoué, qui travaillait aux missions bottées du Bas-Poitou ». Cette expression de « missions bottées » est révélatrice des méthodes employées à cette époque pour « déradicaliser » les croyances protestantes, associant missionnaires et militaires.

Le dernier ministre de Saint-Fulgent s’appelait Moïse Betoule. Il y résidait encore en 1685 et ne se réfugia en Hollande qu’après la révocation de l’édit de Nantes cette année-là. Le registre des baptêmes des protestants qu’il tenait est conservé au greffe du tribunal de Napoléon-Vendée, a écrit un historien en 1859 (12). Le temple de Saint-Fulgent fut démoli, et même le cimetière protestant désaffecté.

Pendant ce temps à la Boutinière, ses propriétaires firent leurs déclarations roturières en 1664 à Pierre Le Geay à cause de la seigneurie des Bouchauds. Elles ne pouvaient pas porter à conflit avec le seigneur de Saint-Fulgent, ne comprenant pas le terrage qui lui étaient dû. On remarque un détail : la moitié du droit de rivage est désormais payée non plus au sieur de la Patissière mais à un de ses héritiers, le sieur de Landoullière. La déclaration de François Arnaudeau, habitant le bourg de Saint-Fulgent, concerne probablement sa métairie, mais le texte est presque illisible à cause de l’encre qui a trop pâli. Parmi les autres propriétaires on a Pierre Moreau, sieur du Coudray qui habitait dans le bourg de Saint-André-Goule-d’Oie, Nicolas Cougnon, habitant la Chevaleraye, et Pierre Brillouet (aîné), habitant la Bergeonnière. Les autres propriétaires habitent sur place au village de la Boutinière : Antoine Moreau, Pierre Brisseau, Jean You et André Roger.


René Bertrand s’affirme seigneur des fiefs de la Boutinière, Chevaleraye et Javelière


En 1671, René Bertrand, le seigneur de Saint-Fulgent, « vaurien » dénoncé par Colbert de Croissy, reprend avec éclat la querelle de la seigneurie de la Boutinière, Chevaleraye et Javelière. Et pour affirmer son droit, il fait organiser rien moins que des assises (tribunal), signe manifeste de son pouvoir seigneurial sur les terres en question. Il faut dire qu’à cette même date il n’y a plus de seigneur à Languiller. Ses possesseurs sont la fille de Pierre Le Geay, son petit-fils, apothicaire à Saumur, et deux petites filles dont l’une est mariée à un notaire de Poitiers. Ils cherchent un acquéreur, et peut-être sont-ils déjà en pourparlers avec Philippe Chitton, qui signera son premier achat avec une partie d’entre eux le 25 août 1671. Il le complétera par un deuxième achat avec le reste des héritiers en 1674.

Les assises se tinrent à la Chevaleraye, dans la maison d’un particulier, en trois sessions du 11 mars, 15 avril et 16 mai 1671 (13).

Maison de justice de la Rabatelière
À l’origine les assises étaient des assemblées tenues annuellement certains jours pour rendre publiquement la justice. Le droit d’assise des seigneurs et châtelains a été ensuite déterminé par les usages et la pratique des lieux, se tenant à des dates prédéterminées. On avertissait les propriétaires en faisant apposer dans les lieux publics des affiches, à Saint-André sous le ballet devant l’entrée de l’église paroissiale, mais aussi en les faisant annoncer au prône de la messe paroissiale par le curé, comme on le voit en 1713 aux Essarts (14).

En Poitou le droit d’assise était lié au droit de fief d’un seigneur, même bas-justicier, comme le moyen de faire prévaloir ses droits seigneuriaux. Ainsi on le rencontre dans les seigneuries de la Chapelle Begouin, Languiller, Saint-Fulgent et la Rabatelière. Il donnait le droit au seigneur de convoquer les teneurs de ses fiefs pour lui porter leurs déclarations roturières devant son tribunal. Aux Essarts, le fermier de la baronnie devait faire tenir des assises générales quatre fois par an, et dans son contrat il était prévu qu’il jouirait des revenus qui en proviendraient (15). En cas d’absence d’un déclarant, on lui donnait défaut en accordant au procureur fiscal le droit de l’assigner à comparaître à la prochaine tenue d’assise. La procédure était renouvelée en cas de récidive d’absence. La sanction finale pouvait être la saisie, non pas à cause de l’absence mais sur la non déclaration ou non-paiement des redevances. Ce droit ne se perdait pas si l’on n’en usait pas. La tenue avait lieu au manoir, mais pouvait se tenir chez un particulier comme ce fut le cas à la Chevaleraye.

L’assise concernait aussi les biens nobles. Ainsi, en 1607, le seigneur de Saint-Fulgent vint présenter à l’assise de Languiller son offre de foi et hommage. C’est qu’il rendait hommage à la seigneurie du Coin Foucaud dans le principe seulement, de qui il tenait ses droits. Sauf que celle-ci n’existait que « sur le papier » si l’on peut dire, n’ayant plus ni hôtel ou hébergement noble, ni officiers, ni registre d’assise. Ce sont les officiers de la seigneurie de Languiller qui recevaient les aveux et déclarations au château de Languiller pour la seigneurie du Coin Foucaud, celle-ci étant qualifiée pour cette raison de « fief annexe » de Languiller. Dans la réalité on rendait hommage à Languiller, « à cause de votre seigneurie du Coin Foucaud », suivant la formule habituelle. Et cette situation dura même après que Languiller fut achetée par le seigneur de la Rabatelière en 1745. Un temps, l’office de sénéchal de Languiller et celui de la Rabatelière fut occupé par le même homme. Mais s’agissant par exemple d’assigner des teneurs de la Bergeonnière en 1752 aux assises de Languiller, à cause de biens tenus du Coin Foucaud, il les convoqua dans le château de Languiller. Il ne pouvait pas les convoquer à l’assise de la Rabatelière en principe au regard des règles du droit féodal en vigueur. Dans ces deux châteaux les assises se tenaient dans une « salle basse », c’est-à-dire au rez de chaussée, l’adjectif n’ayant pas le même sens qu’aujourd’hui, par opposition à « chambre haute » désignant une salle à l’étage.

Ce qu’on appelle une tenue d’assise était donc une cour de justice seigneuriale. À la Chevaleraye, le juge était Simon Varenne sieur de Tardière, « sénéchal et seul juge civil et criminel de la châtellenie de Saint-Fulgent, fief de la Chevaleraye, Javelière et autres fiefs en dépendant ». Le procureur du seigneur était Jacques Thoumazeau, « procureur fiscal de la châtellenie de Saint-Fulgent et de cette cour ». Par convention judiciaire, ce dernier avait le statut de demandeur dans l’instance contre les propriétaires justiciables, qualifiés eux de défendeurs. Le sénéchal tranchait le différent. Le greffier était Louis Thomazeau. Le sergent (huissier) était Étienne Brisseau.

Ces assises nous paraissent relever du coup de force quand on lit la proclamation du procureur fiscal de Saint-Fulgent, théoriquement à l’initiative de cette assise, en fait au nom et sous les ordres du seigneur du lieu. Il indique que l’assise était « proclamée et signifiée, de tout temps tenue par le seigneur de Saint-Fulgent comme ayant le titre du seigneur de Languiller nous donnant le droit sur les tènements de la Chevaleraye, Javelière et Boutinière et y autres fiefs ». C’était mensonger. Selon lui, ayant fait ses « certes et obéissances » (reconnaissances et droits) au seigneur des Essarts, le seigneur de Saint-Fulgent peut tenir cette assise comme ses prédécesseurs l’avaient fait avant lui.

Sauf que « l’aplomb dépend du milieu où il se pose », suivant le mot de Flaubert dans son roman Madame Bovary. Et à la troisième journée de tenue des assises, à l’instigation de l’un des propriétaires à la Javelière, François Benoist, par ailleurs huissier demeurant à la Brossière, la baronne des Essarts fit notifier son opposition à la tenue de ces assises, par acte notarié daté du 16 mai 1671. Suzeraine des Bouchauds et du Coin Foucaud, en tant que seigneur haut-justicier, la baronne des Essarts était en plus le véritable possesseur de l’autorité de la haute justice seigneuriale dans le territoire de la paroisse de Saint-André-Goule-d’Oie soumis à sa juridiction. La cour de Saint-Fulgent manœuvra, car l’opposition faite par Masson, procureur fiscal des Essarts, avait eu lieu après la clôture de l’assise. Elle décida de passer outre à l’opposition.

la Chevaleraye
27 personnes défilèrent au total, ayant des biens à la Boutinière, Chevaleraye, Javelière, Roche, Suries et Bruères. 25 sont venues à la première journée du 11 mars, où une seule présenta une déclaration. Pour 21 d’entre elles la cour décida d’un délai pour la présenter à l’assise du mois prochain. Pour 4 d’entre elles, elle décida la saisie des biens. Mais elle ne pouvait pas la décider de son chef, le procureur fiscal devait pour cela entamer une autre procédure dans le cadre des règles de la coutume. Pour l’assise du 15 avril elle reçut 8 déclarations et renouvela 11 demandes de nouveaux délais, dont pour deux nouvelles personnes qui ne s’étaient pas présentées la fois précédente.

Certaines déclarations ont été présentées par un procureur (aujourd’hui on dirait avocat) nommé Blanchard, par ailleurs notaire de Saint-Fulgent. D’ailleurs les déclarations étaient rédigées par lui et son confrère Thoumazeau. Le compte rendu de ces assises n’indique pas les frais perçus par les officiers de la cour. Mais nous disposons d’un exemple rare d’une assise de Languiller en 1702, où on lit à la fin d’une déclaration que les frais de notaire pour établir la déclaration étaient de 37 sols 8 deniers, plus « 30 sols aux officiers de Languiller pour la présentation de ladite déclaration. » (16). Les montants étaient tarifés, et s’appliquaient donc aussi pour les assises de Saint-Fulgent.

À l’assise du 16 mai 1671, la cour reçut 7 autres déclarations. Au total, on dénombre 9 défauts de présentation de déclarations, soit un tiers, dont une opposition clairement exprimée de l’huissier François Benoist, visiblement prêt à affronter judiciairement les officiers du seigneur de Saint-Fulgent. Cette apparente mauvaise volonté doit peut-être aux circonstances. Mais il ne faudrait pas les exagérer. Comme l’on voit dans le registre des assises de la Rabatelière (années 1637 à 1651), certains venaient à ces assises en traînant les pieds. Les lods et ventes posaient problèmes régulièrement, et après la signature des contrats d’acquisition, d’échange ou d’arrentement, on oubliait parfois de les signaler au procureur fiscal de la seigneurie, pour éviter de lui payer les droits de mutation. Alors certaines sentences d’assise transpirent l’enquête inquisitoriale pour traquer les défauts « d’exhibition » (communication) des contrats. Le sénéchal demandait parfois de se « purger par serment » suivant les mœurs judiciaires de l’époque (17).

Les archives conservées nous donnent 10 déclarations fournies à ces assises pour la Javelière et 3 pour la Boutinière. Que remarque-t-on ?

Pour la Boutinière il s’agissait de déclarer le droit de terrage perçu à moitié par le seigneur de Saint-Fulgent, l’autre moitié allant au baron des Essarts. Mais ce qui est tout aussi important c’est que la déclaration est rendue à René Bertrand, chevalier seigneur de Saint-Fulgent, Chastenay, Bray, Grand-Ris, à cause de son fief de la Chevaleraye et qu’elle reconnaît son « droit de juridiction sur les dits domaines ». Le voilà donc seigneur de la Chevaleraye, mais aussi suivant les différentes déclarations pour la Javelière : « de la Chevaleraye Javelière et autres fiefs », ou « de la Chevaleraye Javelière Roche et Boutinière », ou « Chevaleraye, Javelière et aux terres et tènements en dépendants ». Le texte de ces déclarations n’est pas systématiquement le même, même si l’esprit reste. Ainsi trouve-t-on presque toujours cette formule supplémentaire : « avez basse juridiction pour tenir assise sur nous ou sur ceux qui tiendront nos dits domaines ». Une fois on a une précision supplémentaire et tout aussi contraire à la vérité : « et sur lesquels vous avez droit de prendre les lods et ventes ». En Poitou, le droit de fief et le droit de justice seigneuriale étaient intimement liés, on en a ici une parfaite illustration.

La riposte du nouveau seigneur de Languiller, Philippe Chitton


Miège : caricature
Au début des années 1680, avec l’arrivée de Philippe Chitton au logis de Languiller, la situation ne pouvait pas en rester là, et les relations durent certainement s’envenimer ; mais nous n’avons pas de document pour en témoigner. Il prit ses intérêts en mains avec détermination, comme nous le savons. Au Peux et au Coin, il fit battre en retraite, avec le tribunal de Fontenay, Laheu, qui avait les mêmes prétentions de seigneurie que le seigneur de Saint-Fulgent. À la Mancellière il assigna au tribunal de Poitiers le seigneur de la Rabatelière pour obliger à lui rendre la foi et hommage. A la Porcelière, la Bergeonnière, la Milonnière il assigna Pierre Moreau sieur du Coudray, pour communication de contrats d’acquisition, et plus tard il déclenchera un retrait féodal sur certains biens nobles acquis par ce dernier. On le verra aussi œuvrer de la même manière au Pin et à la Brossière. D’ailleurs dans sa propre famille, on avait toujours un procès en cours et la saisie judiciaire facile.

Il était le fils de Jacques Chitton et de Renée Metivier, mariés en 1631 et qui eurent cinq enfants. Jacques Chitton avait été échevin de la ville de Niort, emploi qui permettait d’accéder à la noblesse. Il fut maire de Niort aussi en 1642. Philippe Chiton, l’aîné de la fratrie, est né vers 1632 dans une famille de protestants, qui abjura ensuite. Il était écuyer et seigneur de Fontbrune. Il acheta la charge de grand prévôt général des généralités de Poitiers et de la Rochelle, que son prédécesseur de Languiller, Pierre Le Geay, avait possédée. De même en 1694 il était titulaire de l'emploi de capitaine au régiment de Bellegarde-Cavalerie. Il avait versé en deux fois au trésor royal, en 1667 et 1692, la somme de 3 500 livres pour jouir des privilèges de la noblesse. Le statut lui fut confirmé, ainsi qu’à son fils, le 5 août 1700 par Meaupou.

Logis de Languiller
À son titre de seigneur de Fontbrune, il ajouta celui de seigneur de Languiller, où il vint habiter, et se maria le 28 novembre 1665 avec une voisine de la petite seigneurie de la Vrignonnière (Essarts), Bénigne de la Bussière. Il fit construire en 1697 le logis de Languiller, ancêtre de celui que nous connaissons. Les couvertures étaient en ardoises, sauf un pavillon en tuiles plates. L’architecte n’était certainement pas un chauchéen, car le mur du côté de la rivière comportait seulement une clôture en lattes à son sommet pour protéger la charpente. Elle laissa passer la pluie et fut la cause d’une dégradation rapide du corps de bâtiment du château et de deux pavillons attenants. En 1763 on dut consolider les murs, réparer leurs « lisardures », changer la charpente qui menaçait de tomber, en refaire une plus légère, et remplacer les ardoises par des tuiles creuses (18)On peut voir quelques photos des lieux sur internet, exposées par les propriétaires anglais des chambres d’hôtes, de son potager et de sa piscine chauffée.

On se souvient qu’il fit déplacer la sépulture d’un seigneur de la Chapelle Begouin pour faire de la place à la dépouille de son épouse en 1698, qu’un procès s’en suivit, que son fils gagna en partie (voir notre article publié sur ce site en janvier 2014 : Les droits seigneuriaux sur les roturiers de la Chapelle Begouin à Chauché). Il fit pression aussi sur l’évêché de Luçon pour exercer à nouveau le droit, tombé en désuétude, des seigneurs de Languiller, de nommer le titulaire de la chapelle de Fondion à Saint-André (voir notre article publié sur ce site en novembre 2014 : La chapelle de Fondion à St André Goule d'Oie).

En 1698, il bénéficia d’un traitement de faveur dans un procès l’opposant au fermier de la baronnie des Essarts, Jean Masson, à cause de son emploi de grand prévôt général des généralités de Poitiers et de la Rochelle. La déclaration du roi du 6 mai 1692 confirmait en effet à perpétuité les officiers des maréchaussées du royaume dans leurs exemptions, privilèges et prérogatives. Parmi ces dernières il y avait le choix par Philippe Chitton d’être jugé au présidial de la Rochelle, le plus proche de son domicile, où il avait rang immédiatement après le doyen des conseillers (19).

Dans cet emploi de grand prévôt, sorte d’officier de gendarmerie ou commissaire de police, Philippe Chitton avait sous ses ordres ce qu’on appelait des archers, comme on le voit dans le registre des décès de Chauché à la date du 26 avril 1694 (vue 320), où on enterre François Chaillou, archer du grand prévôt. Et puis on a une lettre du 12 décembre 1686 de Labergeril à Philippe Chitton, adressée à « Languiller près Saint-Fulgent en Bas-Poitou », pour dénoncer deux déserteurs. Labergeril lui demande de les faire rechercher en même temps qu’il saisit le tribunal. L’un s’appelle Claude Guerin, dit Saint-Georges, âgé de 27 ans, qui a fui à Pouzauges. L’autre s’appelle André Bouacheau et se cache après son enrôlement de 5 ans dans l’armée le 7 janvier 1686 à l’Herbergement-Entier (près de la Rocheservière) (20).

Philippe Chitton obtint du tribunal de Fontenay-le-Comte des lettres de terrier, c'est-à-dire une décision judiciaire pour vérifier ses droits seigneuriaux, et lui donnant le droit de nommer à cet effet les notaires de Saint-Fulgent, Arnaudeau et Proust. Ces derniers étaient ce qu’on appelait alors des « commissaires à terrier ». On appelait terrier un recueil portant l'indication exacte des redevances dues par les tenanciers d'une seigneurie ; il était établi sous la forme d'un acte judiciaire. Moyennant quoi, les textes des déclarations roturières durent adopter la formulation prescrite par le tribunal et la coutume du Poitou. C’est ainsi que les déclarants indiquèrent leur profession et leur domicile, ainsi que l’origine de leurs propriétés, habitudes inconnues jusqu’ici avant lui à Languiller. Avec ces lettres de terrier il dû, pour le moins, agacer les habitants de Saint-André-Goule-d’Oie, y compris certains de mes ancêtres. Tous les propriétaires de la paroisse relevaient de lui à différents titres. Plus de trois siècles après, il nous faut constater avec objectivité que ses initiatives nous donnent une matière précieuse pour la recherche historique.

Une autre précision apportée dans les déclarations est sans conséquence, puisqu’elle ne fait que confirmer la pratique, c’est le rappel du droit de solidité : « faute de quoi avez droit de solidité », lit-on régulièrement. Ainsi appelait-on l’obligation où sont plusieurs débiteurs de payer un seul pour tous, la somme qu’ils doivent en commun. Or tous ces droits seigneuriaux que nous énumérons étaient tenus par la collectivité des propriétaires d’un tènement, ceux-ci obligés solidairement entre eux au paiement à l’égard du seigneur. Derrière ce droit on suppute une réalité parfois difficile, à cause de la parcellisation poussée des surfaces foncières. Par exemple, un propriétaire d’une parcelle de 600 m2 dans un tènement de 35 hectares, avait une contribution de 1,7 % dans le total des redevances du tènement. À la Chevaleraye, celles-ci se montaient à 100 livres par an, valeur de 1762, dont les deux tiers pour le seigneur de Saint-Fulgent. La part de notre petit propriétaire était donc de 1,7 livres ou 34 sols. Le gros propriétaire qu’était Abraham de Tinguy, devait environ 60 livres. Et c’est lui qui portait les 100 livres aux fermiers de la seigneurie de Languiller, de Saint-Fulgent, et autres créanciers, se retournant ensuite vers tous les autres propriétaires pour leur réclamer leurs quotes-parts. Des arpentements avaient été réalisés partout à Saint-André, semble-t-il, au 17e siècle, éliminant les possibles difficultés dans le calcul de la répartition. Dans les tènements à la propriété dispersée, ce qui était moins le cas à la Chevaleraye et à la Boutinière à cause de leurs métairies, la collecte des quotes-parts individuelles n’a pas dû être toujours facile.

Et la reconnaissance des droits du seigneur ne se limitait plus à la description des rentes, cens, dîmes, terrages et menus suffrages. Désormais le texte précisait à chaque fois que le seigneur de Languiller avait droit de prendre les lods et ventes, honneurs, amendes et offenses, exerçant la juridiction basse. Deux fois le rédacteur va trop loin en qualifiant le seigneur de Languiller de « chemier » dans son lien vassalique avec le seigneur baron des Essarts. On s’apercevra plus tard que l’erreur est volontaire et que le seigneur de Languiller voulait obtenir la reconnaissance de la qualification de chemier du fief des Bouchauds, contre l’usage qui la réservait au baron des Essarts. Décidément, les seigneurs ne manquaient pas d’objets de conflits à Saint-André, pour qui était susceptible, manipulateur et ambitieux.  

la Boutinière
En 1684 et 1685, hors les propriétaires des deux moulins, on trouve les propriétaires de la Boutinière, habitant sur place, dont la déclaration a été conservée jusqu’à nos jours : Antoine Mandin marchand, Pierre Chatry tisserand, François Herbreteau laboureur. Ceux qui n’habitent pas sur place sont : André Roger laboureur à la Milonnière, Pierre Fortier laboureur à Linières, et Prosper Moreau, étudiant à Poitiers ayant sa demeure familiale dans le bourg de Saint-André. Ce dernier se fait appeler : « noble Prosper Moreau seigneur du Coudray Loriau ». On connaît son envie d’ascension sociale, mais sa tentative, lui aussi, pour se faire reconnaître un statut de seigneur sur certains droits acquis par son père, tourna court en face de Philippe Chitton (voir notre article publié sur ce site en juin 2014 : Les Moreau de St André Goule d'Oie aux 17e et 18e siècles.

On trouve une déclaration de Nicolas Mandin, laboureur demeurant au bourg de Saint-André, pour ses biens sur le tènement des Bruères, où il doit une rente de 16 ras d’avoine avec les autres teneurs. 
 
Les déclarations concernant le tènement des Suries sont révélatrices de l’opération de vérification des droits du seigneur de Languiller. La rente de 20 boisseaux de seigle levée sur ces terres avait été vendue à un particulier, au 16e siècle probablement. En 1685 elle appartenait à Pierre Moreau, et le seigneur de Languiller ne prélevait plus rien. Mais il gardait la mouvance sur le fief, ce qui entraînait le paiement des lods et ventes en cas de vente ou succession des biens. Alors on a 8 déclarations roturières où sont décrits les domaines possédés par chacun, et le rappel de la vente de la rente : « … sur lequel vous était dû par moi et autres parts prenants [possesseurs] audit tènement, le nombre de 20 boisseaux de seigle mesure des Essarts, aliénés par vos prédécesseurs et seigneurs de Languiller, néanmoins à vous appartient les ventes, honneurs, amendes et offenses ainsi que seigneur moyen et bas-justicier … ». La dernière partie de la phrase justifie la déclaration, faite en exécution des lettres de terrier, est-il aussi rappelé dans le texte.

Les archives manquent dans la fin du 17e siècle pour apprécier l’énergie que dû mettre Philippe Chitton à défendre sa position, en face de l’ambitieux seigneur de Saint-Fulgent. Il a passé la main à son fils unique vers 1700, Charles Auguste Chitton, dans les actes officiels concernant la seigneurie de Languiller. Dans une lettre du 13 mai 1702 écrite de Paris il évoque sa santé : « Je tâche à rétablir un peu mes forces pour m’en retourner incessamment afin de reprendre ma santé ne jugeant pas la pouvoir rétablir ici » (21). De plus l’écriture trahit un léger tremblement. Et il est mort après 1712.

Les seigneurs de Saint-Fulgent affaiblis


Néanmoins, du côté du seigneur de Saint-Fulgent la situation avait évolué après la mort en 1688 de René Bertrand.

Il laissait des enfants mineurs, dont l’aînée qui deviendra dame de Saint-Fulgent, Madeleine Victoire. On ne sait pas ce qu’est devenue Julie, dame de la Roche. Jeanne Renée épousa Jean François Mauclerc, habitant Saint-Denis-la-Chevasse, et mourut sans postérité. Enfin Marie Bénigne, dame du Grand Ry et des Bouchaux, épousa en 1700 à Saint-Martin-Lars, Christophe Prevost, seigneur de la Boutetière, d’où est issue une nombreuse postérité (9).

Madeleine Victoire Bertrand reçut à la mort de son père, pour tuteur, Louis Pierre Gazeau de la Brandasnière, époux lui-même d'une Aspasie Bertrand, une cousine éloignée, dont le père avait été tuteur de René Bertrand, comme nous l'avons vu. Un fils de Louis Gazeau se maria vers 1693 avec sa pupille Madeleine Victoire Bertrand, fille aînée et principale héritière de son père.

Il s’appelait Pierre Louis Gazeau, appartenant à la branche de Ligneron et de la Couperie des Gazeau de la Brandasnière, qui s’était formée plus d’un siècle auparavant, se séparant de celle des seigneurs de la Boutarlière (Chauché), et de celle du Plessis et des Grandes Maisons.

Pierre Louis Gazeau, seigneur de Ligneron, se maria avec Magdeleine Victoire Bertrand à Saint-Jean-Baptiste de Montaigu le 22 février 1694 (vue 80 sur le registre paroissial accessible sur le site internet des Archives de la Vendée). Leurs deux premiers enfants furent baptisés à Saint-Jean-Baptiste de Montaigu, puis les quatre suivants dans la paroisse voisine de la Boissière-de-Montaigu. Enfin le dernier naquit en 1711 à Saint-Fulgent. Ces informations nous sont données par le logiciel de recherche « Noms de Vendée », à disposition du public sur le site internet des Archives de la Vendée. Elles indiquent les domiciles probables des parents, d’abord à la Boissière-de-Montaigu, puis à Saint-Fulgent.

La foi et hommage à Languiller de la dame de Saint-Fulgent en 1711


Cette année-là Madeleine Victoire Bertrand fit une offre de foi et hommage au seigneur de Languiller pour les terres de la Boutinière, tout à fait insolite, sauf pour nous qui suivons leur querelle depuis un siècle maintenant.

Elle était mariée sous le régime de la séparation de biens, et son contrat de mariage prévoyait la gestion de ses biens propres de son propre chef. C’était donc à elle de faire la foi et hommage, et la coutume du Poitou dispensait dans ce cas une femme de participer personnellement à la cérémonie enregistrée par un notaire. On voulait la dispenser de jurer fidélité à un homme qui n’était pas son mari, de le servir, et de lui donner le baiser de paix en usage. Un acte notarié sans cérémonie devait suffire, qui d’ailleurs était devenu de pratique courante et autorisée pour tous les hommages plains, ou simples. Mais Charles Auguste Chitton, qui avait succédé à son père Philippe Chitton, avait opéré des saisies sur la part des terrages à la Boutinière revenant au seigneur de Saint-Fulgent. Le texte ne donne pas la raison de cette saisie, mais on connaît le conflit que les générations de seigneurs se transmettaient avec constance sur la propriété de la mouvance à la Boutinière. Le conflit avait donc repris. Dans ce contexte, comment jurer fidélité à son seigneur tout en s’opposant à lui devant les tribunaux ?

Le compte rendu que fit le notaire Boisson de Vendrennes de cette journée du 13 avril 1711 nous donne la réponse (22). On dû se concerter avec les juristes locaux pour analyser la situation, et adopter une tactique appropriée. On adopta d’ailleurs la voie de la rigueur juridique. Quoi de plus tentant, quand on ne s’entend pas sur le droit, que de s’en faire une ligne de conduite avec ostentation ? Un aréopage de quatre personnes accompagna la dame de Saint-Fulgent dans l’après-midi de ce jour difficile pour elle. Outre son notaire, elle avait deux témoins. Le premier était maître Pierre Arnaudeau sieur de la Brunelière, ancien notaire et greffier de Saint-Fulgent, âgé alors de 72 ans. Le second était maître Augustin Thoumazeau sieur de Grandchamps, un notable habitant aussi le bourg de Saint-Fulgent, fils de Julien Thoumazeau et d’Hélène Benoist, et beau-frère du procureur fiscal du lieu, alors Adrien Rochelet. De plus, elle s’était fait assister par messire Gabriel Suzannet seigneur de la Chardière (Chavagnes), et « gentilhomme choisi par elle ».

Arrivée à la maison seigneuriale de Languiller, distante d’environ 7 kms de son château de Saint-Fulgent, Madeleine Bertrand a « offert par elle-même et en sa personne, et au cas de refus dudit seigneur de Languiller par moi notaire royal soussigné assisté de … témoins », de « faire la foi et hommage plain, baiser et serment de fidélité » au seigneur de Languiller à cause de sa seigneurie du Coin Foucaud pour raison de certains droits de fiefs, terrages et autres, au village et tènement de la Boutinière. Elle fait comme un homme, et elle continue comme cela se doit en une telle occasion, en offrant de payer les droits de rachats s’ils ne l’ont été, « si tant été qu’ils lui apparaissent véritables pour les dits fiefs ». Elle promet « de fournir son aveu et dénombrement des choses dudit hommage dans le temps de la coutume, offrant le baiser et serment de fidélité à son seigneur tel qu’elle le doit en pareil cas ». On ne pourra rien lui reprocher, elle fait tout ce qu’il faut faire en pareille évènement, mais assisté d’un authentique gentilhomme de Chavagnes-en-Paillers, heureusement garant de ses honnêtes intentions. Elle continue ensuite en demandant la main levée des saisies de ses droits, et la cessation des poursuites comme condition de son offre. Et elle demande que par la présente offre, elle « doit être regardée comme fidèle et véritable vassale aux offres ci-dessus expliquées ». On le voit, il s’agissait ainsi d’exécuter une formalité obligatoire sans rien céder sur le fond.

Logis de Languiller
Cet acte notarié est suivi d’un compte-rendu du notaire. Il indique que l’épouse du seigneur de Languiller s’est présentée, dame Louise Françoise de Châteauneuf, en l’absence de son mari. Elle a répondu : « que vu son absence, elle n’a rien à répondre au présent hommage, n’ayant de lui aucun ordre à cet égard ». Le compte rendu poursuit en indiquant que la dame de Saint-Fulgent « a persisté en son offre et hommage ci-dessus par elle fait ». Pour terminer, tout le monde signa et le notaire précisa qu’il délaissait « un autant (copie) des présentes aux mains de ladite dame de Châteauneuf ». Nous sommes près de penser que l’absence de Charles Auguste Chitton était volontaire. Il ne pouvait pas empêcher l’acte de se faire devant témoins, et ne pouvait pas non plus obliger son adversaire à commettre une faute, alors il a laissé la procédure se dérouler, quitte à guetter ensuite qu’aucune erreur n’avait été commise. On aimerait connaître la suite immédiate, mais la documentation manque.

Elle manque aussi sur les déclarations roturières. Nous n’en avons que deux pour la métairie de la Boutinière et une pour la métairie de la Chevaleraye faite au seigneur de Languiller. Pour la première, leur contenu est connu et sans changement : le seigneur de Languiller prend des rentes en blés (céréales) et en argent. Les seigneurs de Saint-Fulgent et des Essarts se partagent les terrages. La seule nouveauté par rapport à cent ans auparavant c’est la référence gardée par les notaires aux lettres de terrier pour faire la déclaration, comme on oublie de ranger un dossier, car elles ne semblaient plus utiles à cette date.

Les Bertrand vendent la seigneurie de Saint-Fulgent en 1720 


Le fils aîné de Madeleine Bertrand, Louis Gabriel Gazeau de la Brandasnière, atteignit sa majorité de 25 ans le 17 novembre 1719. Nous n’avons pas de document notarial où il apparaît, et nous ignorons jusqu’à quand sa mère resta dame de Saint-Fulgent, gérant la seigneurie. Toujours est-il que trois semaines avant son anniversaire pour sa majorité civile, le seigneur de Saint-Fulgent commis un acte pouvant conduire à une fin prématurée. Il assassina en effet le seigneur de la Brallière (Boulogne) au château de la Rabatelière, Charles Daniel de Montsorbier, de quatre coups d’épée. Il fut condamné à mort par contumace l’année d’après, mais obtint des lettres de rémission en 1723, et la peine ne fut pas exécutée. Les détails des enquêtes, le jugement et sa signification à Saint-Fulgent et à la Rabatelière sont intéressants et ont fait l’objet de fréquentes publications depuis près de trois siècles, accessibles sur internet.

Faut-il lier la vente de la seigneurie de Saint-Fulgent en 1720 à ce drame ? Beaucoup d’auteurs l’ont fait. Il fallait en particulier dédommager la veuve du seigneur de la Braillère, le jugement de condamnation lui ayant alloué 12 000 livres de dommages et intérêts. Et qui sait combien a coûté la lettre de grâce royale en pots de vin ?

La seigneurie de Saint-Fulgent St Fulgent fut acquise par un négociant nantais, Joachim Descazeaux. Sa vie et celle de ses successeurs méritent une publication spéciale que nous ferons dans un article distinct. Avec eux la querelle avec le seigneur de Languiller continua de plus belle.

À suivre.


(1) Revue des provinces de l'Ouest (Nantes) A. Guéraud (Nantes) 1854, n° 1, 6e année, page 206.
(2) Gaston Zeller, Les Institutions de la France au 16e siècle, PUF, 1948, page 198.
(3) Charles de Chergé, Guide du voyageur à Poitiers et aux environs, l’Etang, 1872.
(4) Archives de Vendée, société d’émulation de la Vendée (1876), C. Gourraud, Notes historiques sur Chavagnes : BIP PC 16/10, la Chardière : page 140 vue 52. Cet auteur attribue l’anoblissement à André Le Geay, fils de Pierre. Nous retenons la thèse de G. de Raignac l’attribuant à Pierre.
(5) Archives de Vendée, Fonds Bousseau et famille de Grandcourt : 42J/19, Charretier et Le Geay.
(6) Philippe Ariès, L’homme devant la mort, Seuil, 1977, page 312.
(7) Inventaire après-décès en 1666 du mobilier, vaisselle, linge et papiers de Pierre Moreau, Archives de Vendée, chartrier de Roche-Guillaume, famille Moreau : 22 J 29, page 139.
(8) F. Hildesheimer, Une église bien temporelle, dans « Sept siècles d’histoire en Vendée, les diocèses de Luçon et de Maillezais », Recherches vendéennes no 23, 2017-2018, page 165.
(9) Archives historiques du diocèse de Luçon, fonds de l’abbé Boisson : 7 Z 18-2, notes sur les Bertrand de Saint-Fulgent et de la Grassière.
(11) « René Bertrand, seigneur de Saint-Fulgent et son descendant Gazeau », pages 595 à 603, État du Poitou sous Louis XIV : rapport au roi et mémoire sur le clergé, la noblesse, la justice et les finances, état des gentilshommes de la sénéchaussée de Fontenay, par Charles Colbert de Croissy, Jacques-Honoré Barentin, Gilles Maupeou d'Ableiges, annoté et publié par Charles Dugast-Matifeux, Fontenay-le-Comte, 1865.     
(12) Auguste Lièvre, Histoire des protestants et des églises réformées du Poitou, 1859, tome 3, page 316. Cité par Dugast-Matifeux dans Les Annales de la Société Académique de Nantes et du département de la Loire-Inférieure, 1861, tome 32, page 217. 
(13) Archives de Vendée, chartrier de la Rabatelière : 150 J/G 40, assises de 1671 de la seigneurie de Saint-Fulgent à la Chevaleraye.
(14) Registre des assises des Essarts en date du 15-5-1713, Archives de la Vendée, transcription par G. de Raignac des archives de la Barette : 8 J 87-2, page 23 ter.
(15) Archives de Vendée, baronnie des Essarts-Brosse et Luxembourg (1435-1642), 19 J 1, ferme de la baronnie des Essarts à Masseau et Menanteau le 17-12-1571.
(16) 150 J/G 115, déclaration roturière du 21-3-1702 de François Basty pour Catherine Roussière à Languiller pour domaines à la Bergeonnière.
(17) 150 J/E 2, registre d’assises de la Rabatelière de 1637 à 1651.
(18) Archives de la Vendée, notaires de Saint-Fulgent, Frappier : 3 E 30/3, visite du 18-8-1763 et inventaire des réparations à faire au château de Languiller.
(19) Archives de la Vendée, chartrier de la Rabatelière : 150 J/A 11, sentence du 23-5-1698 du présidial de La Rochelle, condamnant Masson à payer à Chitton la moitié des terrages du fief de la Chemillière (Essarts), pages 43 et 45.
(20) 150 J/A 11, lettre du 12-12-1686 de Labergeril à Philippe Chitton, prévôt général du Poitou, pour dénoncer deux déserteurs.  
(21) Archives de la Vendée, chartrier de la Rabatelière : 150 J/A 11, affaire du chemerage de la seigneurie des Bouchauds, lettre de Ph. Chitton du 13-5-1702 à Me Normand.
(22) 150 J/G 40, offre de foi et hommage du 13-4-1711 de Saint-Fulgent à Languiller à cause du Coin Foucaud (sic : Bouchauds) pour la Boutinière, non acceptée.

Emmanuel François, tous droits réservés
Décembre 2015, complété en janvier 2023

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dimanche 1 novembre 2015

Les seigneurs de Saint-Fulgent contre les seigneurs de Languiller (1595-1649)

Étang de Jarrie à Saligny
C’est en 1561 que le seigneur de Saint-Fulgent acquit des droits seigneuriaux sur la Chevaleraye, la Boutinière et la Javelière à Saint-André-Goule-d’Oie. Par la suite ses successeurs se revendiquèrent seigneur des lieux à part entière, en concurrence avec les successeurs du vendeur : les seigneurs de Languiller (Chauché). Le conflit dura deux siècles, jusqu’à la veille de la Révolution ! Commençons par faire connaissance avec l’acquéreur et le vendeur. En 1561 le seigneur de Saint-Fulgent s’appelle Gilles Chasteigner.

Les seigneurs de Saint-Fulgent et de Languiller en 1561


Depuis que Jeanne Drouelin, fille du dernier des Drouelin seigneur de Saint-Fulgent, s’était mariée en 1365 avec Jean Cathus, le château de Saint-Fulgent  était devenu une résidence secondaire pour son propriétaire. Dès la génération suivante, la seigneurie de St Fulgent passa par mariage en 1380 dans la famille, originaire de la banlieue nantaise, des « Rezay » (Rezé). Celle-ci avait acquis les seigneuries de la Merlatière, de la Raslière (jouxtant le bourg de la Merlatière), et de la Jarrie (Saligny), vivant dans cette dernière terre, proche des deux premières et du château actuel de Rortheau.

Ces terres dépendaient du baron des Essarts, avec qui les Rezay se fâchèrent pour une question de droit de chasse. L’affaire alla loin, et en 1503 le parlement de Paris enleva les trois seigneuries de la Merlatière, Jarrie et Raslière de la mouvance des Essarts pour les rattacher directement au roi, lequel les mit dans la mouvance du duché de Thouars. Cinq générations après son entrée chez les Rezay de la Merlatière, la seigneurie de Saint-Fulgent changea de mains par mariage. En effet, Michelle de Rezay, dame de Saint-Fulgent, épousa vers 1500 Jean de Chasteigner.

Les Chasteigner habitaient Saint-Denis-la-Chevasse, où ils étaient seigneurs du Petit Châtenay (proche du bourg vers l’ouest). Ils y demeuraient toujours en 1618, ou bien à Jarrie à d’autres époques. C’est le petit-fils de Michelle de Rezay, Gilles Chasteigner, qui reçut en donation en 1560 un droit de retrait sur des redevances féodales dues à la Chevaleraye, la Boutinière et la Javelière. Était-ce une vraie donation, c'est-à-dire sans aucune contrepartie ? Il semble que oui, mais cette donation est bien particulière.

Dans la réunion des trois États du Poitou pour l’adoption de la coutume du comté, le procès-verbal du 15 octobre 1559, mentionne Gilles Chasteigner, seigneur de Saint-Fulgent, représenté par maître Louis Petit (1). Gilles Chasteigner avait épousé le 21 janvier 1555 Gabrielle de la Nouhe au château de Puy-Greffier. Celui-ci était situé à quatre kms du château de Saint-Fulgent, ce qui veut dire que les liens avec les seigneurs de Puy-Greffier allaient plus loin que ceux d’un bon voisinage. Quant au donataire des droits seigneuriaux, il était marié à Jeanne du Bouchet, fille du seigneur de Puy Greffier. Il s’appelait Jules de Belleville.

Les Belleville sont originaires d’Angleterre, venus dans le Poitou se battre contre les Français pendant la Guerre de Cent Ans. Leur ancêtre, Jean Harpedanne, changea de camp et se mit au service du roi de France. Son fils reçut par mariage les terres de Montaigu et Belleville. Son petit-fils prit pour lui et sa descendance le nom de Belleville. Deux générations après, Jean IV de Belleville (1480-1547) épousa vers 1506 Jacquette de Sainte-Flaive, qui lui apporta en dot les seigneuries de Sigournais, Chantonnay et Languiller. Trois de leurs petits-enfants se succédèrent dans la possession de la seigneurie de Languiller ensuite. D’abord l’aîné des petits-fils, Claude de Belleville. Quand il mourut vers 1563 à l’âge de 56 ans à Sigournais, il avait des frères et sœurs plus jeunes que lui, et c’était alors une règle propre au pays du Bas-Poitou, que d’attribuer le fief féodal aux branches collatérales au décès de l’aîné. Et au décès du dernier de la fratrie, le fief revenait aux descendants du frère aîné. C’est ce qu’on appelait dans la coutume du Poitou le droit de viage et retour pour les biens immeubles nobles (2). Après Claude, la seigneurie de Languiller passa ainsi à sa sœur Suzanne, mariée à Charles de Coucys, puis à Jules de Belleville.

Celui-ci était né avant 1528, probablement à Saint-Thomas-de-Conac en Gironde où ses ancêtres avaient acheté la seigneurie de « Cosnac ». Puis, devenu seigneur de Languiller, il vint y habiter, au point que certains de ses contemporains lui donnèrent le surnom de « Languiller ». Sa résidence a même été qualifiée de « Chauché les Bordeaux », selon l’historien Guy de Raignac.

Anciennes ruines du château de Puy-Greffier 
à Saint-Fulgent 

Naturellement il trouva sa femme à proximité, au château de Puy-Greffier, et il épousa en premières noces Jeanne du Bouchet. Nous n’avons pas son certificat de baptême, mais celle-ci est vraisemblablement  fille de Charles du Bouchet, seigneur de Puy-Greffier, et de sa première femme, Jeanne du Bellay. Parmi ses parents on trouve son oncle Tanneguy du Bouchet, célèbre chef protestant tué en 1569 à la bataille de Moncontour, réputé pour sa rigueur morale et sa bravoure. On a Lancelot du Bouchet, aussi farouche capitaine que son oncle dans le camp protestant, un demi-frère de Jeanne. Rappelons qu’il y eut huit conflits armés entre 1562 et 1598 en France, appelés guerres de religion par les historiens, opposant protestants et catholiques. Beaucoup de nobles de la région prirent le parti protestant, notamment les Bouchet de Puy-Greffier et les Bertrand de Saint-Fulgent, et aussi Jules de Belleville, le baron des Essarts restant catholique.

Jules de Belleville batailla avec Tanneguy et Lancelot du Bouchet. En 1567, il escorta le prince de Condé dans sa fuite de Verneuil à la Rochelle. Il fut un temps gouverneur de Fontenay-le-Comte, ville prise par Soubise. En 1575 il est à la Rochelle, où il constitue comme procureur spécial devant un notaire de la ville, Me René Daviau, pour le représenter dans une vente de droit de rachat du fief de la Blaire, paroisse de l’Airière, devenue la Ferrière (3). Il n’eut pas d’enfant avec Jeanne du Bouchet, comme avec sa seconde épouse Anne Goulard.

C’est lui qui vendit les droits seigneuriaux dépendant des seigneuries des Bouchauds et du Coin Foucaud, dans beaucoup de tènements et fiefs de Saint-André-Goule-d’Oie. Il était propriétaire de ces seigneuries, gérées alors comme des annexes de Languiller, et avait besoin d’argent.

Le seigneur de Saint-Fulgent acquiert en 1561 les droits seigneuriaux sur la Boutinière, Chevaleraye et Javelière


La donation de Jules de Belleville en 1560 au seigneur de Saint-Fulgent concerne un droit de retrait sur des droits seigneuriaux déjà vendus les années d’avant. Le don n’est donc pas coûteux pour le donataire, et le seigneur de Saint-Fulgent a dû payer le même prix que l’acquéreur précédent pour rembourser ce dernier. Dans l’acte notarié le don est motivé par « les bons et agréables plaisirs que lui a par ci-devant faits ledit Chasteigner, et qu’il espère qu’il lui fera à l’avenir » (4). Nous avons relevé qu’en 1557 Gilles Chasteigner avait représenté Jules de Belleville dans la vente des droits de fief du Pin et de la Baritaudière (Saint-André), étant son fondé de pouvoir à cette occasion (5). Ils étaient amis et se rendaient des services. Faut-il insister sur cette relation d’amitié, valeur forte à cette époque, dont le sens est à restituer dans des catégories de pensée quelque peu différentes des nôtres ? Ce n’est pas avec cette simple phrase qu’on peut explorer plus avant ces mœurs du 16e siècle. Mais entrons dans le détail des acquisitions.

Jules de Belleville a d’abord fait trois ventes au même acquéreur, Pierre Crespeau, marchand demeurant au bourg de Saint-Fulgent. On a déjà vu ce dernier servir de banquier à des habitants de la Machicolière.

Archives de la Vendée : extrait du contrat à Crespeau du 26-6-1559
La première vente du 1e mai 1554 concernait une rente de 40 boisseaux de seigle et 4 ras d’avoine à prendre sur le village de la Chevaleraye, pour le prix de 120 livres. Une clause particulière de réméré avait été inscrite dans le contrat. C’est une formule juridique, qui existe toujours dans notre code civil, par laquelle le vendeur se réserve de reprendre la chose vendue, moyennant la restitution du prix principal à l’acquéreur. C’est une sorte de vente à l’essai, désormais très peu pratiquée à cause de l’inventivité des banquiers pour résoudre les difficultés financières des vendeurs. Et c’est cette faculté de rachat, ou droit de retrait, que Jules de Belleville a donné à Gilles de Chasteigner. Il aurait pu la lui vendre, mais il la lui donna, même si son prix n’aurait pas été élevé. D’ailleurs il vendit cette faculté de retrait aussi pour le Pin et la Baritaudière.

Le réméré avait l’avantage de pouvoir être exercé par quiconque, alors qu’existaient dans le droit féodal d’autres facultés de retrait, mais limitées dans la définition des bénéficiaires. Ainsi le retrait féodal pouvait être exercé par le seigneur d’un bien vendu dans sa mouvance, prescrit par 30 ans. Le retrait lignager pouvait être exercé par le parent du vendeur pendant un an et un jour après la vente.

Dans la deuxième vente du 25 juillet 1554, Jules de Belleville vendit les droits de terrages à prendre au village de la Boutinière. Il les tenait au titre de la seigneurie des Bouchauds, relevant de la baronnie des Essarts, avec qui, de plus, il partageait ces terrages.

La troisième en date du 26 juin 1559 a fait l’objet d’un acte de vente passé devant Arnaudeau, notaire de Saint-Fulgent, d’une rente noble, foncière, féodale, perpétuelle due à titre de cens de 3 septiers et demi de seigle, mesure des Essarts, rendables au logis de Languiller chaque année. Elle était due par les propriétaires de la Javelière pour 48 boisseaux, et par ceux du tènement attenant de la Roche Herpière pour 8 boisseaux. Pierre Crespeau achète cette rente pour le prix de 220 livres. Son origine remonte à Jeanne des Bouchauds, qui l’avait vendue à la seigneurie du Coin Foucaud, celle-ci possédée en 1599 par le seigneur de Belleville, à une date non indiquée mais remontant plus tôt, à la fin du Moyen-Âge.

Les deux dernières ventes ont fait aussi l’objet d’une clause de rachat éventuel. Et par donation faite par acte notarié du 13 décembre 1560, le seigneur de Languiller à transmis au seigneur de Saint-Fulgent cette faculté de rachat. En même temps il donnait encore 5 sols de rente à lui due par les teneurs de la Javelière à noël, plus 2 sols 6 deniers à la Saint-Jean-Baptiste, et une dîme annuelle de 2 agneaux.

Et enfin, par une dernière clause, le seigneur de Languiller donne encore à celui de Saint-Fulgent « tous droits de fiefs à lui appartenant sur les choses mentionnées par les contrats ci-dessus » (6). C’est sur cette dernière phrase citée que les successeurs des seigneurs de Languiller et de Saint-Fulgent vont se battre pendant deux siècles. Pour les premiers elle voulait dire que l’acquéreur possédait les biens nobles qu’étaient les rentes, cens, et terrages, mais le vendeur gardait la mouvance et le droit de fief, pour lequel il rendait hommage au seigneur suzerain des Essarts. Pour les deuxièmes, elle voulait dire que l’acquéreur possédait la mouvance et le droit de fief, devenant le véritable seigneur de la Boutinière, la Chevaleraye et la Javelière.

Le seigneur de Saint-Fulgent mit en œuvre la faculté de retrait en effet peu de temps après le contrat de donation, en 1561, car cette faculté était bien sûr limitée dans le temps, « le temps de la grâce », disait-on. C’était une durée définie dans chaque contrat à cette époque. La locution est obscure pour les non-initiés, suivant une solide habitude des jurisconsultes, mais emprunte de poésie, une fois n’est pas coutume. Gilles de Chasteigner entra donc en possession des cens, rentes et autres devoirs seigneuriaux, en dédommageant Pierre Crespeau.

Dans les actes de vente à ce dernier, Jules de Belleville s’était réservé un devoir de 5 sols de cens qui lui était dû à noël, en précisant que les droits seigneuriaux vendus étaient tenus sous l’hommage qu’il en faisait au suzerain des Essarts en tant que seigneur du Coin Foucaud, dont dépendaient les tènements de la Chevaleraye et de la Javelière. Ce devoir au montant symbolique matérialisait le lien féodal maintenu sur ces deux tènements par Languiller.

Logis de Languiller
La vente au tènement de la Boutinière n’avait pas été faite avec cette clause particulière de devoir de 5 sols. Le tènement dépendait de la seigneurie des Bouchauds, appartenant elle aussi en partie à cette époque à Jules de Belleville en tant que seigneur de Languiller. Et cette seigneurie des Bouchauds, dépendait elle-même du baron des Essarts, qui en avait vendu une partie seulement. On a là une situation compliquée, si l’on veut.

Les notions de redevances seigneuriales et de directe seigneurie


La querelle pour savoir qui de Languiller ou de Saint-Fulgent possédait le droit de fief ou « directe seigneurie », comme on disait à l’époque, sur ces trois villages, comportait un enjeu financier et un enjeu politique. L’enjeu financier résidait principalement dans le droit de lods et ventes, appelé aussi « ventes et honneurs ». C’était le paiement par le nouveau propriétaire (par achat, succession ou dot) d’un bien immeuble, d’1/6 de sa valeur en Poitou, au seigneur direct. Ce droit avait été instauré il y a longtemps pour que les domaines fonciers concédés à bail, puissent être transmis par les tenanciers. Il représentait le droit de propriété lui-même.

L’enjeu politique, lié au statut même de seigneur, avait perdu de son importance réelle au fil du temps, grignoté par la montée en puissance des prérogatives royales. Mais voyons les mots employés, inscrits dans les formules immémoriales des notaires. Quand en 1635 le seigneur de la Rabatelière acheta les seigneuries de la Jarrie, Merlatière et Raslière, le notaire énuméra ainsi la consistance des biens : « châteaux, chefs d’hommage, fiefs, maisons et préclôtures, terres, châtellenies et seigneuries de la Jarrie, Merlatière et Raslière, hommes, vassaux et sujets tant nobles que roturiers en le bourg de Saligny, Boulogne et autres… » (7). Les hommes étaient donc des sujets compris dans les biens vendus. Sauf qu’en réalité la condition de serfs avait disparue depuis bien longtemps en Poitou et qu’il ne faut pas lire le texte avec nos définitions contemporaines des mots. Mais il est intéressant à connaître pour comprendre l’organisation de la société.

Dans le Poitou il y avait très peu de terres libres, appelées alleux. En dehors des biens d’Église, les domaines étaient tenus noblement ou roturièrement, dans le premier cas par foi et hommage et aveu, et dans le deuxième cas par simple déclaration, toujours faits au seigneur de qui les domaines étaient tenus. La nature du bien déterminait le rapport entre les hommes, un noble pouvant tenir un bien roturier et un roturier pouvant tenir un bien noble, et un ecclésiastique pouvant tenir un bien noble ou roturier.

La Raslière au bourg de la Merlatière
Les jurisconsultes du Moyen Âge avaient inventé une conception de la propriété divisée en deux notions, à la fois distinctes et associées, un peu comme de nos jours le sont la nue-propriété et l’usufruit. La première était la propriété « éminente » du seigneur, de qui était tenu le bien, justifiant les droits seigneuriaux. La deuxième était la propriété « utile » du tenancier du bien, qui l’exploitait, en touchait les revenus et le transmettait par vente ou héritage ou dot ou don. La suppression des droits seigneuriaux alla de pair avec une nouvelle conception de la propriété, toute exclusive au profit du tenancier ou « teneur » du bien. Intellectuellement cette suppression fut donc une révolution, même si ce mot a un sens plus large pour les historiens. On comprend que la propriété moderne fut érigée en droit de l’homme en 1789, mettant fin à un millénaire de propriété féodale.

La seigneurie ou droit de directe seigneurie, ou droit de fief, ou droit de mouvance, entraînait le droit de juridiction foncière automatique en Poitou ou juridiction basse au minimum (article 17 de la coutume). Et quiconque avait droit de juridiction avait droit de tenir assise (article 18 de la coutume), c’est à dire de convoquer les propriétaires devant une cour de justice pour y « exhiber » (communiquer) leurs contrats d’achats et y faire leurs aveux ou déclarations roturières. La propriété éminente emportait donc droit de justice, exercé par le propriétaire et non par un tiers. Le seigneur pouvait aussi exercer son droit de saisie féodale par « puissance de fief », (confiscation des revenus du bien concédé en cas de défaut de devoirs dus par le vassal), mais cette fois-ci dans des cas et conditions de plus en plus contrôlés par la justice royale au fur et à mesure qu’on avance dans le temps.

Pour employer des concepts contemporains, on peut dire en simplifiant que la féodalité était une société politique où les seigneurs avaient acquis des prérogatives politiques à titre privé. Cette civilisation féodale, développée dans les États de l’ancien empire de Charlemagne et l’Angleterre, a évolué, chacun à sa manière suivant les pays, pour libérer son espace politique des tutelles seigneuriales. Par ailleurs vivant dans la confusion du temporel et du spirituel, cette civilisation a évolué, là aussi chacun à sa manière, vers la séparation de la vie religieuse et de la sphère politique.

Dans un premier conflit vers 1600, le seigneur de Saint-Fulgent recule


Revenons en 1561. Le seigneur de Saint-Fulgent a donc franchi le ruisseau du Vendrenneau et est devenu propriétaire sur le territoire de la paroisse de Saint-André de droits seigneuriaux à la Boutinière, avec ses moulins, à la Chevaleraye et à la Javelière. Que s’est-il passé ensuite ? Les documents légués à la postérité par la seigneurie de Languiller, les seuls qui sont parvenus jusqu’à nous, ne commencent qu’en 1595. Nous en faisons le constat partout ailleurs à Saint-André-Goule-d’Oie. De plus, les premiers aveux d’importance conservés actuellement, concernant la seigneurie de Languiller elle-même et celle du Coin Foucaud, ne sont que des copies de texte datés de 1550. Il a existé un cartulaire du Coin comprenant des textes antérieurs du 15e siècle. Ils ont fait l’objet de transcriptions au 19e siècle par Charles Constant Gourraud, notaire de Chavagnes-en-Paillers, désigné « manuscrit Gourraud » par A. de Guerry, qui y a eu accès et en a pris des notes. À son époque Gourraud note le cartulaire « en mauvais état » déjà. Le manuscrit Gourraud est en partie conservé aux Archives départementales de la Vendée dans le fonds Mignen.

Le 7 juillet 1595, un notaire des Essarts rédige et signe une déclaration roturière au seigneur de Languiller pour le compte de Maurice Rabereul. Ce dernier habite au Coudray et possède en indivision le tiers d’un moulin à vent à la Boutinière. Pour cela il doit « 2 sols 6 deniers de cens par an rendables en votre châtel du lieu de Languiller en chacune fête de Saint-Jean-Baptiste », et aussi « 2 chapons que prend et a accoutumé lever le seigneur baron des Essarts » (8). Souvenons-nous que la Boutinière dépendait de la seigneurie des Bouchauds, dont les revenus étaient partagés par moitié entre son propriétaire (Languiller) et son suzerain (les Essarts).

Porche de l’ancienne église de Belleville
À cette date la déclaration est rendue à « messire Léonor Chabot de Saint-Gelais chevalier seigneur de Jarnac au nom et comme tuteur ordonné par écrit de la personne et biens de demoiselle Marguerite de Belleville, comtesse de Cosnac, Belleville et Languiller ». Celle-ci était sous la tutelle du deuxième mari de sa tante, Marguerite de Durfort-Duras, cette dernière ayant épousé en premières noces un de ses oncles, Philippe de Belleville. Elle était devenue dame de Belleville et Languiller à la suite de son père, Charles de Belleville (1540-1583), qui lui-même avait succédé à Jules de Belleville. Charles de Belleville était le fils aîné du frère aîné de Jules de Belleville, Claude de Belleville (1507-1563). Néanmoins toutes les possessions de Languiller ne lui appartenaient pas, certains domaines étant toujours restés à la veuve de Jules de Belleville, Anne Goulard, faisant partie de son douaire probablement.

Marguerite de Belleville se maria peu de temps après cet aveu avec Emmanuel des Prez, marquis de Villars, dit de « Savoie » à cause de sa mère, celle-ci étant la fille d’Honorat II de Savoie, ayant épousé en 2e noces le chef de la Ligue catholique après 1588, Charles de Mayenne. Ce mariage consacrait le retour des Belleville dans les rangs catholiques, où combattait le mari.

Malheureusement la jeune mariée mourut sans postérité le 3 septembre 1599. Son mari vendit Belleville, Languiller et ses fiefs annexes (Les Bouchauds, le Coin Foucaud, etc.) en 1604 à une habitante de Fontenay-le-Comte, Marie du Fou. Au final, celle-ci récupéra semble-t-il tous les domaines ayant fait partie du Coin Foucaud et des Bouchauds.

En 1607, le seigneur de Saint-Fulgent fit à cette dernière une offre de foi et hommage pour ses droits à la Boutinière (9). Il s’agit de Jacques Bertrand « fils émancipé de Christophe Bertrand écuyer seigneur du Chastenay fils aîné et principal héritier de défunte demoiselle Charlotte Chasteigner ». Cela veut dire qu’il n’avait pas encore 25 ans. Il était le petit-fils de Gilles Chasteigner, le bénéficiaire de la donation de 1560. Sa mère s’était mariée en 1579 avec Christophe Bertrand, descendant d’une famille ancienne de nobles, ayant habité dans un village de Chauché, maintenant Saint-Denis-la-Chevasse, la Roche Boursaut (10)  liée avec les gentilshommes verriers du même nom établis à Dompierre-sur-Yon.

Jacques Bertrand était aussi seigneur en 1618 de la Vergne-Ortie, (acquise de la famille de Saint-Savin), située à Chauché, année où le seigneur de la Rabatelière lui rendit un aveu pour ses possessions dépendant de la métairie de la Fesselière, et incluses dans le tènement de la Landouinière de Chauché (11).

En 1600 la seigneurie de Saint-Fulgent était passée à René Aubert, seigneur de Garnaut, époux de Jeanne Chasteigner, la sœur de Charlotte Chasteigner. Dès 1606 elle revint à Jacques Bertrand, fils de cette dernière. Mais le changement ne fut définitif que par un acte de partage des biens avec Jeanne Chasteigner, fille puînée de Gilles Chasteigner, le 2 mars 1624.

L’acte de foi et hommage de Jacques Bertrand en parchemin de 1607 n’est pas totalement lisible à cause d’une grande tache en son milieu, mais on comprend qu’un problème existe entre le vassal et le suzerain. L’offre d’hommage est faite sous condition d’une main levée de biens saisis. Une allusion à un hommage antérieure à Anne Goulard, la deuxième épouse de Jules de Belleville est en partie indéchiffrable. Il y a un problème, même si on ne comprend pas bien de quoi il s’agit. Il a peut-être été aplani trois semaines plus tard, si l’on en croit l’aveu rédigé par Arnaudeau, le notaire de Saint-Fulgent, fait par le même Jacques Bertrand à la même Marie du Fou.

La Boutinière
Il y affirme qu’il « tient et avoue tenir à foi et hommage plain et à rachat quand le cas y advient par muance (changement) d’hommes selon la coutume du Poitou » les choses qui suivent : les droits de terrage à la Boutinière sur des champs qu’il énumère s’élevant au 1/6 des récoltes, les rentes de 40 boisseaux de seigle et 4 ras d’avoine à la Chevaleraye et trois septiers une mine de seigle, deux agneaux et autres droits sur la Javelière. Nous reconnaissons les redevances acquises en 1561, mais on remarque une précision : sur ces choses « ledit Bertrand tient et avoue tenir tout droit de basse juridiction et choses qui en dépendent » (12). Voilà qui consiste à affirmer sa seigneurie directe sur ces trois villages. Cet aveu a donc été « blâmé et rejeté » par Marie du Fou (13).

Et pendant ce temps comment réagissaient les tenanciers des biens roturiers ou censifs ? Dans une déclaration roturière de 1606, rédigée par deux notaires des Essarts, ils sont sept importants propriétaires à déclarer leurs domaines et les droits seigneuriaux auxquels ils sont assujettis. Leurs domaines sont situés à la Boutinière et à la Chevaleraye, mais aussi sur deux petits tènements voisins : les Suries et les Bruères (Voir les articles publiés en septembre 2015 : La Boutinière à St André Goule d'Oie, et octobre 2015 : La Chevaleraye et la Javelière). Pierre et Maurice Rabereul, Michel Chatry, Jacques Robin, Nicolas Cougnon, Florence Bergereau veuve de François Chatry, et Paynaud, déclarent leurs redevances dues au seigneur de Languiller.

Pour le tènement de la Boutinière dépendant des Bouchauds, ces « devoirs », comme on disait aussi, sont partagés par moitié entre Languiller et le baron des Essarts : 40 sols à la Saint-Jean-Baptiste, 4 boisseaux de seigle à la mi-août, 32 ras d’avoine à noël et 4 sols de rivage à Notre-Dame de septembre. Les teneurs rappellent le droit de terrage qu’ils payent au baron des Essarts et au seigneur de Saint-Fulgent par moitié.

Pour le tènement de la Chevaleraye dépendant du Coin Foucaud, les propriétaires déclarent pour mémoire la rente due au seigneur de Saint-Fulgent. Pour le tènement des Suries, dépendant aussi du Coin, ils déclarent une rente de 20 boisseaux de seigles, due alors à l’un des teneurs : Rabereul. Ce dernier la vendra plus tard à Pierre Moreau, son voisin du Coudray. Et pour le tènement des Bruères, dépendant aussi du Coin, on déclare une rente de 16 ras d’avoine due au seigneur de Languiller (14). Dans cette déclaration roturière, chaque seigneur est reconnu pour ses droits respectifs et ne s'y révèle pas de querelle entre eux.

Celle-ci apparaît après le rejet de l’aveu du seigneur de Saint-Fulgent au seigneur de Languiller en 1607. Aux assises de Languiller du début 1611, le premier reçut l’injonction de présenter une nouvelle déclaration. Il risquait la saisie et s’y résolut dans un texte du 8 juin 1611 (13). Et il cède du terrain, même s’il y rappelle, après avoir énumérer ses redevances et ses domaines, que ceux-ci sont tenus « avec tous droits de fiefs sur lesdites choses et lieux », faisant référence ensuite à la donation de 1560. Mais il qualifie son texte de « déclaration noble ». L’expression désignait la déclaration de biens nobles tenus sans foi et hommage du déclarant, qui n’était ni un aveu (pour des biens nobles tenus à foi et hommage par le déclarant), ni une simple déclaration roturière (pour des biens non nobles). Dans cette déclaration noble, le déclarant avouait tenir son bien noble sous l’hommage que rend son seigneur dominant (ici Languiller) au suzerain du fief (ici les Essarts). Par ces deux mots de « déclaration noble », le seigneur de Saint-Fulgent reculait dans ses prétentions à la possession de la seigneurie directe sur la Boutinière, la Chevaleraye et la Javelière. Celle-ci ne pouvait être déclarée en effet que dans un aveu.

Dans cette déclaration, le seigneur de Saint-Fulgent n’a toujours pas atteint l’âge de sa majorité et il a pour représentant spécial le notaire de Saint-Fulgent, maître Michel Arnaudeau. En face de lui, il y a la puissante Marie du Fou et ses conseillers de la baronnie de Mareuil, où elle séjournait quand elle n’était pas à Fontenay-le-Comte. Faisons connaissance avec elle.

Son père, François du Fou, avait été gouverneur et capitaine de la ville et château de Lusignan en 1531. Chef influent du parti huguenot, il rejoignit le prince de Condé à Orléans puis changea de camp. Il fut chargé plus tard par le roi Charles IX d'obtenir la soumission des Rochelais, mais il ne put aboutir.

Émilien Rorthay de Monbail : 
Ruines du château de la Boulaye
(Musée municipal de Fontenay-le-Comte)
Marie du Fou, qui avait deux sœurs, épousa d'abord en 1577, René de Talensac, seigneur de Loudrière, dont elle eut 2 enfants : René (marié en 1602 avec Françoise de Coligny, petite-fille de l’amiral), et Louise de Talensac (mariée en 1596 à René de La Lande) (15)Devenue veuve, Marie du Fou se remaria au temple de la Rochelle le 30 décembre 1585 avec Charles Eschallard, baron de Châteaumur et seigneur de la Boulaie (Treize Vents). Avec lui elle eut cinq enfants, dont l’aîné Philippe, qui lui succéda dans la possession de la seigneurie de Languiller.

Charles Eschallard fut un ami d’enfance du roi de Navarre. Il a été gouverneur de Fontenay et pays du Bas-Poitou dans le camp protestant de 1585 jusqu’à sa mort en 1594, et vice-amiral de Guyenne. Henri IV le couvrit d’honneurs et de récompenses : chevalier de l’ordre du roi, capitaine de 50 hommes d’armes de ses ordonnances, « conseiller du roi en tous ses conseils » et chambellan de sa majesté. Il mourut en juin 1594, en pleine reconquête du Bas-Poitou par les protestants.

Marie du Fou possédait en propre les terres et seigneuries de Champdolent (Charentes maritimes), Tour d’Oiré (Vienne) et Gauvinière. Elle avait l’usufruit des biens de son mari, Châteaumur et la Boulaie principalement. Après son achat de Belleville et Languiller, elle acheta en 1605 la baronnie de Mareuil et de la Vieille Tour. Elle était riche, énergique, habile et lettrée. Elle était en outre considérée non seulement parmi ses coreligionnaires, mais aussi chez les catholiques. Elle mourut à Mareuil le 12 août 1612.

Son fils, Philippe Eschallard, succéda à son père officiellement au poste de gouverneur de Fontenay avant sa majorité. Mais en réalité un lieutenant exerçait la fonction à sa place. On était au temps des offices publics, achetés et héréditaires. Sa mère Marie du Fou recevait les aveux et déclarations au nom de son fils, comme tutrice.

Rubens : couronnement de Marie de Médicis
Celui-ci fut lieutenant d’une compagnie de gendarmes de la reine Marie de Médicis, et « conseiller du roi en ses conseils d’État » (16). Il se maria avec Marie Hurault en 1604, fille de François et de Rachel de Cochefilet, celle-ci remariée ensuite au futur duc de Sully. Philippe Eschallard mourut tôt à Loudun le 13 avril 1616. Il avait eu Maximilien, Louise (mariée à Gabriel du Quesnel, marquis d’Allègre, sans enfant), Marie et Marguerite (religieuses par lettre de cachet au moins pour l’une d’elle). Ils étaient toujours protestants, et avec la disparition d’Henri IV les conflits reprirent. Les protestants devinrent de plus en plus en butte aux persécutions du pouvoir royal (17).







En 1614 le seigneur de Saint-Fulgent est seigneur de la Chevaleraye, Javelière et Boutinière 


Après le décès de son mari, Marie Hurault le remplaça pour recevoir les aveux et déclarations au nom et comme tutrice de son fils aîné Maximilien Eschallard.

Tout se passe comme si le seigneur de Saint-Fulgent en profita pour pousser son avantage. En 1614 il a atteint l’âge de la majorité et reçoit une déclaration de trois meuniers habitant le Coudray, et propriétaires d’un des deux moulins de la Boutinière. Il s’y affirme seigneur des fiefs de la Chevaleraye, Javelière et Boutinière (18). Certes, le seigneur de Languiller n’étant pas présent à l’acte, la manœuvre est facile. Et nos trois déclarants, Pierre Netraud, Maurice Rabereul et Pierre Ardouin n’avaient pas à s’occuper de la querelle des seigneurs.

En 1617, le seigneur de Saint-Fulgent demanda un délai, qui lui fut accordé, à l’Assise de Languiller, pour faire sa foi et hommage à Marie Hurault (19). Puis dans son aveu de 1618 il maintint sa position. Il fait écrire le texte par son notaire de Saint-Denis-la-Chevasse. Il y avoue tenir noblement ses domaines dans les trois tènements en question de Saint-André-Goule-d’Oie, « à foi et hommage plain et à rachat …. et à 6 deniers de service payables annuellement en chacune fête de Notre-Dame en août ». Ce n’est plus une déclaration noble, mais un aveu et dénombrement. Imperturbable, il énumère ses droits et leur provenance du don de 1560, comme un vrai possesseur de biens nobles que seraient devenus les tènements de la Chevaleraye, Javelière et Boutinière (20).

On ne connaît pas la réaction de Marie Hurault, et si elle émit un blâme comme l’avait fait sa belle-mère Marie du Fou sept ans plus tôt en 1611. On n’est pas sûr qu’elle se soit impliquée elle-même dans l’affaire. Elle affermait, comme c’était l’usage chez les nobles, sa seigneurie de Languiller et les seigneuries annexes des Bouchauds et du Coin à un bourgeois. C’est ce dernier qui gérait les droits seigneuriaux. Il payait un prix fixe convenu d’avance avec le seigneur, payable annuellement, et se chargeait sur la base du terrier et des papiers censaires, où tous ces droits étaient inscrits, de recouvrer les redevances. Au besoin il engageait des poursuites judiciaires à ses frais (Voir l’article publié sur ce site en mars 2014 : La ferme des Essarts (1570-1577). On a trouvé chez un notaire de Fontenay-le-Comte un bail à ferme en date du 4 juillet 1622, d’une durée de cinq années pour les seigneuries de Languiller, le Coin Foucaud et les Bouchauds. Le fermier est Michel Daviceau, sieur du Chiron, et le prix à payer est de 2 100 livres par an. C’est à lui qu’avaient affaire la presque totalité des habitants de Saint-André-Goule-d’Oie pour payer leurs droits seigneuriaux.

Ce n’est pas le fils aîné de Marie Hurault, Maximilien Eschallard, nouveau seigneur de Languiller et fiefs annexes, qui s’impliqua davantage à défendre ses droits face au seigneur de Saint-Fulgent. Lui aussi fut gouverneur et capitaine de Fontenay, puisque l’emploi était héréditaire. Il se converti au catholicisme, mais il n’est pas sûr qu’il faille donner à l’évènement une dimension religieuse profonde. Les pressions du roi devenaient de plus en plus fortes pour forcer les protestants à l’abjuration. Il y allait de leur maintien dans les emplois publics, par exemple. Dans son Rapport au roi sur l’état du Poitou, Colbert de Croissy écrit en 1664 : « Le marquis de La Boulaye, chef du nom d'Eschallard, a bien 30,000 livres de rente en fonds de terre en Poitou. Il est catholique et un des plus intéressés et échauffés au dessèchement des marais du Poitou. Il a épousé (1633) la fille du duc de Bouillon La Marck, qui a été seule cause qu'il a pris le méchant parti pendant les premiers troubles. De ce mariage il a deux enfants : l'aîné adopté par ledit feu seigneur de Bouillon, qui lui a fait porter le nom de comte de La Marck, qui a épousé une Saveuse, de laquelle il a eu de grands biens ; mais ils sont présentement séparés. Le second est appelé le chevalier de La Boulaie. »

P. Mignard : portrait deMazarin 
(musée de Chantilly)
Les troubles évoqués ici sont ceux de la Fronde qui opposa une partie de la noblesse et le parlement de Paris à Mazarin, premier ministre du royaume.
Le prévôt des marchands et les échevins de Paris demandèrent à Maximilien Eschallard, le 9 janvier 1649, de lever un régiment de mille chevaux en Bas-Poitou, avec ordre de l'amener dans la capitale. Mazarin avait fui la capitale et emmené la reine-mère et le jeune roi se réfugier à Saint-Germain quelques jours auparavant. Eschallard s'empressa d'obéir, et devint l'un des chefs les plus turbulents de la Fronde. Il fut même accusé d’avoir voulu assassiner le grand Condé sur le Pont Neuf.
Il vendit Languiller, ouvrant ainsi un nouveau chapitre dans la longue histoire des relations tumultueuses des seigneurs de Languiller et de Saint-Fulgent.

À suivre.






(1) Charles du Moulin, Le grand coutumier général, 1576, tome 2, Édition Bourdot de Richebourg, Nouveau coutumier général du Poitou, 1724, page 820.
(2) Archives de Vendée, G. de Raignac 8 J 100, dépouillement d’archives publiques et privées concernant les familles vendéennes vol. 4 vue 27 à 29/238.
(3) 150 J/A 12-7, abonnement du 25-6-1567 des droits de rachat du fief de la Blaire, tenu sous l’hommage de Languiller, au profit de Louis Chauvière, sieur de Beaupuy.
(4) Archives de Vendée, chartrier de la Rabatelière : 150 J/G 40, donation du 13-10-1560 du droit de retrait par Jules de Belleville à G. Chasteigner concernant la Boutinière et autres.
(5) 150 J/G 14, requête du 7-2-1697 de Marie Gazeau au tribunal de Fontenay, concernant le droit de fief du Pin.
(6) 150 J/G 40, donation de 1560 de J. de Belleville et aveu de Saint-Fulgent (Bertrand) en 1618 à Languiller à cause du Coin Foucaud et des Bouchauds pour les biens donnés.
(7) 150 J/B 3, acquisition du 25-8-1635 de Jarrie, Merlatière et Raslière par échange entre la Rochefoucauld et le seigneur de la Rabatelière.
(8) 150 J/G 58, déclaration roturière du 7-6-1595 de Maurice Rabereul à Languiller pour un moulin à vent de la Boutinière à cause du fief des Bouchauds.
(9) 150 J/G 40, offre de foi et hommage du 22-11-1607 de Saint-Fulgent à Languiller pour la Boutinière, mouvante des Bouchauds.
(10) Archives historiques du diocèse de Luçon, fonds de l’abbé Boisson : 7 Z 18-2, notes sur les Bertrand de Saint-Fulgent et de la Grassière.
(11) 150 J/C 24, aveu et dénombrement du 4-6-1618 de Charles Bruneau, seigneur de la Rabatelière, au seigneur de Saint-Fulgent, Chastenay et Vergne Ortie (Jacques Bertrand), à cause du fief de la Vergne Ortie (Chauché), pour raison du tènement de Landouinière (Chauché).
(12) 150 J/G 40, aveu du 15-12-1607 de Saint-Fulgent à Languiller pour droits à la Boutinière, Chevaleraye et Javelière, à cause du Coin Foucaud et des Bouchauds.
(13) 150 J/G 40, avis du 18-12-1713 actant un blâme du seigneur de Languiller sur l’aveu de 1607, et, aveu du 8-6-1611 de Saint-Fulgent à Languiller à cause du Coin Foucaud et des Bouchauds.
(14) 150 J/G 58, déclaration roturière du 1-6-1606 de 7 teneurs à la Boutinière, Chevaleraye, Suries et Bruères à cause du Coin Foucaud et des Bouchauds.
(15) Laurent Blanchard, À La Rochelle entre sa foi et son roi, Monsieur de Loudrière (c.1580-1628), Éditions Ampelos, 2018, page 11 et s.
(16) 150 J/G 113, aveu du 9-9-1622 de Sébastien Masson à Languiller pour la Jaumarière et les Ségoninières.
(17) Eugène et Émile Haag, La France protestante, 1853, tome 4, page 543.
(18) 150 J/G 58, déclaration roturière du 2-7-1614 de 3 teneurs à Saint-Fulgent pour un moulin à vent de la Boutinière à cause des fiefs de la Chevaleraye et Boutinière (sic).
(20) 150 J/G 40, aveu du 27-3-1618 de Saint-Fulgent à Languiller pour ses droits seigneuriaux sur la Boutinière, Chevaleraye et Javelière.

Emmanuel François, tous droits réservés
Novembre 2015, complété en janvier 2023

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