lundi 1 juillet 2013

Les cousins de Grandcourt de Saint-Fulgent

À la page 162 de mon livre, Les châtelains de Linières à Saint-André-Goule-d’Oieon voit « M. de Grandcourt chargé des pouvoirs de Mme Guyet » en 1870, à l’occasion d’un état des lieux au moment du changement de métayers à la Morelière, faisant partie du domaine de Linières. Je rappelle alors les liens existants entre les Guyet et les de Grandcourt, remontant au mariage de Narcisse de Grandcourt avec Élise Agathe Martineau en 1833. Revenons sur ces liens qui ont été importants entre ces familles au cours du 19e siècle. Quand le château de Linières fut démoli en 1912, Paul et Charles de Grandcourt essayèrent de sauver des fragments de fresques des murs et les donnèrent au musée de la Roche-sur-Yon, en vue de leur conservation.

L’histoire de ce cousinage commence à Paris.

Pierre Legras, dit Legras de Grandcourt, a été loueur de carrosses en 1789 (1) et est devenu ensuite fonctionnaire. Il occupa un poste d’inspecteur des contributions directes et mourut à Paris en 1829. On sait que Joseph Guyet, le propriétaire de Linières de 1800 à 1830, fut fonctionnaire au ministère des Finances de l’époque. Peut-être y a-t-il eu un lien entre eux à partir de leurs vies professionnelles.
Pierre Legras de Grandcourt se maria avec Gabrielle Constance Gratien (morte en 1815), dont le frère Pierre Guillaume Gratien (1764-1814) fut général et baron d’empire. Cet illustre beau-frère a son importance, car les deux neveux, Olivier et Narcisse de Grandcourt de Saint-Fulgent, ont hérité d’une partie de sa fortune plus tard. Pour les combattants vendéens aussi il a son importance : il était sous les ordres de Hoche en cantonnement en 1793 à Chantonnay, et quand celui-ci essayait de capturer Charette au début de 1796.

Le couple eut trois enfants, une fille et deux garçons.

Constance Legras de Grandcourt


Amaury-Duval : 
portrait de Constance Franco
La fille, Constance Legras de Grandcourt (1796-1877), épousa en 1833 Joachim Franco (1785-1865), né au Portugal, et chef de bataillon au 107e régiment d’infanterie de ligne, domicilié à Metz un temps, ville de garnison. Amaury-Duval a dessiné un portrait de Constance Franco, actuellement au musée des Beaux‑Arts de Lyon. Il porte la dédicace suivante : « à Madame Franco souvenir affectueux Amaury‑Duval Linières 1871 ». Pendant les événements de la guerre de 1870, elle s'occupa de surveiller la rue de Tivoli et l'atelier de la rue Saint‑Lazare (où habitait et travaillait le peintre) et en rendit compte à Amaury‑Duval qui était à Linières (2). Son mari est mort à Marly-le-Roi en 1866, voisin des Guyet-Desfontaines, propriétaires de Linières. Dans son testament de 1868, Mme Guyet-Desfontaines lui lègue la gratuité d’un logement, augmenté d’une petite rente annuelle de 14 F (3). Marcel de Brayer demandera à son grand-oncle dans son propre testament en 1875 de continuer l’aide à Mme Franco. La pauvre femme a été victime de ce qu’elle appela « l’affreux pillage de 70 » à Paris. Elle a fini sa vie chichement dans une maison louée dans le 17e arrondissement, ayant perdu, de plus, une partie de la pension militaire de son mari. Ses frères de Saint-Fulgent ont payé le petit déficit de sa succession, pour que ses legs mobiliers puissent être honorés (4).

Le cousinage des de Grandcourt avec les châtelains de Linières est né à Saint-Fulgent chez Mme Martineau, la sœur de Joseph Guyet. C’est chez Étienne Martineau était mort au mois de novembre dernier et il l’avait probablement vu pour la dernière fois en octobre 1827 (6). Lui-même est à Saint-Fulgent pour la dernière fois, car il mourra à Paris au mois de mai suivant. La première des filles Martineau, Rose, était déjà mariée au juge de paix Gourraud depuis 1825, mais ses deux autres sœurs, Élise et Adèle, étaient toujours célibataires. On sait qu’Adèle épousera un facteur des Halles de Paris en 1831. Peut-être a-t-on parlé mariage des enfants entre le frère et la sœur, entre Joseph Guyet et Catherine Martineau ? Toujours est-il que c’est de Paris que sont venus les deux garçons de Grandcourt, Olivier et Narcisse, qui furent des militaires ayant choisi de se marier tard. Et ils se marièrent à Saint-Fulgent avec les sœurs Martineau.

Narcisse Hyacinthe Legras de Grandcourt


Le premier mariage eut lieu le 14 octobre 1833 (vue 240) entre Narcisse Hyacinthe Legras de Grandcourt (1793-1880), comme son nom est écrit sur le registre d’état civil de Saint-Fulgent, et Élise Agathe Martineau (1799-1875). Le marié est alors âgé de 39 ans et habite Cahors, étant chef de bataillon au 57e régiment d’infanterie de ligne en garnison à Agen. Son oncle, le général Gratien, a pourvu à son éducation militaire. Il est né à Paris le 18 janvier 1794, rue de la Martellière dans le 9e arrondissement. Entré à l’école militaire de Saint-Cyr en 1812, il est lieutenant en 1815, capitaine en 1818, chef de bataillon en 1830, et prendra sa retraite comme lieutenant-colonel. Il reçut le diplôme de chevalier de Saint-Louis en 1823 et la médaille de Sainte-Hélène. Élise Martineauâgée de 32 ans, est née à Linières le 8 janvier 1799 (selon son acte de mariage), et son père, le docteur Benjamin Martineau, est déjà mort à Saint-Fulgent en 1828.

Son cousin Guyet-Desfontaines avait compté Élise Martineau parmi ses trois héritiers, avec son frère de Palluau, Benjamin Charles Martineau, quand il fit un testament en 1833, deux ans après son mariage et avant d’entreprendre un voyage. Il est assez probable que ceux-ci n’en surent jamais rien, mais voilà qui révèle bien la force de leurs liens familiaux (7).

Élise Martineau a pu compter, sur les relations de son cousin député (Guyet-Desfontaines), à qui elle écrit quelques jours après la mort de sa mère, le 9 janvier 1838 (« Mon bon Marcellin »), lui demandant d’intervenir auprès du ministre de la Guerre pour son mari. Celui-ci finissait un congé de trois mois en demi-solde à Saint-Fulgent en cette fin d’année 1837, alors que sa belle-mère était au plus mal. Il avait obtenu une prolongation d’un mois, mais sans solde.

Narcisse Hyacinthe de Grandcourt 
(source Archives de Vendée, 
Fonds Bousseau : 42 J/19)
Alors Élise demande à son cousin de lui obtenir cette prolongation en demi-solde : « Rends-nous donc le service de faire des démarches près du ministre de la guerre pour que cette prolongation de congé que nous t’envoyons, nous soit accordée avec demi-solde ». D’autant que son mari, « comme électeur, aurait dû venir aux élections à solde entière, et que par le fait il s’y ait trouvé avec la demi-solde de congé ». Et puis elle ajoute dans sa lettre : « Persuadée que tu ne trouveras au ministère que des notes favorables, et très favorables, pour Narcisse, j’ai plus de hardiesse à te prier de faire des démarches pour lui. En même temps que tu solliciteras ce congé en demi-solde, tu seras à même de te convaincre s’il est proposé pour de l’avancement. »

Cette demi-solde est d’autant plus la bienvenue qu’après la mort de sa mère, il faut procéder aux partages de l’héritage, ce qui entraîne des soucis de placements d’argent : « Sans prévoir une mort aussi précipitée, Narcisse et moi avions fait ces temps derniers un placement de 9 000 Frs. Et pour satisfaire aux obligations du testament de notre mère, nous voilà dans une position fort gênée, et contraints de  vendre aujourd’hui pour 12 000 francs d’actions et de rentes afin d’en terminer promptement. » Le cousin député méritera bien l’expression ainsi de ses meilleurs sentiments : « Permets-moi de te faire nos adieux en t’embrassant ainsi qu’Emma et Isaure du plus profond de notre cœur. Je me repose sur ton cœur et ton amitié pour nous servir. Ta dévouée amie et cousine. » (8)

Narcisse Grandcourt fut choisi par Guyet-Desfontaines pour gérer le domaine de Linières en remplacement de Joseph Alexandre Gourraud (1791-1853), mari de Rose Martineau, une sœur d’Élise. Celui-ci était juge de paix du canton de Saint-Fulgent et habitait Chavagnes. En 1841 il était intervenu pour représenter Guyet-Desfontaines auprès de la municipalité de Saint-André-Goule-d’Oie (9).  Après le décès de Gourraud, ce dernier passa la même année en 1853 un acte de procuration à Narcisse Grandcourt, renouvelé ensuite par Mme Guyet-Desfontaines en 1857 (10). D’ailleurs celle-ci lui légua un capital de 20 000 F en usufruit dans son testament, en reconnaissance de l’intérêt porté par Narcisse Grandcourt et Élise Martineau aux affaires de Linières. Leur fils, Eugène de Grandcourt, en reçu la nue-propriété 10). Et Marcel de Brayer renouvela en 1868 la procuration donnée à Narcisse Grandcourt pour s’occuper de Linières (11).

Élise Agathe Martineau est décédée le 8 avril 1875 à Saint-Fulgent. La déclaration de sa succession a été faite au bureau de Montaigu le 20 septembre 1875 (vues 47 à 49 sur le registre numérisé). Narcisse Hyacinthe est décédé à Saint-Fulgent le 25 septembre 1880.

Olivier Gabriel Désiré Legras de Grandcourt


Le deuxième mariage eut lieu deux ans plus tard le 9 février 1835 à Saint-Fulgent (vue 8) entre Olivier Gabriel Désiré Legras de Grandcourt et Adèle Félicité Martineau. Le marié est âgé de 46 ans et habite Montrouge, alors qu’il est capitaine adjudant-major au 4e régiment de chasseurs en garnison à Sedan. Il est né à Paris le 21 juin 1789 et mourra à Saint-Fulgent le 6 décembre 1878. Il fut décoré sur le champ de bataille de Hainaut par Napoléon en 1813 de la légion d’honneur. Napoléon III lui remit la rosette d’officier de la légion d’honneur au jour de l’inauguration en 1854 de la statue de Napoléon à la Roche-sur-Yon, dont il avait présidé le comité d’érection (12). Adèle Martineau est âgée de 33 ans le jour de son mariage : née à Saint-Fulgent le 7 janvier 1802, elle y mourra le 20 juin 1868. Lors de son mariage, elle est veuve de Marie Adrien Aimé Bunel, facteur aux halles aux farines à Paris, décédé le 23 mars 1831. Un facteur aux Halles était un agent officiel, chargé de la vente en gros des denrées à la criée. Les témoins au mariage sont :
-        Narcisse, le frère du marié, domicilié au bourg de Saint-Fulgent,
-        Benjamin Charles Martineau, frère de la mariée et juge de paix à Palluau,
-        Pierre Ageron, conseiller général, 67 ans, domicilié aux Herbiers. Jean Lagniau, dont les recherches sur le Landreau font autorité, écrit qu’Henri Ageron (marié à une tante Martineau) a acheté le Landreau, et ajoute : « Il était fils du fermier général de la Grainetière qui fut un des grands profiteurs de la Révolution. Il a épousé Renée Martineau, parente du proconsul révolutionnaire de St Fulgent, et fut maire des Herbiers de 1807 à 1814. » (13) Le proconsul qu’il désigne n’est autre qu’Étienne Benjamin Martineau, père défunt de la mariée et révolutionnaire engagé. Il fut directeur exécutif près l’administration municipale du canton de Saint-Fulgent d’avril 1798 à la fin de 1799.

 Les descendants d’Olivier de Grandcourt (14) :


Olivier Gabriel Désiré Legras de Grandcourt et Adèle Félicité Martineau eurent un fils : Charles Désiré Legras de Grandcourt (1839-1918). Licencié en droit, il se maria aux Brouzils avec Marie Thiériot en 1864. Il aurait habité à Saint-Fulgent dans l’ancien hôtel du Chêne-Vert de l’aïeul Louis Guyet (15).

Motif d’un foulard utilisé à Paris lors 
de la campagne électorale de 1877
Charles de Grandcourt se présenta aux élections législatives de 1877, sous la bannière des républicains modérés, partisans de Thiers. Ses voix furent invalidées dans son canton. On les avait comptées comme nulles, au prétexte qu’il ne portait pas de prénom et qu’il y avait quatre Grandcourt dans le canton de Saint-Fulgent (16). Il obtint 4 935 voix, alors que Paul Bourgeois (Union des droites) fut élu avec 9 505 voix, sur 14 498 votantss, dans la circonscription de la Roche-sur-Yon. Charles de Grandcourt faisait partie de ces propriétaires de tendance libérale, comme l’avaient été les Guyet autrefois. La place de la religion dans la société, voire même sa propre légitimité, était devenue le critère principal pour départager le camp des libéraux et celui des conservateurs, la gauche de la droite, dira-t-on au 20e siècle. Pour tenir compte d’un électorat très catholique, il déclara cependant « respecter la religion, mais sans admettre la domination du clergé ».  Néanmoins son score avait été meilleur que celui de l'historien Dugast-Matifeux, du même bord républicain, l’année d’avant, n’ayant obtenu que 3 273 voix. On se souvient que ces élections avaient été provoquées par la dissolution de la chambre des députés par le président de la République, Mac Mahon.  Elles furent remportées par le parti des républicains, contre les monarchistes.

Plus tard il fut élu maire de Saint-Fulgent de 1885 à 1900.

Un article non signé paru dans Ouest-Eclair du 14 janvier 1927, intitulé « Au salon Yonnais : Amaury-Duval » (17), évoque son geste au moment de la démolition du château de Linières. L’auteur rend compte de l'ouverture de l'Exposition de peinture du Salon Yonnais cette année-là, où furent exposées de nombreuses œuvres d’Amaury-Duval. Il y évoque le château de Linières, sa démolition en 1912 et les œuvres de décorations murales qu’il contenait. Il écrit notamment : « Tous ces chefs-d’œuvre ne seraient pour la génération actuelle que souvenirs lointains et bientôt disparus, s'il ne s'était trouvé un homme, dont l'énergie a toujours été le propre de son caractère, qui, en apprenant que la pioche du démolisseur avait commencé la destruction des merveilles de Linières, s'y transporta aussitôt et se fit remettre deux magnifiques spécimens des fresques du hall dont il fit don au Musée de La Roche-sur-Yon.
L'homme qui a accompli ce « sauvetage » est feu M. Charles de Grandcourt, propriétaire à Saint-Fulgent. Les amateurs d'œuvres d'art et tous ceux qui aiment la Vendée lui en savent gré plus que jamais, maintenant que, grâce à son initiative … Le grand homme qui aima et illustra notre Vendée va reposer à tout jamais à notre Musée au milieu de ses œuvres (18) ».

Charles de Grandcourt eut quatre enfants :
-        Marguerite, qui épousa son cousin André Péaud en 1887. Il fut secrétaire général de la préfecture de la Vendée. 
-        Charles Alexis (1867-1940) qui fut magistrat à Cholet et à Angers et épousa Gabrielle Lardin de Musset (1876-1943), une petite-fille d’une sœur d’Alfred de Musset. Le célèbre poète et son frère Paul n’eurent pas  de descendance, et pour ne pas laisser s'éteindre le nom de Musset, leur neveu obtint l’autorisation par décret en 1867 d’ajouter à son nom celui de Musset. Paul de Musset fut un ami très proche d’Amaury-Duval, peintre et futur propriétaire de Linières. Charles Alexis de Grandcourt acheta aux enchères publiques en 1912 la Vachonnière (Verrie), ancien fief dont l’histoire remonte au 15e siècle. Ils eurent trois garçons, portant le nom de Grandcourt de Musset. D’abord Olivier, marié avec Denise Doublot. Puis Maurice, marié avec Anne de Curzon, et mort à la guerre en 1940. Et enfin Roger qui épousa Marie Antoinette de Rocca-Serra (19). 
-        Paul Constant (1869-1947), docteur en médecine, qui fut maire de Saint-Fulgent de 1928 à 1947 et avait épousé en 1898 Marie Alexandrine Berthier, princesse de Wagram (1877-1918) . La même année il acheta, grâce à la fortune de sa femme, le château de Saint-Fulgent à Arthur des Nouhes. Le père de ce dernier, Alexis des Nouhes, l’avaient acheté en ruine en 1841 et reconstruit l’actuel château dans un style inspiré du classicisme Louis XIII.
Marie Alexandrine Berthier, princesse de Wagram, avait été élevée après le décès de sa mère dans la région d'Angers par François, comte de Clary. La grand-mère de Marie Alexandrine, Zénaïde Clary deuxième princesse de Wagram et première duchesse de Wagram, était parente de ce dernier. Zénaïde Clary eut pour marraine Joséphine Tasher de la Pagerie (Madame Bonaparte et impératrice de France), et ses tantes Julie et Désirée Clary épousèrent respectivement Joseph Bonaparte roi d'Italie puis roi d'Espagne, et Bernadotte roi de Suède (20).

Paul Constant de Grandcourt (image mortuaire)
(source Archives de Vendée, 
Fonds Bousseau : 42 J/19)
Paul de Grandcourt a accueilli des enfants juifs dans sa commune, durant la seconde guerre mondiale, et leur fit fréquenter l'écoleIl était un ami personnel d’Annie Ardon, avec qui il avait fait naufrage en 1906 au Spitzberg, à 600 kms du pôle nord. Celle-ci épousa ensuite Philippe Pétain et lui fit connaître Paul de Grandcourt. Celui-ci devint ainsi un des ami du maréchal, le recevant souvent à Saint-Fulgent (21).

Sa fille Odette (1899-1983) s’est mariée en 1923 avec Louis de Hargues (1889-1967) et vécu à Saint-Fulgent, où tous les deux sont enterrés, ainsi que leur fille Monique, et deux autres filles jumelles et mortes jeunes. Ils vécurent au château de Saint-Fulgent, faisant partie de leur héritage plus tard (22).

M. Maupilier, historien de Saint-Fulgent, rappelle que Louis de Hargues était le descendant d’un héros royaliste de la Grande guerre de 1793. Le temps d’un paragraphe il souligne avec satisfaction ce mariage avec une descendante d’une Guyet et d’un Martineau, authentiques révolutionnaires de Saint-Fulgent à la même période (23).

-        Louis Charles (1878-1954) qui fut propriétaire à Saint-Fulgent et docteur en médecine (24). Il épousa Thérèse Allègre qui mourut jeune, puis Marguerite Meyrier. Son fils unique, Marcel, est mort accidentellement en 1949 lors d'une baignade à Enley (Angleterre) dans la Tamise, à l’âge de 23 ans (25).

Les descendants de Narcisse de Grandcourt


Narcisse Hyacinthe Legras de Grandcourt, et Élise Martineau eurent un fils unique, Eugène Narcisse Gabriel (1834-1883), avocat à Nantes. Il épousa le 1e mai 1855 à Mouchamps Élisabeth Mathilde Majou des Grois, d’une famille ancienne de la noblesse vendéenne. C’est lui qui fut représentant du propriétaire dans les actes de gestion du domaine de Linières à partir d’une date non repérée. Marcel de Brayer avait nommé son père en 1868, et c’est lui qu’Amaury-Duval choisit en 1875 (26), mais probablement ce dernier l’était-il déjà compte tenu de l’âge atteint par son père.

On imagine Eugène de Grandcourt attaché à Linières, où sa mère avait vu le jour. L’universitaire Véronique Noël-Bouton-Rollet fait remonter les premières difficultés du domaine à la mort accidentelle de ce régisseur ou fondé de pouvoir, en 1883, survenue deux ans avant la disparition d'Amaury‑Duval (27). Lors de la construction d’une grange dans sa borderie de la route de Chauché (près du cimetière de Saint-Fulgent), il fut victime de la chute d’une chèvre de charpentier (engin élévateur) (28).

Une plaque a longtemps marqué l’endroit où il a été tué, à 100 m environ du cimetière au bord du routin qui longeait la propriété du château sur le côté gauche en montant. La plaque vue le 18 mars 1974 par l’abbé Boisson, était fixée sur une pierre de grison, et portait une date seulement : « 28 avril 1883 ». L’état civil de Saint-Fulgent précise que la mort eut lieu à 8 h 30 du matin ce jour-là. En 2016 le routin a disparu après l’urbanisation de la zone. Les pierres le long du routin ont-elles été récupérées ? 

Comme son cousin Charles, Narcisse de Grandcourt était amateur de chevaux, remportant des prix aux concours organisés en Vendée, en particulier en 1868. À Saint-Fulgent il possédait 4 métairies au Plessis Richard, la Petite Valinière, le Bois Bertrand, la Coussaie, des bois et une borderie près du cimetière. À Mesnard il possédait la ferme de la Boule. L’ensemble faisait environ 280 ha (28).

Côté politique on ne lui connaît pas d’engagement. On sait seulement qu’en janvier 1871 il était abonné au journal « La France » (29). Ce dernier était la propriété d’Émile de Girardin, de tendance libérale à l’époque. On sait que l'épithètete n’avait pas le même sens alors que maintenant.

Eugène de Grandcourt
Il existe aux Archives départementales de la Vendée un portrait de lui, dessiné au crayon graphite (30). Il avait les cheveux coiffés à plat et en arrière, avec des tempes un peu dégarnies et un front bien dégagé. Il nous apparaît massif, dégageant une puissance de caractère imposante, une autorité certaine, les traits mobiles et fins, dans un visage enveloppé. Ses yeux, et ses sourcils en accent circonflexe, lui donnent un air d’observateur à qui rien ne semble échapper. Son menton volontaire et ses narines retroussées donnent l’impression d’un tempérament volontaire, peut être bagarreur. Bref le type d’avocat à choisir pour soi, plutôt que de le voir dans le camp adverse. Avec lui, le jeune poète Marcel de Brayer et le vieux peintre Amaury-Duval, qui se sont succédés comme propriétaires de Linières de 1868 à 1885, devaient avoir le régisseur idéal pour la gestion du domaine. Un habitant de Saint-Fulgent a rapporté à l’abbé Boisson, historien, une anecdote révélatrice le concernant, en 1974, près d’un siècle après sa mort : « Je voudrais mourir comme un bœuf disait-il. Il fut pris au mot et mourut par la chute d’une chèvre » (31).

Habitant à Saint-Fulgent, Narcisse de Grandcourt eut trois enfants :
     - Narcisse Gabriel (1856-1858),
     - Mathilde Émilie (1859-1944), épouse de Joseph Le Roux (qui fut conseiller général), frère du peintre nantais Charles Le Roux. Ils demeurèrent à la maison de Groix (Saint-Germain-de-Princay). Leur fille, Josèphe Le Roux, épousa Félix Hélie.

Eugène Jules de Grandcourt, avocat 
(source Archives de Vendée, 
Fonds Bousseau : 42 J/19)
     - Eugène Émile (1863-1936), qui vécut à Saint-Fulgent et épousa Juliette Légeron. Ces derniers eurent deux enfants :
              - Eugène Jules Émile, avocat (1892-1954) qui épousa le 21 septembre 1925 Marie Thérèse Fontaines, et vécut à Nantes où fut un avocat et bâtonnier du barreau de Nantes. Sa réputation attira les caricaturistes comme en témoigne le dessin qui fut publié dans le journal "Le Phare" du 14 juin 1941 (ci-contre). Ils eurent trois enfants : Hubert, Jacqueline et Jean Louis. Ce dernier posséda la maison dite Chêne-Vert, anciennement auberge du (31).
              - Suzanne Juliette, née en 1894, qui épousa le 15 mai 1922 Joseph Bousseau (32). Il était le généalogiste de la famille, et a légué un fonds d’archives intéressants aux Archives de la Vendée, coté : 42 J/19.







(1) M. Maupilier, Saint-Fulgent sur la route royale, (Hérault Éditions) 1989, page 229.
(2) Véronique Noël-Bouton-Rollet, Amaury-Duval (1808-1885). l’Homme et l’œuvre, thèse de doctorat en Sorbonne Paris IV (2005-2006), page 128.
(3) Testament de Mme Guyet-Desfontaines du 6 mai 1868, Archives nationales, notaires de Paris : MC/ET/XIV/898.
(4) Archives de Vendée, Fonds Bousseau et famille de Grandcourt : 42J/19, Constance Legras Grandcourt.
(5) Archives de Vendée, Etude de Frappier notaire de Saint-Fulgent, papiers Guyet : 3 E 30/138, bail de la métairie de Fontaine (Saint-Fulgent) du 17-8-1829 de J. Guyet à Hervé.
(6) Archives de Vendée, étude de Frappier notaire de Saint-Fulgent, papiers Guyet : 3 E 30/138, vente du 24-10-1827 du Bois de la Cure aux Landes Genusson à Maillard.
(7) Actes testamentaires de Marcellin Guyet-Desfontaines, Archives nationales, études notariales de Paris, Me Pitaux : MC/ET/XIV/850. 
(8) Archives de la Société Éduenne d’Autun, Fonds Amaury-Duval, lettre d’Élise M. Grandcourt du 9 janvier 1838 (K 8 34). Emma est l’épouse du député et Isaure la fille de cette dernière, née d’un premier mariage.
(9) Archives de Vendée, étude de notaire de Saint-Fulgent, Frappier, dossier Guyet : 3 E 30/138, bail de la Morelière du 15-3-1830 de Gourraud à Biret. Aussi lettre du 1e juillet 1841 du maire Pierre Rochereau au préfet de la Vendée, Archives de Vendée, édifices et services publics, mairie de Saint-André-Goule-d’Oie : 1 Ǿ 633.
(10) Déclaration de succession de Guyet-Desfontaines au bureau de Montaigu le 5 octobre 1857 (vue 98 à 101 au premier registre et vues 2 à 7 au deuxième registre suivant). Aussi état des lieux de la métairie de la Morelière en 1870 : Archives privées E. François. 
(10) Procuration du 5 décembre 1868 par M. de Brayer à M. de Gandcourt, Archives nationales, notaires de Paris : MC/ET/XIV/898.
(11) Archives de Vendée, Etat-civil de Saint-Fulgent, mariage Adèle Martineau et Olivier de Grandcourt du 9-2-1835 (vue 8/106).
(12) Archives de Vendée, Fonds Bousseau et famille de Grandcourt : 42J/19, Olivier Gabriel de Grandcourt et sa descendance.
(13) Jean Lagniau, Le Landreau en les Herbiers, (1971).
(14) Archives Départementales de la Vendée, J. Maillaud, Notes généalogiques (T 11), page 386 et s.
(15) R. Valette, Mémoires de la Société des antiquaires de l’Ouest (1885) page 309.
(16) Amblard de Guerry, Chavagnes communauté Vendéenne, Privat (1988), page 277.
(17) ouestfrance.cd-script.fr/opdf/1927/01/14/85/1927-01-14_85_04.pdf
(18) Allusion au don de L. de la Boutetière au musée de la Roche-sur-Yon, un portrait d’Amaury-Duval peint par son ami V. Mottez, le représentant dans le boudoir du château de Linières. Le tableau a été récemment restauré par le musée.
(19) Idem (12).
(20) correspondance privée du 16 décembre 2015.
(21) Idem (12).
(22) Comte de Grimoüard, Les Fortin de Saint-Fulgent et de Bellaton, Touraine, Saint-Domingue, Nantes dans la revue Généalogie et Histoire de la Caraïbe, Numéro 240, octobre 2010.
(23) M. Maupilier, Saint-Fulgent sur la route royale, (Hérault Éditions) 1989, page 248.
(24) www.famillesvendeennes.fr   
(25) Archives du diocèse de Luçon, fonds de l’abbé Boisson : 7 Z 20, notes sur la famille de Grandcourt.
(26) Procuration du 28 juin 1875 par M. Amaury Duval à M. de Grandcourt, Archives nationales, études notariales de Paris, Me Pitaux : MC/ET/XIV/936.
(27) Idem (2), page 73.
(28) Idem (25).
(29) Archives de la société Éduenne d’Autun, fonds Amaury Duval : K8-36, journal de Marcel de Brayer pour l'année 1871.
(30) Archives de Vendée, Georges Legeron, Figures de Vendée 64 portraits (1937), no 28.
(31) Archives historiques du diocèse de Luçon, fonds de l’abbé Boisson : 7 Z 32-3, Amaury-Duval et les derniers propriétaires de Linières, témoignage de Fulgent Aulneau.
(32) Archives de Vendée, G. de Raignac, Généalogies de diverses familles, 8 J 44 : famille Legras de Grandcourt.

Emmanuel François, tous droits réservés
Juillet 2013, complété en août 2021

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