jeudi 1 août 2013

La famille Proust de Saint-Fulgent et Saint-André-Goule-d’Oie

La famille Proust, établie à Saint-Fulgent, avait des ramifications à Saint-André-Goule-d’Oie, comme nous le montre le registre paroissial de cette dernière paroisse, et aussi le chartrier de la Rabatelière. Nous savons ainsi que Georges et Félix Proust sont propriétaires au village de la Milonnière, suivant deux déclarations roturières à Languiller, à cause de la seigneurie du Coin Foucaud, en 1606 et 1619. Félix Proust possédait des droits seigneuriaux de la Bergeonnière, et sa veuve, Perrine Pavageau, qui habitait le bourg de Saint-André, en fit l’aveu en 1627 (enfants : Pierre, Samuel, Jean et Elizabeth Proust). Ensuite on relève Pierre Proust propriétaire à la Bergeonnière avec sa femme Robine Thounard. Celle-ci fit une déclaration en 1651 à Languiller, étant alors veuve. Ils avaient eu François, Jean, Louis Pierre et Jeanne Proust (1). Demeurant à la Bergeonnière, Robine Thonard vendit une pièce de terre en 1654 pour le compte de son fils Louis Proust (2). À cause des dates connues ce Louis Proust n’est probablement pas celui que nous allons évoquer, mais peut-être un parent.

Louis Proust


De 1651 à 1683 on trouve un Louis Proust notaire aux Essarts et demeurant à Saint-André dans cette période, et aussi en 1688. Il est mort aux Essarts en 1707 (3). Il était sieur de La Barre et occupait les fonctions de :

-        procureur fiscal de la baronnie de Saint-Fulgent, c'est-à-dire des châtelains du lieu. Son rôle n’est pas facile à définir avec précision, suivant les époques, les lieux et les hommes. Mais en simplifiant il apparaît double : défenseur des intérêts du seigneur, en même temps accusateur public devant le tribunal seigneurial (en confondant les deux).

-        commissaire aux revues des troupes du roi à Saint-Fulgent (on dit aussi commissaire aux vivres). L’ancienneté dans l’emploi peut conduire à l’état de noblesse depuis Louis XIV. Ces commissaires sont aussi subdélégués de l’Intendant (de Poitiers) et s’occupent de tout ce qui concerne l’intendance des troupes dans son ressort : tenue des casernements, exécution des marchés d’approvisionnement, etc.

-        exempt de la maréchaussée générale du Poitou (équivaut à officier de gendarmerie). La maréchaussée était une institution ayant en charge la protection des personnes et le maintien de l’ordre en général. Elle pouvait également se voir confier des missions de police ainsi que la perception d’amendes.

-        notaire de Saint-Fulgent. Aux côtés de son collègue Arnaudeau il signe de nombreux actes entre 1684 et 1701. En particulier ils avaient été nommés, par le seigneur de Languiller, pour vérifier les titres de ses terres et fiefs en exécution des lettres de terrier obtenue par commission auprès d’un tribunal.
-    Il fut aussi greffier de la seigneurie de Languiller à Chauché en 1693 (4), et son procureur fiscal en 1695 (5).
Si les emplois de procureur fiscal, d’exempt de la maréchaussée et de notaire étaient achetés par leurs titulaires et pouvaient, dans certaines conditions, être transmis par héritage, les subdélégués de l’intendant étaient choisis par ce dernier et révocables par lui. La pratique du commerce des emplois publics sous l’Ancien Régime est bien connue et nous l’avons présentée dans notre article sur Charles Guyet (avril 2013). Bien sûr, les documents officiels font en même temps état du glorieux titre de « conseiller du roi », que portaient les fonctionnaires autrefois.

Louis Proust s’est marié, d’abord vers 1680 avec Marie Benoist. Cette famille Benoist a donné un notaire de Saint-Fulgent et un fermier de la famille de Vaugiraud, habitant la Valinière (Saint-Fulgent) à la fin du 17e siècle. On trouvait aussi à Saint-André-Goule-d’Oie vers la fin du 17e siècle, François Benoist sieur de la Prise, possédant des biens à la Javelière et Brossière. Il était fils de François Benoist et de Marie Chedanneau qui eurent leurs trois premiers enfants à Saint-Fulgent et les cinq suivants à Saint-André. Le fils était huissier habitant à Poitiers au départ, puis à la Brossière en 1687 (6), rejoignant ses parents. Le curé de Saint-Fulgent à partir de 1713, Jacques Benoist de la Caillaudière, appartenait à cette famille (voir Le dictionnaire des Vendéens dans le site internet des Archives de Vendée).

Louis Proust et Marie Benoist eurent au moins trois enfants : Louis Prosper né vers 1683, Marguerite née le 3 octobre 1685 à Saint-André-Goule-d’Oie (vue 85), et Christophe né vers 1688. Marie Benoist mourut vers 1690.

Louis Proust se maria une deuxième fois le 4 février 1691 (vue 115) à Saint-André-Goule-d’Oie avec Marie Daviceau, veuve de Pierre Arnaudeau, sieur de la Morinière, demeurant à la Forest-sur-Sèvre. À cette date il habitait dans le bourg de Saint-André. Marie Daviceau avait abjuré le protestantisme à Saint-Fulgent avec ses deux filles, Gabrielle et Marie. Sans entrer dans l’intimité de sa conscience, faute de documents appropriés, il faut néanmoins remarquer qu’à l’époque un fonctionnaire n’avait pas le droit d’être protestant ou d’épouser une protestante, sinon il perdait l’emploi qu’il avait dû acheter. Et si le protestantisme a été éradiqué à Saint-Fulgent, le zèle des fidèles de Grignon de Montfort a été aidé par une impitoyable politique de persécution de Louis XIV contre les protestants.

Marie Daviceau est présente sur le registre de Saint-André-Goule-d’Oie à un baptême du 25 avril 1695 où Marguerite Proust est marraine. Elle a été inhumée à Saint-Fulgent à l’âge de 60 ans.

Enfin Louis Proust se maria une troisième fois le 7 février 1707 à Saint-Fulgent avec Renée Cousturier, veuve de Jacques Chancelier, avocat au parlement et sénéchal (juge) de cette châtellenie de Saint-Fulgent.

Marguerite Proust


Luçon
Marguerite Proust, fille de Louis Proust, eut pour marraine à son baptême Marguerite Proust, probablement une tante. Celle-ci avait abjuré le protestantisme le mois précédent le baptême à Saint-André, soit le 22 septembre 1685 (vue 83). On relève une autre abjuration du protestantisme pour deux habitantes de la paroisse devant le père Roch de Mesnières, capucin prêchant le carême à La Rabatelière et paroisses adjacentes en 1659, au rapport de Louis Martin, vicaire de Saint-André. Elles s’appelaient Perrine et Jeanne Guilbaud (7). Les protestants semblent avoir été bien plus nombreux à Saint-Fulgent.

Marguerite Proust, fille de Louis Proust, s’est mariée à Saint-Fulgent le 4 mai 1711 (vue 15) avec Pierre Coutouly, receveur des décimes (taxes sur le clergé) du diocèse de Luçon (8), y demeurant. Il était fils de François Coutouly, bourgeois, et de Marguerite Collinet de la paroisse de Valdériès, diocèse d’Albi. Après avoir donné naissance à son fils Jean François (9) le 30 octobre 1712 à Luçon (l’évêque du lieu est parrain), elle mourut le mois d’après et fut inhumée à Luçon le 16 novembre 1712 (vue 105). Pierre Coutouly était aussi en 1713 maire perpétuel alternatif de Luçon (10), garde de son altesse royale (11) M. le duc d’Orléans, régent de France. Pour cela il était pourvu du titre d’écuyer, non transmissible. Il possédait une borderie au village de la Ridolière de Saint-André-Goule-d’Oie, qu’il a louée à François Fluzeau (habitant la Brossière) en 1743 (12).

Elle lui venait de sa femme Marguerite Proust, qui avait été marraine au baptême de Jean Cougnon, né le 19 janvier 1696 à Saint-André-Goule-d’Oie (vue 161). Les parents de Jean Cougnon étaient déjà métayers de la borderie de la Ridolière. Le frère de Jean Cougnon, Christophe, eut un fils prénommé Jacques, qui se maria avec Marie Chacun en 1750 et devint métayer de la Guérinière (Chauché), du domaine de Linières. Ce dernier couple donna naissance aux deux capitaines de paroisse de Saint-André-Goule-d’Oie pendant la guerre de Vendée, Christophe et François Cougnon. Voir notre article publié en janvier 2010 : Les frères Cougnon de St André Goule d'Oie.

Pierre Coutouly s’est remarié avec Marie François de la Sanglaire, faisant probablement partie de cette famille François de riches marchands nantais aux nombreuses ramifications. Ils étaient alliés à d’autres familles de la bourgeoisie nantaise : Monthullé, Descasaux, Darquistade, Sarsfield, Ducassia.

Au baptême du premier enfant de Pierre Coutouly et de Marie François le 24 juillet 1716 à Luçon (vue 81), Joachim, le parrain est Joachim Descazaux, dont la mère s’appelait aussi Marie François, une parente. C’était un important négociant et armateur nantais. Pour le baptême du deuxième enfant, Pierre Louis, le 23 aout 1717 (vue 105), la marraine est Françoise Sarsfield, épouse de Joachim Descazaux, écuyer seigneur du Hallay. Sa mère s’appelait Guyonne François, aussi parente.

Par héritage de Marguerite Proust, les Coutouly ont possédé aussi des biens à Saint-Fulgent. On trouve ainsi une rente due à un Coutouly, médecin à Luçon, en 1762, pour deux pièces de terre situées à la limite du bourg de Saint-Fulgent (13).

Christophe Proust


Christophe Proust, frère de Marguerite, sieur de Villeneuve (14), fut exempt de la maréchaussée générale du Poitou. Il mourut jeune et fut inhumé le 4 mai 1713 à Saint-André-Goule-d’Oie, âgé de 25 ans. Son fils, Christophe Prosper Proust, naquit à Saint-Fulgent le mois d’après son décès, le 6 juin 1713, de Marie Rassineau. Il fut lui aussi inhumé dans l’église de Saint-André le 28 janvier 1739 (vue 201). Il était décédé muni des sacrements de l’église en présence du curé et du vicaire de Saint-Fulgent, précise l’acte de sépulture.

Cette famille Proust représente à sa manière le basculement de Saint-André-Goule-d’Oie dans la sphère d’influence de Saint-Fulgent à partir des 16e/17e siècles. La paroisse était née au Moyen Âge dans l’orbite des baronnies des Essarts et de Montaigu. Puis en pleine guerre de Cent-Ans et de guerre de succession de Bretagne au milieu du 14e siècle, toute la paroisse avait basculé dans la mouvance des Essarts, avec les seigneurs du Coudray et du Coin, avec aussi des proches voisins, les seigneurs de la Mancellière, de la Boutarlière et de Linières, vassaux du baron des Essarts. À cette époque dominait le pouvoir politique des seigneurs. Une nouvelle influence va se faire sentir ensuite, venant du bourg tout proche de Saint-Fulgent. Y habitaient des bourgeois devenus de plus en plus indispensables aux habitants : notaire, chirurgien, maître de poste, ainsi que des fonctionnaires du roi, grignotant en partie l’influence des seigneurs. Et ces nouveaux notables vont aller se constituer une part de leur patrimoine dans la paroisse voisine de Saint-André-Goule-d’Oie. C’est ce que nous observons avec la famille Proust.

Louis Prosper Proust


Saint-Fulgent
Le frère aîné de Marguerite et Christophe, Louis Prosper Proust, né vers 1683, fut licencié ès lois, avocat au parlement, commissaire aux revues des troupes de sa majesté majesté et subdélégué de l’Intendant de cette province en 1720 à Saint-Fulgent, exempt de la maréchaussée générale du Poitou, sénéchal de Saint-Fulgent et de Bazoges-en-Paillers, (15) et sénéchal de la baronnie des Essarts. Il a été inhumé le 22 mai 1745 à Saint-Fulgent (vue 84), où il avait épousé :

-        Vers 1710 Louise Quelier (qui y fut inhumée le 29 juin 1713), ayant eu Louis Pierre Proust né le 23 juin 1713, baptisé dans cette paroisse le lendemain, et où il y fut aussi inhumé le 28 juin 1713 (vue 48).

-        Le 18 juin 1716 à Luçon Perrine Daïherre (vue 79). Elle était la fille de David Daïherre et de Perrine François. Elle était veuve du chirurgien Le Loup de Saint-Fulgent (16). Ils eurent 12 enfants nés à Saint-Fulgent entre 1725 et 1736.

Louis Prosper Proust conserva des liens étroits avec Pierre Coutouly, le mari de sa sœur. Quand celui-ci se fut remarié avec Marie François (probable parente de la mère de Perrine Daïherre), il invita son beau-frère au baptême de son premier fils, Joachim, à Luçon le 24 juillet 1716 (vue 81). Le parrain ne pouvant être présent ce jour-là, il lui demanda de tenir l’enfant en son nom sur les fonts baptismaux. De même pour le baptême du deuxième enfant Coutouly, Pierre Louis, le 23 août 1717 (vue 105), le parrain est Louis Prosper Proust, sieur de la Barre. La marraine est Françoise Sarsfield, épouse de Joachim Descazeaux, écuyer seigneur du Hallay. En l’absence de cette dernière, l’enfant est tenu sur les fonts baptismaux par Françoise Daïherre, la deuxième épouse de Louis Prosper Proust.

Ainsi sont nées les liens entre le sénéchal et notaire de Saint-Fulgent avec le futur châtelain des lieux, Joachim Descazeaux. Ils ont été assez proches pour que Françoise Sarsfield soit la marraine de Françoise Proust, la fille de Louis Prosper Proust et de Perrine Daïherre, le 2 juillet 1718 à Saint-Fulgent (vue 68). Le parrain est alors Pierre Coutouly.

En 1720 Joachim Descazeaux acheta la seigneurie de Saint-Fulgent pour 122 700 livres. Elle était à vendre après la condamnation à mort par contumace de son jeune seigneur, Louis Gabriel Charles Gazaux, coupable de l’assassinat de Charles Daniel de Montsorbier demeurant à la Brallière (Boulogne). Il est très probable que le sénéchal de Saint-Fulgent ait aidé l’acquéreur dans sa démarche.

Château de Saint-Fulgent construit au 19e siècle
Au baptême de leur quatrième fille, Henriette Proust, le 29 mars 1724 à Saint-Fulgent (vue 17), la marraine est la deuxième femme de Joachim Descazaux : Henriette de Briquemault, marquise de Férole, alliée par les Orléans à la famille royale. Le parrain est le neveu par alliance de J. Descazeaux, René Darquistade, seigneur de la Maillardière. Joachim Descazeaux est alors indiqué comme seigneur de Saint-Fulgent. Au baptême de Pierre-Henri-Benoît Proust, le 22 octobre 1734 (vue 95), le parrain est Pierre Henri Benoît Darquistade, fils de René. Le curé précise dans l’acte de baptême que le parrain est « seigneur de ces lieux ». Ce n’est qu’une vérité anticipée puisque le parrain n’est âgé que de 12 ans, même si l’oncle Joachim Descazeaux n’est décédé que depuis deux ans. En réalité c’est le père, René Darquistade, qui hérita de son oncle par alliance de la seigneurie de Saint-Fulgent en 1732.

C’est Louis Prosper Proust qui conseilla Pierre de Vaugiraud, habitant Bazoges-en-Paillers, pour gérer l’héritage de Claude Moreau, sieur du Coudray, qui était ruiné. Pour cela il fut nommé curateur à la personne et aux biens de René François Joseph de Vaugiraud, M. de Rosnay (17). Voir notre article publié en août 2014 : La famille de Vaugiraud à Saint-André-Goule-d’Oie.

C’est également lui qui conseilla Joachim Descazeaux, puis René Darquistade, les deux seigneurs successifs de Saint-Fulgent, dans leur prétention contre le seigneur de Languiller, d’être le seigneur de la Boutinière, Chevaleraye et Javelière à Saint-André-Goule-d’Oie.

Il acheta le quart des droits seigneuriaux du fief de la Machicolière à St André, le seigneur de la Boutarlière, qui en possédait déjà la moitié, achetant l'autre quart.

Louis Prosper Proust était possesseur des redevances seigneuriales des fiefs de la Guierche et Barillière en la paroisse de Vendrennes. Pour cette raison un aveu ou déclaration lui fut rendu le 26 juillet 1728 par Jean et Mathurin Brisseau, demeurant à la Brossière (18).

Le 26 décembre 1732 il fit un échange avec François Fluzeau (agissant pour lui, pour François Fluzeau son père et Jean Fluzeau son frère). Proust céda sa métairie de la Brossière, et Fluzeau céda ses contrats de constitution de cheptel sur Henri Favereau et sa mère, Marie Goupil de la Surelière (18).

On sait qu’après sa mort, ses enfants vendirent sa maison à Simon Charles Guyet. Elle était située au milieu du bourg de Saint-Fulgent, le long de la Grande rue, c’est-à-dire du Grand Chemin de Nantes à la Rochelle, sur le côté ouest. Avec son jardin et sa cour elle occupait un espace de près d’un hectare, enclos de murs, et proche de l’auberge du Lion d’Or. De sa cour d’entrée séparée de la rue par un mur, on pénétrait d’abord sous une galerie donnant accès à la maison. Il y avait quatre pièces à l’étage et quatre pièces à vivre au rez de chaussée, plus : cuisine, boulangerie, décharge, grenier, cellier, grange, écurie, toits, basse-cour, cave (portant au-dessus un grenier et une chambre). Sur un côté de la maison la galerie longeait un jardin qui s’étendait aussi à l’arrière (19).

Louis Proust possédait l’hôtel du Lion d’Or dans le bourg de Saint-Fulgent (19). Les magistrats à cette époque pouvaient faire du commerce. 

La veuve et les enfants de Louis Prosper Proust


Perrine Daïherre, devenue veuve en 1745, arrenta le 23 janvier 1753 au nom de Jean François Coutouly, prêtre et chanoine à Luçon, à titre de rente foncière annuelle et perpétuelle de 20 livres, à Jacques Bordron, une borderie située à Villeneuve (près du bourg de Saint-André). Elle contenait environ 7,7 hectares et son métayer s’appelait Jean Chaigneau. Jean François Coutouly l’avait eu en héritage d’un cousin Proust (20). En 1771 le chanoine est syndic du chapitre de Luçon, c'est-à-dire son représentant dans les affaires et les biens gérés par le chapitre (21).

Perrine Daïherre assista au mariage de son fils, Joachim Proust de la Barre, à Nantes 18 février 1754, avec Yvonne Lafitte, veuve de Louis Guerineau capitaine de navire, domiciliée en la paroisse de Saint Nicolas. Il était capitaine sur les vaisseaux marchands, en 1763 sur « la Pinière », et possédait toujours des biens fonciers à Saint-André-Goule-d’Oie (22). Il mourut le 14 septembre 1786 en son domicile de l’Isle Feydeau, âgé d’environ 66 ans.

Le 17 juin 1754 on lit sur le registre de la paroisse de Saint Nicolas à Nantes l’inhumation au cimetière de Louis Prosper Jean François Proust de la Barre, âgé d’environ 18 ans, fils de Louis Prosper Proust et Perrine Daïherre. Sont notés présents ses frères Joachim Proust de la Barre et Michel François Proust, prêtre.

Perrine Daïherre, mourut à l’âge de 56 ans et fut inhumée dans l’église de Saint-Fulgent le 2 janvier 1755 (vue 38).

En 1765, François Proust de la Barre, demeurant à Luçon, lui aussi chanoine de l’église cathédrale de Luçon, donne pouvoir à sa sœur, Henriette Proust de la Barre, pour arrenter une borderie à la Courpière de Saint-Fulgent (23). Le même avait affermé le 24 septembre 1763 pour 7 ans à Pierre Marteau les domaines dépendant de la chapelle des Suandeau (desservie en l'église de Saint-Fulgent), dont il était le chapelain, et qui se trouvaient au village de Doulay. Il conserva cette chapellenie jusqu’en 1782 (24).

Henriette Proust de la Barre affermait la métairie de la Coussaie dépendant du prieuré de Saint-Fulgent. Elle la sous-afferma pour 7 ans le 21-11-1762 à Pierre Sire (25).


(1) Déclaration noble du 10-7-1651 de Robine Thounard à Languiller pour la Bergeonnière, Archives de la Vendée, chartrier de la Rabatelière : 50 J/G 114.
(2) Vente du 20-12-1654 par Robine Thounard d’une pièce de terre, Archives de la Vendée, transcriptions par Guy de Raignac des archives de la Barette : 8 J 87-2, page 171.
(3) Archives de Vendée, notes généalogiques de J. Maillaud, tome 19.
(4) Archives de Vendée, chartrier de Roche-Guillaume, famille Moreau : 22 J 29, mémoire de Prosper Moreau contre Chitton du 4-5-1693 sur des fiefs de Saint-André au sénéchal de Fontenay.
(6) Archives de Vendée, chartrier de la Rabatelière : 150 J/G 40, assignation du 15-1-1687 pour faire sa déclaration de biens à la requête du seigneur de Languiller.
(7) Archives diocésaine de Luçon, Chroniques paroissiales, 1ière série, La Rabatelière, Arch. dép. Vendée, 4 num 503 39, vue 19/32.
(8) Il percevait la taxe due au roi par l’église sur ses propres revenus, comme par exemple les revenus du prieuré de Saint-André-Goule-d’Oie sur sa métairie de Fondion.
(9) Jean François Coutouly de la Vergne, nommé à Luçon le 1-1-1730, sous-chantre à Luçon le 1-1-1733, sous-doyen à Luçon le 1-1-1738 et décédé à Sainte-Hermine le 4-10-1787 (Dictionnaire des Vendéens dans le site internet des Archives de Vendée).
(10) Louis XIV avait créé l’office de maire perpétuel, acheté par ses titulaires à l’État, après avoir supprimé l’élection en vigueur pour désigner le titulaire de cette fonction, dans les villes. Elle correspondait à la fonction de syndic dans les paroisses de campagne. Toujours pour faire rentrer l’argent dans les caisses, le roi crée en 1706 les maires alternatifs triennaux. L’office était acheté pour trois ans et un autre titulaire succédait au précédent. En 1714 on supprima ces offices, qui furent remboursés à leurs titulaires par les villes ! En 1717 on rétablit l’élection des maires, mais suivant des modalités peu démocratiques au regard des critères modernes. Pour camoufler ses motifs financiers dans la création de l’office de maire perpétuel, le roi n’hésita pas à argumenter en politicien de mauvaise foi. Qu’on en juge : « Afin d'éviter cabales et brigues et dans le but de mettre de l'ordre, l'édit de 1662, en faisant acheter la charge, n'aurait plus à craindre ni les électeurs, ni les élus...et devrait remédier aux abus de toutes sortes, notamment en ce qui concerne les prétentions des juges qui voudraient souvent s'attribuer la charge de Maire. » Cette charge (qui succédait aux élections jusque-là en vigueur) était transmissible aux héritiers. La langue de bois et la mauvaise foi n’est pas propre à Louis XIV. Ces discours sont bien utiles pour qui veut influer sur autrui, même de la part d’un pouvoir dit « absolu ».
(11) Cet emploi était vraisemblablement fictif, comme nous l’avons vu dans notre article sur Charles Guyet (avril 2013).
(12) Archives départementales de la Vendée, Don Boisson : 84 J 30, bail Coutouly et Fluzeau du 4-12-1743.
(13) Archives de Vendée, notaire de Saint-Fulgent, Frappier : 3 E 30/ 3, acquêt de C. Guyet à René Goisneau de 2 pièces de terre le 19-10-1762.
(14) Villeneuve, comme la Barre, étaient des noms de lieux assez répandus dans la région, aussi nous est-il difficile de savoir ici, de quel Villeneuve il s’agit.
(15) L’Intendant était le représentant du roi dans la Généralité du Poitou, nouvelle organisation administrative renforcée par Louis XIV. Et les officiers seigneuriaux et municipaux de Saint-Fulgent (1700-1830), Archives du diocèse de Luçon, fonds de l’abbé Boisson : 7 Z 16.
(16) Maurice Maupilier, Des étoiles au Lion d’Or, Saint-Fulgent sur la route royale, Hérault-Éditions, 1989, page 104.
(17) Archives de Vendée, chartrier de Roche-Guillaume, famille Moreau : 22 J 29, mémoire sur la succession Prosper Moreau pour de Vaugiraud de Rosnais après 1745.
(18) Archives historiques du diocèse de Luçon, fonds de l’abbé Boisson : 7 Z 21, famille Proust. Voir aussi : Archives de la Vendée, notaires de Saint-Fulgent, Frappier : 3 E 30/3, ferme du 21-11-1762 de la métairie de la Coussaie (Saint-Fulgent) dans les actes notariés des fermes.
(19) Archives du diocèse de Luçon, fonds de l’abbé Boisson : 7 Z 13, aveu du 23-6-1774 de Saint-Fulgent à la vicomté de Tiffauges, transcrit par Paul Boisson, page 41.
(20) Idem (18).
(21) Archives de Vendée, Delhommeau, Fichier historique du diocèse de Luçon : 1 Num 47/265 (vue 59).
(22) Idem (18).
(23) Archives de Vendée, notaires de Saint-Fulgent, Frappier : 3 E 30/4, procuration du 17-11-1765 de François Proust à Henriette Proust,
(24) Archives de la Vendée, notaires de Saint-Fulgent, Frappier : 3 E 30/3, ferme du 21-11-1762 de la métairie de la Coussaie (Saint-Fulgent). Et Frappier : 3 E 30/10, ferme du 6-5-1782 de la borderie de la chapellenie du Suandeau à Doulay (Saint-Fulgent) par Proust de la Barre à René Maindron.
(25) Archives de la Vendée, notaires de Saint-Fulgent, Frappier : 3 E 30/3, ferme du 21-11-1762 de la métairie de la Coussaie.

Emmanuel François, tous droits réservés
Août 2013, complété en décembre 2023

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lundi 1 juillet 2013

Les cousins de Grandcourt de Saint-Fulgent

À la page 162 de mon livre, Les châtelains de Linières à Saint-André-Goule-d’Oieon voit « M. de Grandcourt chargé des pouvoirs de Mme Guyet » en 1870, à l’occasion d’un état des lieux au moment du changement de métayers à la Morelière, faisant partie du domaine de Linières. Je rappelle alors les liens existants entre les Guyet et les de Grandcourt, remontant au mariage de Narcisse de Grandcourt avec Élise Agathe Martineau en 1833. Revenons sur ces liens qui ont été importants entre ces familles au cours du 19e siècle. Quand le château de Linières fut démoli en 1912, Paul et Charles de Grandcourt essayèrent de sauver des fragments de fresques des murs et les donnèrent au musée de la Roche-sur-Yon, en vue de leur conservation.

L’histoire de ce cousinage commence à Paris.

Pierre Legras, dit Legras de Grandcourt, a été loueur de carrosses en 1789 (1) et est devenu ensuite fonctionnaire. Il occupa un poste d’inspecteur des contributions directes et mourut à Paris en 1829. On sait que Joseph Guyet, le propriétaire de Linières de 1800 à 1830, fut fonctionnaire au ministère des Finances de l’époque. Peut-être y a-t-il eu un lien entre eux à partir de leurs vies professionnelles.
Pierre Legras de Grandcourt se maria avec Gabrielle Constance Gratien (morte en 1815), dont le frère Pierre Guillaume Gratien (1764-1814) fut général et baron d’empire. Cet illustre beau-frère a son importance, car les deux neveux, Olivier et Narcisse de Grandcourt de Saint-Fulgent, ont hérité d’une partie de sa fortune plus tard. Pour les combattants vendéens aussi il a son importance : il était sous les ordres de Hoche en cantonnement en 1793 à Chantonnay, et quand celui-ci essayait de capturer Charette au début de 1796.

Le couple eut trois enfants, une fille et deux garçons.

Constance Legras de Grandcourt


Amaury-Duval : 
portrait de Constance Franco
La fille, Constance Legras de Grandcourt (1796-1877), épousa en 1833 Joachim Franco (1785-1865), né au Portugal, et chef de bataillon au 107e régiment d’infanterie de ligne, domicilié à Metz un temps, ville de garnison. Amaury-Duval a dessiné un portrait de Constance Franco, actuellement au musée des Beaux‑Arts de Lyon. Il porte la dédicace suivante : « à Madame Franco souvenir affectueux Amaury‑Duval Linières 1871 ». Pendant les événements de la guerre de 1870, elle s'occupa de surveiller la rue de Tivoli et l'atelier de la rue Saint‑Lazare (où habitait et travaillait le peintre) et en rendit compte à Amaury‑Duval qui était à Linières (2). Son mari est mort à Marly-le-Roi en 1866, voisin des Guyet-Desfontaines, propriétaires de Linières. Dans son testament de 1868, Mme Guyet-Desfontaines lui lègue la gratuité d’un logement, augmenté d’une petite rente annuelle de 14 F (3). Marcel de Brayer demandera à son grand-oncle dans son propre testament en 1875 de continuer l’aide à Mme Franco. La pauvre femme a été victime de ce qu’elle appela « l’affreux pillage de 70 » à Paris. Elle a fini sa vie chichement dans une maison louée dans le 17e arrondissement, ayant perdu, de plus, une partie de la pension militaire de son mari. Ses frères de Saint-Fulgent ont payé le petit déficit de sa succession, pour que ses legs mobiliers puissent être honorés (4).

Le cousinage des de Grandcourt avec les châtelains de Linières est né à Saint-Fulgent chez Mme Martineau, la sœur de Joseph Guyet. C’est chez Étienne Martineau était mort au mois de novembre dernier et il l’avait probablement vu pour la dernière fois en octobre 1827 (6). Lui-même est à Saint-Fulgent pour la dernière fois, car il mourra à Paris au mois de mai suivant. La première des filles Martineau, Rose, était déjà mariée au juge de paix Gourraud depuis 1825, mais ses deux autres sœurs, Élise et Adèle, étaient toujours célibataires. On sait qu’Adèle épousera un facteur des Halles de Paris en 1831. Peut-être a-t-on parlé mariage des enfants entre le frère et la sœur, entre Joseph Guyet et Catherine Martineau ? Toujours est-il que c’est de Paris que sont venus les deux garçons de Grandcourt, Olivier et Narcisse, qui furent des militaires ayant choisi de se marier tard. Et ils se marièrent à Saint-Fulgent avec les sœurs Martineau.

Narcisse Hyacinthe Legras de Grandcourt


Le premier mariage eut lieu le 14 octobre 1833 (vue 240) entre Narcisse Hyacinthe Legras de Grandcourt (1793-1880), comme son nom est écrit sur le registre d’état civil de Saint-Fulgent, et Élise Agathe Martineau (1799-1875). Le marié est alors âgé de 39 ans et habite Cahors, étant chef de bataillon au 57e régiment d’infanterie de ligne en garnison à Agen. Son oncle, le général Gratien, a pourvu à son éducation militaire. Il est né à Paris le 18 janvier 1794, rue de la Martellière dans le 9e arrondissement. Entré à l’école militaire de Saint-Cyr en 1812, il est lieutenant en 1815, capitaine en 1818, chef de bataillon en 1830, et prendra sa retraite comme lieutenant-colonel. Il reçut le diplôme de chevalier de Saint-Louis en 1823 et la médaille de Sainte-Hélène. Élise Martineauâgée de 32 ans, est née à Linières le 8 janvier 1799 (selon son acte de mariage), et son père, le docteur Benjamin Martineau, est déjà mort à Saint-Fulgent en 1828.

Son cousin Guyet-Desfontaines avait compté Élise Martineau parmi ses trois héritiers, avec son frère de Palluau, Benjamin Charles Martineau, quand il fit un testament en 1833, deux ans après son mariage et avant d’entreprendre un voyage. Il est assez probable que ceux-ci n’en surent jamais rien, mais voilà qui révèle bien la force de leurs liens familiaux (7).

Élise Martineau a pu compter, sur les relations de son cousin député (Guyet-Desfontaines), à qui elle écrit quelques jours après la mort de sa mère, le 9 janvier 1838 (« Mon bon Marcellin »), lui demandant d’intervenir auprès du ministre de la Guerre pour son mari. Celui-ci finissait un congé de trois mois en demi-solde à Saint-Fulgent en cette fin d’année 1837, alors que sa belle-mère était au plus mal. Il avait obtenu une prolongation d’un mois, mais sans solde.

Narcisse Hyacinthe de Grandcourt 
(source Archives de Vendée, 
Fonds Bousseau : 42 J/19)
Alors Élise demande à son cousin de lui obtenir cette prolongation en demi-solde : « Rends-nous donc le service de faire des démarches près du ministre de la guerre pour que cette prolongation de congé que nous t’envoyons, nous soit accordée avec demi-solde ». D’autant que son mari, « comme électeur, aurait dû venir aux élections à solde entière, et que par le fait il s’y ait trouvé avec la demi-solde de congé ». Et puis elle ajoute dans sa lettre : « Persuadée que tu ne trouveras au ministère que des notes favorables, et très favorables, pour Narcisse, j’ai plus de hardiesse à te prier de faire des démarches pour lui. En même temps que tu solliciteras ce congé en demi-solde, tu seras à même de te convaincre s’il est proposé pour de l’avancement. »

Cette demi-solde est d’autant plus la bienvenue qu’après la mort de sa mère, il faut procéder aux partages de l’héritage, ce qui entraîne des soucis de placements d’argent : « Sans prévoir une mort aussi précipitée, Narcisse et moi avions fait ces temps derniers un placement de 9 000 Frs. Et pour satisfaire aux obligations du testament de notre mère, nous voilà dans une position fort gênée, et contraints de  vendre aujourd’hui pour 12 000 francs d’actions et de rentes afin d’en terminer promptement. » Le cousin député méritera bien l’expression ainsi de ses meilleurs sentiments : « Permets-moi de te faire nos adieux en t’embrassant ainsi qu’Emma et Isaure du plus profond de notre cœur. Je me repose sur ton cœur et ton amitié pour nous servir. Ta dévouée amie et cousine. » (8)

Narcisse Grandcourt fut choisi par Guyet-Desfontaines pour gérer le domaine de Linières en remplacement de Joseph Alexandre Gourraud (1791-1853), mari de Rose Martineau, une sœur d’Élise. Celui-ci était juge de paix du canton de Saint-Fulgent et habitait Chavagnes. En 1841 il était intervenu pour représenter Guyet-Desfontaines auprès de la municipalité de Saint-André-Goule-d’Oie (9).  Après le décès de Gourraud, ce dernier passa la même année en 1853 un acte de procuration à Narcisse Grandcourt, renouvelé ensuite par Mme Guyet-Desfontaines en 1857 (10). D’ailleurs celle-ci lui légua un capital de 20 000 F en usufruit dans son testament, en reconnaissance de l’intérêt porté par Narcisse Grandcourt et Élise Martineau aux affaires de Linières. Leur fils, Eugène de Grandcourt, en reçu la nue-propriété 10). Et Marcel de Brayer renouvela en 1868 la procuration donnée à Narcisse Grandcourt pour s’occuper de Linières (11).

Élise Agathe Martineau est décédée le 8 avril 1875 à Saint-Fulgent. La déclaration de sa succession a été faite au bureau de Montaigu le 20 septembre 1875 (vues 47 à 49 sur le registre numérisé). Narcisse Hyacinthe est décédé à Saint-Fulgent le 25 septembre 1880.

Olivier Gabriel Désiré Legras de Grandcourt


Le deuxième mariage eut lieu deux ans plus tard le 9 février 1835 à Saint-Fulgent (vue 8) entre Olivier Gabriel Désiré Legras de Grandcourt et Adèle Félicité Martineau. Le marié est âgé de 46 ans et habite Montrouge, alors qu’il est capitaine adjudant-major au 4e régiment de chasseurs en garnison à Sedan. Il est né à Paris le 21 juin 1789 et mourra à Saint-Fulgent le 6 décembre 1878. Il fut décoré sur le champ de bataille de Hainaut par Napoléon en 1813 de la légion d’honneur. Napoléon III lui remit la rosette d’officier de la légion d’honneur au jour de l’inauguration en 1854 de la statue de Napoléon à la Roche-sur-Yon, dont il avait présidé le comité d’érection (12). Adèle Martineau est âgée de 33 ans le jour de son mariage : née à Saint-Fulgent le 7 janvier 1802, elle y mourra le 20 juin 1868. Lors de son mariage, elle est veuve de Marie Adrien Aimé Bunel, facteur aux halles aux farines à Paris, décédé le 23 mars 1831. Un facteur aux Halles était un agent officiel, chargé de la vente en gros des denrées à la criée. Les témoins au mariage sont :
-        Narcisse, le frère du marié, domicilié au bourg de Saint-Fulgent,
-        Benjamin Charles Martineau, frère de la mariée et juge de paix à Palluau,
-        Pierre Ageron, conseiller général, 67 ans, domicilié aux Herbiers. Jean Lagniau, dont les recherches sur le Landreau font autorité, écrit qu’Henri Ageron (marié à une tante Martineau) a acheté le Landreau, et ajoute : « Il était fils du fermier général de la Grainetière qui fut un des grands profiteurs de la Révolution. Il a épousé Renée Martineau, parente du proconsul révolutionnaire de St Fulgent, et fut maire des Herbiers de 1807 à 1814. » (13) Le proconsul qu’il désigne n’est autre qu’Étienne Benjamin Martineau, père défunt de la mariée et révolutionnaire engagé. Il fut directeur exécutif près l’administration municipale du canton de Saint-Fulgent d’avril 1798 à la fin de 1799.

 Les descendants d’Olivier de Grandcourt (14) :


Olivier Gabriel Désiré Legras de Grandcourt et Adèle Félicité Martineau eurent un fils : Charles Désiré Legras de Grandcourt (1839-1918). Licencié en droit, il se maria aux Brouzils avec Marie Thiériot en 1864. Il aurait habité à Saint-Fulgent dans l’ancien hôtel du Chêne-Vert de l’aïeul Louis Guyet (15).

Motif d’un foulard utilisé à Paris lors 
de la campagne électorale de 1877
Charles de Grandcourt se présenta aux élections législatives de 1877, sous la bannière des républicains modérés, partisans de Thiers. Ses voix furent invalidées dans son canton. On les avait comptées comme nulles, au prétexte qu’il ne portait pas de prénom et qu’il y avait quatre Grandcourt dans le canton de Saint-Fulgent (16). Il obtint 4 935 voix, alors que Paul Bourgeois (Union des droites) fut élu avec 9 505 voix, sur 14 498 votantss, dans la circonscription de la Roche-sur-Yon. Charles de Grandcourt faisait partie de ces propriétaires de tendance libérale, comme l’avaient été les Guyet autrefois. La place de la religion dans la société, voire même sa propre légitimité, était devenue le critère principal pour départager le camp des libéraux et celui des conservateurs, la gauche de la droite, dira-t-on au 20e siècle. Pour tenir compte d’un électorat très catholique, il déclara cependant « respecter la religion, mais sans admettre la domination du clergé ».  Néanmoins son score avait été meilleur que celui de l'historien Dugast-Matifeux, du même bord républicain, l’année d’avant, n’ayant obtenu que 3 273 voix. On se souvient que ces élections avaient été provoquées par la dissolution de la chambre des députés par le président de la République, Mac Mahon.  Elles furent remportées par le parti des républicains, contre les monarchistes.

Plus tard il fut élu maire de Saint-Fulgent de 1885 à 1900.

Un article non signé paru dans Ouest-Eclair du 14 janvier 1927, intitulé « Au salon Yonnais : Amaury-Duval » (17), évoque son geste au moment de la démolition du château de Linières. L’auteur rend compte de l'ouverture de l'Exposition de peinture du Salon Yonnais cette année-là, où furent exposées de nombreuses œuvres d’Amaury-Duval. Il y évoque le château de Linières, sa démolition en 1912 et les œuvres de décorations murales qu’il contenait. Il écrit notamment : « Tous ces chefs-d’œuvre ne seraient pour la génération actuelle que souvenirs lointains et bientôt disparus, s'il ne s'était trouvé un homme, dont l'énergie a toujours été le propre de son caractère, qui, en apprenant que la pioche du démolisseur avait commencé la destruction des merveilles de Linières, s'y transporta aussitôt et se fit remettre deux magnifiques spécimens des fresques du hall dont il fit don au Musée de La Roche-sur-Yon.
L'homme qui a accompli ce « sauvetage » est feu M. Charles de Grandcourt, propriétaire à Saint-Fulgent. Les amateurs d'œuvres d'art et tous ceux qui aiment la Vendée lui en savent gré plus que jamais, maintenant que, grâce à son initiative … Le grand homme qui aima et illustra notre Vendée va reposer à tout jamais à notre Musée au milieu de ses œuvres (18) ».

Charles de Grandcourt eut quatre enfants :
-        Marguerite, qui épousa son cousin André Péaud en 1887. Il fut secrétaire général de la préfecture de la Vendée. 
-        Charles Alexis (1867-1940) qui fut magistrat à Cholet et à Angers et épousa Gabrielle Lardin de Musset (1876-1943), une petite-fille d’une sœur d’Alfred de Musset. Le célèbre poète et son frère Paul n’eurent pas  de descendance, et pour ne pas laisser s'éteindre le nom de Musset, leur neveu obtint l’autorisation par décret en 1867 d’ajouter à son nom celui de Musset. Paul de Musset fut un ami très proche d’Amaury-Duval, peintre et futur propriétaire de Linières. Charles Alexis de Grandcourt acheta aux enchères publiques en 1912 la Vachonnière (Verrie), ancien fief dont l’histoire remonte au 15e siècle. Ils eurent trois garçons, portant le nom de Grandcourt de Musset. D’abord Olivier, marié avec Denise Doublot. Puis Maurice, marié avec Anne de Curzon, et mort à la guerre en 1940. Et enfin Roger qui épousa Marie Antoinette de Rocca-Serra (19). 
-        Paul Constant (1869-1947), docteur en médecine, qui fut maire de Saint-Fulgent de 1928 à 1947 et avait épousé en 1898 Marie Alexandrine Berthier, princesse de Wagram (1877-1918) . La même année il acheta, grâce à la fortune de sa femme, le château de Saint-Fulgent à Arthur des Nouhes. Le père de ce dernier, Alexis des Nouhes, l’avaient acheté en ruine en 1841 et reconstruit l’actuel château dans un style inspiré du classicisme Louis XIII.
Marie Alexandrine Berthier, princesse de Wagram, avait été élevée après le décès de sa mère dans la région d'Angers par François, comte de Clary. La grand-mère de Marie Alexandrine, Zénaïde Clary deuxième princesse de Wagram et première duchesse de Wagram, était parente de ce dernier. Zénaïde Clary eut pour marraine Joséphine Tasher de la Pagerie (Madame Bonaparte et impératrice de France), et ses tantes Julie et Désirée Clary épousèrent respectivement Joseph Bonaparte roi d'Italie puis roi d'Espagne, et Bernadotte roi de Suède (20).

Paul Constant de Grandcourt (image mortuaire)
(source Archives de Vendée, 
Fonds Bousseau : 42 J/19)
Paul de Grandcourt a accueilli des enfants juifs dans sa commune, durant la seconde guerre mondiale, et leur fit fréquenter l'écoleIl était un ami personnel d’Annie Ardon, avec qui il avait fait naufrage en 1906 au Spitzberg, à 600 kms du pôle nord. Celle-ci épousa ensuite Philippe Pétain et lui fit connaître Paul de Grandcourt. Celui-ci devint ainsi un des ami du maréchal, le recevant souvent à Saint-Fulgent (21).

Sa fille Odette (1899-1983) s’est mariée en 1923 avec Louis de Hargues (1889-1967) et vécu à Saint-Fulgent, où tous les deux sont enterrés, ainsi que leur fille Monique, et deux autres filles jumelles et mortes jeunes. Ils vécurent au château de Saint-Fulgent, faisant partie de leur héritage plus tard (22).

M. Maupilier, historien de Saint-Fulgent, rappelle que Louis de Hargues était le descendant d’un héros royaliste de la Grande guerre de 1793. Le temps d’un paragraphe il souligne avec satisfaction ce mariage avec une descendante d’une Guyet et d’un Martineau, authentiques révolutionnaires de Saint-Fulgent à la même période (23).

-        Louis Charles (1878-1954) qui fut propriétaire à Saint-Fulgent et docteur en médecine (24). Il épousa Thérèse Allègre qui mourut jeune, puis Marguerite Meyrier. Son fils unique, Marcel, est mort accidentellement en 1949 lors d'une baignade à Enley (Angleterre) dans la Tamise, à l’âge de 23 ans (25).

Les descendants de Narcisse de Grandcourt


Narcisse Hyacinthe Legras de Grandcourt, et Élise Martineau eurent un fils unique, Eugène Narcisse Gabriel (1834-1883), avocat à Nantes. Il épousa le 1e mai 1855 à Mouchamps Élisabeth Mathilde Majou des Grois, d’une famille ancienne de la noblesse vendéenne. C’est lui qui fut représentant du propriétaire dans les actes de gestion du domaine de Linières à partir d’une date non repérée. Marcel de Brayer avait nommé son père en 1868, et c’est lui qu’Amaury-Duval choisit en 1875 (26), mais probablement ce dernier l’était-il déjà compte tenu de l’âge atteint par son père.

On imagine Eugène de Grandcourt attaché à Linières, où sa mère avait vu le jour. L’universitaire Véronique Noël-Bouton-Rollet fait remonter les premières difficultés du domaine à la mort accidentelle de ce régisseur ou fondé de pouvoir, en 1883, survenue deux ans avant la disparition d'Amaury‑Duval (27). Lors de la construction d’une grange dans sa borderie de la route de Chauché (près du cimetière de Saint-Fulgent), il fut victime de la chute d’une chèvre de charpentier (engin élévateur) (28).

Une plaque a longtemps marqué l’endroit où il a été tué, à 100 m environ du cimetière au bord du routin qui longeait la propriété du château sur le côté gauche en montant. La plaque vue le 18 mars 1974 par l’abbé Boisson, était fixée sur une pierre de grison, et portait une date seulement : « 28 avril 1883 ». L’état civil de Saint-Fulgent précise que la mort eut lieu à 8 h 30 du matin ce jour-là. En 2016 le routin a disparu après l’urbanisation de la zone. Les pierres le long du routin ont-elles été récupérées ? 

Comme son cousin Charles, Narcisse de Grandcourt était amateur de chevaux, remportant des prix aux concours organisés en Vendée, en particulier en 1868. À Saint-Fulgent il possédait 4 métairies au Plessis Richard, la Petite Valinière, le Bois Bertrand, la Coussaie, des bois et une borderie près du cimetière. À Mesnard il possédait la ferme de la Boule. L’ensemble faisait environ 280 ha (28).

Côté politique on ne lui connaît pas d’engagement. On sait seulement qu’en janvier 1871 il était abonné au journal « La France » (29). Ce dernier était la propriété d’Émile de Girardin, de tendance libérale à l’époque. On sait que l'épithètete n’avait pas le même sens alors que maintenant.

Eugène de Grandcourt
Il existe aux Archives départementales de la Vendée un portrait de lui, dessiné au crayon graphite (30). Il avait les cheveux coiffés à plat et en arrière, avec des tempes un peu dégarnies et un front bien dégagé. Il nous apparaît massif, dégageant une puissance de caractère imposante, une autorité certaine, les traits mobiles et fins, dans un visage enveloppé. Ses yeux, et ses sourcils en accent circonflexe, lui donnent un air d’observateur à qui rien ne semble échapper. Son menton volontaire et ses narines retroussées donnent l’impression d’un tempérament volontaire, peut être bagarreur. Bref le type d’avocat à choisir pour soi, plutôt que de le voir dans le camp adverse. Avec lui, le jeune poète Marcel de Brayer et le vieux peintre Amaury-Duval, qui se sont succédés comme propriétaires de Linières de 1868 à 1885, devaient avoir le régisseur idéal pour la gestion du domaine. Un habitant de Saint-Fulgent a rapporté à l’abbé Boisson, historien, une anecdote révélatrice le concernant, en 1974, près d’un siècle après sa mort : « Je voudrais mourir comme un bœuf disait-il. Il fut pris au mot et mourut par la chute d’une chèvre » (31).

Habitant à Saint-Fulgent, Narcisse de Grandcourt eut trois enfants :
     - Narcisse Gabriel (1856-1858),
     - Mathilde Émilie (1859-1944), épouse de Joseph Le Roux (qui fut conseiller général), frère du peintre nantais Charles Le Roux. Ils demeurèrent à la maison de Groix (Saint-Germain-de-Princay). Leur fille, Josèphe Le Roux, épousa Félix Hélie.

Eugène Jules de Grandcourt, avocat 
(source Archives de Vendée, 
Fonds Bousseau : 42 J/19)
     - Eugène Émile (1863-1936), qui vécut à Saint-Fulgent et épousa Juliette Légeron. Ces derniers eurent deux enfants :
              - Eugène Jules Émile, avocat (1892-1954) qui épousa le 21 septembre 1925 Marie Thérèse Fontaines, et vécut à Nantes où fut un avocat et bâtonnier du barreau de Nantes. Sa réputation attira les caricaturistes comme en témoigne le dessin qui fut publié dans le journal "Le Phare" du 14 juin 1941 (ci-contre). Ils eurent trois enfants : Hubert, Jacqueline et Jean Louis. Ce dernier posséda la maison dite Chêne-Vert, anciennement auberge du (31).
              - Suzanne Juliette, née en 1894, qui épousa le 15 mai 1922 Joseph Bousseau (32). Il était le généalogiste de la famille, et a légué un fonds d’archives intéressants aux Archives de la Vendée, coté : 42 J/19.







(1) M. Maupilier, Saint-Fulgent sur la route royale, (Hérault Éditions) 1989, page 229.
(2) Véronique Noël-Bouton-Rollet, Amaury-Duval (1808-1885). l’Homme et l’œuvre, thèse de doctorat en Sorbonne Paris IV (2005-2006), page 128.
(3) Testament de Mme Guyet-Desfontaines du 6 mai 1868, Archives nationales, notaires de Paris : MC/ET/XIV/898.
(4) Archives de Vendée, Fonds Bousseau et famille de Grandcourt : 42J/19, Constance Legras Grandcourt.
(5) Archives de Vendée, Etude de Frappier notaire de Saint-Fulgent, papiers Guyet : 3 E 30/138, bail de la métairie de Fontaine (Saint-Fulgent) du 17-8-1829 de J. Guyet à Hervé.
(6) Archives de Vendée, étude de Frappier notaire de Saint-Fulgent, papiers Guyet : 3 E 30/138, vente du 24-10-1827 du Bois de la Cure aux Landes Genusson à Maillard.
(7) Actes testamentaires de Marcellin Guyet-Desfontaines, Archives nationales, études notariales de Paris, Me Pitaux : MC/ET/XIV/850. 
(8) Archives de la Société Éduenne d’Autun, Fonds Amaury-Duval, lettre d’Élise M. Grandcourt du 9 janvier 1838 (K 8 34). Emma est l’épouse du député et Isaure la fille de cette dernière, née d’un premier mariage.
(9) Archives de Vendée, étude de notaire de Saint-Fulgent, Frappier, dossier Guyet : 3 E 30/138, bail de la Morelière du 15-3-1830 de Gourraud à Biret. Aussi lettre du 1e juillet 1841 du maire Pierre Rochereau au préfet de la Vendée, Archives de Vendée, édifices et services publics, mairie de Saint-André-Goule-d’Oie : 1 Ǿ 633.
(10) Déclaration de succession de Guyet-Desfontaines au bureau de Montaigu le 5 octobre 1857 (vue 98 à 101 au premier registre et vues 2 à 7 au deuxième registre suivant). Aussi état des lieux de la métairie de la Morelière en 1870 : Archives privées E. François. 
(10) Procuration du 5 décembre 1868 par M. de Brayer à M. de Gandcourt, Archives nationales, notaires de Paris : MC/ET/XIV/898.
(11) Archives de Vendée, Etat-civil de Saint-Fulgent, mariage Adèle Martineau et Olivier de Grandcourt du 9-2-1835 (vue 8/106).
(12) Archives de Vendée, Fonds Bousseau et famille de Grandcourt : 42J/19, Olivier Gabriel de Grandcourt et sa descendance.
(13) Jean Lagniau, Le Landreau en les Herbiers, (1971).
(14) Archives Départementales de la Vendée, J. Maillaud, Notes généalogiques (T 11), page 386 et s.
(15) R. Valette, Mémoires de la Société des antiquaires de l’Ouest (1885) page 309.
(16) Amblard de Guerry, Chavagnes communauté Vendéenne, Privat (1988), page 277.
(17) ouestfrance.cd-script.fr/opdf/1927/01/14/85/1927-01-14_85_04.pdf
(18) Allusion au don de L. de la Boutetière au musée de la Roche-sur-Yon, un portrait d’Amaury-Duval peint par son ami V. Mottez, le représentant dans le boudoir du château de Linières. Le tableau a été récemment restauré par le musée.
(19) Idem (12).
(20) correspondance privée du 16 décembre 2015.
(21) Idem (12).
(22) Comte de Grimoüard, Les Fortin de Saint-Fulgent et de Bellaton, Touraine, Saint-Domingue, Nantes dans la revue Généalogie et Histoire de la Caraïbe, Numéro 240, octobre 2010.
(23) M. Maupilier, Saint-Fulgent sur la route royale, (Hérault Éditions) 1989, page 248.
(24) www.famillesvendeennes.fr   
(25) Archives du diocèse de Luçon, fonds de l’abbé Boisson : 7 Z 20, notes sur la famille de Grandcourt.
(26) Procuration du 28 juin 1875 par M. Amaury Duval à M. de Grandcourt, Archives nationales, études notariales de Paris, Me Pitaux : MC/ET/XIV/936.
(27) Idem (2), page 73.
(28) Idem (25).
(29) Archives de la société Éduenne d’Autun, fonds Amaury Duval : K8-36, journal de Marcel de Brayer pour l'année 1871.
(30) Archives de Vendée, Georges Legeron, Figures de Vendée 64 portraits (1937), no 28.
(31) Archives historiques du diocèse de Luçon, fonds de l’abbé Boisson : 7 Z 32-3, Amaury-Duval et les derniers propriétaires de Linières, témoignage de Fulgent Aulneau.
(32) Archives de Vendée, G. de Raignac, Généalogies de diverses familles, 8 J 44 : famille Legras de Grandcourt.

Emmanuel François, tous droits réservés
Juillet 2013, complété en août 2021

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jeudi 13 juin 2013

Découverte d’un poète vendéen, Marcel de Brayer

À Linières était un trésor, non pas fait de pièces d’or. Il n’était pas enfoui sous terre, ni caché dans quelque souterrain secret. Il était recouvert de poussière bien sûr, mais rangé dans des archives sur une étagère. C’est un trésor qu’on partage : la poésie de Marcel de Brayer.

Ce dernier, châtelain de Linières, n’a publié que 1 500 vers, dont les deux tiers une semaine avant de mourir à l’âge de 33 ans, en 1875. Sans héritier direct, il a été oublié avant même d’avoir eu le temps de se faire une notoriété. Et pourtant, Lamartine disait qu’il signerait volontiers ses vers.

L’oubli n’est pas étonnant si l’on se rappelle que l’héritier de Marcel de Brayer fut son grand-oncle, le peintre Amaury-Duval, de trente-quatre années plus âgé que lui, décédé sans descendance. Et les héritiers du peintre furent des cousins au cinquième degré, morts sans postérité eux-mêmes. Quant au dernier propriétaire du château de Linières, étranger à la famille, il l’a laissé se démolir en 1912.

Mettre à la disposition du public une anthologie de la poésie de Marcel de Brayer s’imposait naturellement, une fois découvert ce trésor, il y a peu.  

Le jeune comte de 1870 a dû croiser mon trisaïeul à la sortie de l’église de Saint-André-Goule-d’Oie, sans un mot pour lui probablement, n’étant pas de ses métayers. Comment croire que Jean François, âgé alors de 81 ans, enfant rescapé de la guerre de Vendée, et bordier demeurant au village de la Boninière, ait pu imaginer un instant que son petit-fils viendrait s’installer à Linières en 1912 après la démolition du château ? Et comment croire que l’un de ses arrière-arrière-petit-fils écrirait un livre, pour faire connaître les poèmes de ce jeune châtelain ? Impensable naturellement, et que de distances en effet ! Mais l’étude historique possède un mérite précieux : elle s’affranchit des distances ; et le récit historique choisit celle qui lui plait. J’ai pu compter les sous et les maîtresses du jeune comte, mais aussi noter ce qu’il a fait pour sa commune, apprécier son intelligence et savourer ses dons d’artistes. Et puis je suis né à Linières, où les lieux sont des paysages que j’ai découverts à sa suite. Alors, pour bien des raisons j’avais envie de faire connaître cet homme et son œuvre. Pour oser m’aventurer dans les espaces peu fréquentés de la poésie, j’ai eu la chance de bénéficier des encouragements de Jean François Tessier. Il a écrit la préface de ce livre. Découverte d’un poète vendéen : Marcel de Brayer, c’est sous ce titre que je viens de le publier sur le site d’édition internet : www.lulu.com. Pour y accéder directement : http://lulu.com/spotlight/efrancois

On peut se le procurer par internet chez lulu.com et aussi chez Amazon.fr
C’est la première fois que ces vers sont mis à la disposition d’un large public depuis leur première édition, il y a près de cent quarante ans. On sera frappé par le naturel et la sincérité des sentiments exprimés. On rencontre le poète dans les registres les plus variés, simples ou élevés, toujours avec sensibilité et finesse. Comme dans la poésie classique, il idéalise la nature et exalte l’amour sentimental, mais on le surprend rarement dans les lieux communs habituels de l’expression et de la morale. C’est qu’il est toujours sincère, nous laissant voir sa vérité de jeune homme blessé, cachée derrière les apparences trompeuses de la fortune et des mondanités, comme le fait remarquer J. F. Tessier. Un don habite ce jeune homme, avec ses doutes, car il a longtemps hésité avant de publier.

Marcel de Brayer a d’abord été parisien, puis il a hérité du domaine de Linières comprenant une quinzaine de métairies dans la région des Essarts et de Saint-Fulgent. Petit-fils du député des Herbiers, Guyet-Desfontaines, et du général de Napoléon, Michel de Brayer, il a été élu à 28 ans maire de Saint-André-Goule-d’Oie (1870-1875).

À côté du bourg de cette paroisse, mais sur la commune de Chauché, il a fait édifier un château à Linières au style raffiné. La décoration intérieure de ses murs a constitué l’œuvre majeure du peintre Amaury-Duval, son grand-oncle. Malheureusement le château a été démoli en 1912.

Le livre rappelle d’abord l’histoire de ses ascendants, engagés dans le siècle : les Chassériau, Guyet-Desfontaines et de Brayer. Puis il présente l’enfance endeuillée du petit Marcel et sa jeunesse dorée. Il fait aussi le récit de sa courte vie d’adulte, ordonnée principalement autour de son mandat de maire de Saint-André-Goule-d’Oie de 1870 à 1875, de la construction du nouveau château de Linières et de son œuvre poétique.

Le plaisir de la lecture, avec le souci de représenter la diversité de l’œuvre, m’a guidé dans le choix des quatorze poèmes ou extraits de poèmes offerts aux lecteurs. On y découvrira l’essentiel de la poésie de Marcel de Brayer tout à la fois dans les sentiments et dans les idées exprimés, ainsi que dans les formes adoptées.

À cause de leur intérêt propre, le livre se termine par la reproduction de son journal de voyage en Italie en 1874 et de son journal personnel en janvier et février 1871, en pleine guerre franco-prussienne.

La consultation des archives de la Société Eduenne des Lettres, Sciences et Arts à Autun, m’a fourni la documentation la plus abondante sur la vie personnelle et l’œuvre littéraire de Marcel de Brayer. C’est à Autun que se trouvait le trésor de Linières. Cette documentation fait partie du fonds Amaury Duval, conservé au musée Rolin de cette ville de Saône et Loire.

Je souhaite en même temps souligner l’importance qu’a constituée pour mes recherches l’outil internet. Même si beaucoup de documents écrits restent à numériser, j’ai pu accéder à nombre d’entre eux déjà. S’agissant de la famille de Brayer, que d’erreurs et de fausses pistes m’ont ainsi été offertes pour reconstituer les itinéraires individuels ! Mais l’augmentation du nombre de documents disponibles a permis des recoupements. J’ai pu aussi entrer en contact avec des internautes qui m’ont apporté des informations toujours essentielles : Véronique Noël-Bouton-Rollet, auteure d’une thèse sur Amaury-Duval, Nathalie Chassériau, Denis Lesueur, Denis Guilloteau, Paul David. Le moteur de recherche des Archives de Vendée et l’importance de ses documents à disposition en ligne constituent un modèle dans son domaine et un atout formidable. Une part du contenu de ce livre trouve son origine dans internet. Sa fabrication et sa diffusion auraient été impossible sans lui.

Voici le sommaire de l’ouvrage :

Préface de Jean François Tessier ………………………...
  
Avant-propos …………………………………………….
  
Des ancêtres engagés …………………………………….
Une enfance endeuillée …………………………………..
Une jeunesse dorée ………………………………………
Le nouveau château de Linières …………………………
Le maire de Saint-André, passionné de politique ……… .
Le poète ………………………………………………….
Anthologie de la poésie de Marcel de Brayer ……………
. L’amour piqué ……………………………………
. L’imitation ……………………………………..…
. Un fruit ……………………………………………
. Le rendez-vous …………………………………..
. Mon âme ………………………………………….
. Une prédiction …………………………………..
. Ma pensée ………………………………………..
. Souvenir de voyage ……………………………..
. La muse et le poète ………………………………
. Un vœu ……………………………………………
. Le givre …………………………………………...
. La statue ………………………………………….
. La muse en fuite ………………………………….
. Les aigles de Tyr ………………………………...
 
Le voyage en Italie ... ……………………...…………….

Le journal personnel de 1871 ………………………...….

Notes ……………………………………………… ……

Sommaire ………………………………………… ……..


Pour terminer j’ai plaisir à reprendre ces vers de L. Aragon que vient de m’envoyer une internaute ayant contribué au récit sur la vie de Marcel de Brayer :

                                                        "Son regard embellit les choses
                                                         Et les gens prennent pour des roses
                                                         La douleur dont il est brisé"
  

Emmanuel François, tous droits réservés