mercredi 2 mars 2011

Marcel de Brayer, maire et poète de Saint-André-Goule-d’Oie.

Nous avons publié en janvier et février 2011 le journal du jeune maire de Saint-André-Goule-d’Oie relatant sa vie dans la commune, et principalement les évènements de la guerre de 1870/1871. Un peu après, Marcel de Brayer, puisqu’il s’agit de lui, écrit un texte retrouvé comme brouillon dans ses archives personnelles, pour évoquer sa vie à Linières. Il a l’apparence d’une lettre à un ami, mais qu’importe, c’est le poète qui s’exprime. Voici ce qu’il observe de la campagne de Saint-André-Goule-d’Oie, au temps des bougies, il y cent quarante ans. En voici le texte, ou plutôt le projet de texte, un premier jet :

« Nous nous sommes promis mon cher ami de nous communiquer par lettre toutes les impressions que les circonstances diverses feraient susciter dans nos deux vies…

La vie que je mène ici est vous le savez fort monotone, loin de la ville et d’une route fréquentée, notre château n’offre comme distraction que la ferme et les bois qui l’entourent. Il faut aimer la campagne pour s’y plaire, tout y est calme, tranquille, et l’on oublierait vite les hommes si les liens du cœur ne vous attachaient à quelques-uns d’entre eux. Aussi n’attends pas dans les lettres que vous recevrez de moi des impressions bien variées, celles que j’éprouve ici dans mes courses au milieu des bois, qui suivent de cette existence solitaire, sont de ces impressions que l’on sent, mais qu’on ne peut décrire.
Eglise de Saint-André-Goule-d'Oie

C’est un point de vue, un horizon changeant à chaque minute d’effet et de couleur, comme les flots de la mer. C’est une clairière au milieu des bois toute remplie de la vapeur légère du matin, c’est le soleil le soir avant de disparaître sur la cime des grands arbres et les toits de chaume de la ferme, c’est la cloche de l’église voisine qui sonne à cette heure de demie obscurité qui précède la nuit. Ce sont ces mille voix de la nature qui sont si douces à qui les entend, si chères à qui sait les comprendre. Vous riez habitants de la ville, et vous m’appelez poète et rimeur. C’est que vous ne comprenez rien à ce que je vous dis. Vous qui ne connaissez que la lumière des bougies d’un bal ou le pâle soleil qui enchante les villes et vos rues, chers citadins que vous êtes, que devez-vous vous moquez de nos bougies !

Mais je vous ferai grâce de toutes ces belles choses qui ne sont pas à votre hauteur, prenez ceci comme vous l’entendez…

Vous savez quel a toujours été mon goût pour la politique, non comme application, mais comme conviction. Cette science qui apprend aux hommes à se régir en société a toujours eu d’attrait pour moi.

Ici dans ma solitude je passe en rêve tous ces sujets…C’est une bien belle et bien noble tâche que cette recherche des meilleures lois par lesquelles se puissent gouverner les hommes. Mais c’est une tâche aussi qui nous montre d’une façon bien désillusionnante le peu de perfection dont nous sommes capables…Vous ne savez pas combien il est doux de rêver à toutes ces choses sous l’ombrage de mes arbres chéris, au milieu de ces campagnes charmantes que le soleil rend si fécondes, le cœur et les yeux remplis de cette harmonie de la nature, qui, celle-là du moins, ne se trouble jamais. »

Emmanuel François, tous droits réservés

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